Question de Mme BORVO COHEN-SEAT Nicole (Paris - CRC) publiée le 15/10/1998

Mme Nicole Borvo attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à la santé sur le fait que la décision de l'Assistance publique de fermer le service d'oncologie pédiatrique de l'hôpital Robert-Debré, à Paris, pose de nombreux problèmes. Ce service unique à l'AP-HP a un taux d'occupation proche de 100 %. Il donne satisfaction aux patients et à leurs familles. Il a, sur le plan national et international, une réputation scientifique qui le place au premier rang dans la recherche clinique et le traitement des tumeurs solides des os. La décision de fermeture met en cause son entité et les moyens qui lui sont alloués et provoque un tollé parmi les milieux médicaux et les familles des petits malades. Aucun argument ne peut justifier l'éclatement de ce service qui travaille dans un domaine aussi sensible. Changer d'équipe médicale représente un danger pour les enfants, tant sur le plan psychologique que sur le plan du suivi strictement médical, même en cas de transmission intégrale des données. Pourquoi d'ailleurs couper ce service en deux, alors que le cancer des os, s'il touche principalement les enfants, entraîne un contrôle long, qui peut se poursuivre pendant dix ans. La séparation des enfants et des parents n'induirait-elle pas fatalement un changement d'équipe médicale en cours de traitement, et probablement du traitement même, pour les enfants actuellement suivis à Robert-Debré ? Pour toutes ces raisons, elle lui demande quelles mesures il compte prendre afin de maintenir l'entité de ce service.

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Réponse du ministère : Culture publiée le 28/10/1998

Réponse apportée en séance publique le 27/10/1998

Mme Nicole Borvo. Madame la ministre, la décision de l'Assistance publique des hôpitaux de Paris de fermer le
service d'oncologie pédiatrique de l'hôpital Robert-Debré, pose de très nombreux problèmes.
Des centaines de familles de malades, d'anciens malades, des représentants syndicaux s'opposent actuellement au
démantèlement de ce service, voulu par l'ancienne direction depuis de longues années, pour des raisons difficilement
compréhensibles, je dois le dire.
Ce service unique de l'assistance publique a un taux d'occupation proche de 100 % et donne satisfaction aux patients
et à leurs familles. Il a, sur le plan national et international, une réputation scientifique qui le place aux premiers rangs
dans la recherche clinique et le traitement des tumeurs solides des os.
Faire bénéficier d'autres enfants atteints par ce terrible mal de ces traitements, c'est l'objet de ce mouvement, qui
souligne le danger pour les enfants malades, tant sur le plan psychologique que sur le plan du suivi strictement
médical, de changer d'équipe médicale, même en cas de transmission intégrale des données. En effet, un traitement
sur mesure n'est jamais reproductible, quelle que soit la qualité des équipes.
Aux yeux de tous ceux qui s'intéressent à la question, aucun argument ne peut justifier l'éclatement de ce service.
Par ailleurs, pourquoi couper ce service en deux alors que les cancers des os, s'ils touchent principalement les enfants,
entraînent un contrôle long qui peut se poursuivre pendant dix ans ou plus ? La séparation des enfants et des parents
n'induira-t-elle pas fatalement un changement d'équipe médicale et forcément du traitement lui-même pour les enfants
qui sont actuellement suivis à l'hôpital Robert-Debré ?
Quelles sont les mesures qui peuvent être prises afin de maintenir cette entité ?
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Madame la sénatrice, vous avez appelé
l'attention de M. le secrétaire d'Etat à la santé sur l'avenir du service d'oncologie de l'hôpital Robert-Debré.
L'association des familles qui s'est constituée ainsi que le médecin - puisqu'il s'agit d'un seul médecin - ont été reçus
par le cabinet de M. Kouchner et longuement écoutés.
L'Assistance publique des hôpitaux de Paris est souvent critiquée, en particulier pour son immobilisme et pour son
attitude volontiers « parisiano-centriste ».
Dans le dossier qui nous préoccupe, l'Assistance publique des hôpitaux de Paris prend une décision non pas de
fermeture mais de transfert d'un service vers une structure pédiatrique située à proximité, l'hôpital Trousseau, qui jouit
d'une reconnaissance indiscutable en ce qui concerne le service d'oncohématologie. Dois-je ajouter que les deux
établissements ne sont distants que de deux à trois kilomètres, alors qu'en province les services communs sont la
règle et sont généralement uniques par région ?
J'en profite pour ajouter que la région d'Ile-de-France dispose de deux autres structures de cancérologie pédiatrique qui
offrent également aux familles des conditions remarquables de prise en charge.
En vérité, je ne crois pas que cette décision soit contraire à la santé publique et, à la connaissance de mon collègue,
ce transfert est aujourd'hui accepté par le médecin.
Le problème qui se pose est d'ordre humain, du fait de l'attachement très particulier - j'insiste sur le mot « particulier » -
de ces familles à un médecin dont elles sont persuadées qu'il est le seul à pouvoir prendre en charge correctement leur
enfant. Croyez bien que M. Bernard Kouchner comprend ce souci, que nous partageons tous, étant donné la gravité
des cas. Toutefois, je tiens à vous assurer qu'il n'y a pas et qu'il n'y aura pas de rupture dans la prise en charge des
enfants atteints de pathologies aussi graves.
Vous comprendrez bien, madame la sénatrice, que nous ne pouvons pas cautionner l'idée selon laquelle on
hospitaliserait de jeunes enfants dans un service d'adultes où ils ne trouveraient pas l'environnement pédiatrique
classique et souhaitable en termes de soins, d'activités scolaires et de jeux.
S'agissant des enfants plus jeunes qui ont déjà commencé des traitements lourds avec ce médecin, il paraît
souhaitable qu'ils puissent continuer à être suivis par ce médecin, et c'est ce que le cabinet de M. Kouchner lui a fait
savoir et a confirmé auprès de l'Assistance publique. Les enfants pourront donc continuer à être suivis par le même
médecin.
Il s'agit non pas de démanteler un service aux compétences reconnues, mais de mieux organiser les activités
médicales entre les différents hôpitaux de l'Assistance publique des hôpitaux de Paris. Le transfert de l'activité
d'oncologie de l'hôpital Robert-Debré va permettre le renforcement du pôle de cancérologie pédiatrique de l'hôpital
Armand-Trousseau et du pôle de cancérologie pour les adultes de l'hôpital Avicenne. Vous savez que le secrétaire
d'Etat à la santé est particulièrement attaché à ce dernier projet.
En revanche, et pour répondre aux besoins de la population, ce transfert permettra le développement de la pédiatrie
générale et de la pédiatrie à orientation pneumologique à l'hôpital Robert-Debré, favorisant ainsi une meilleure adaptation
des orientations de l'établissement.
Madame la sénatrice, M. Bernard Kouchner confirme que cette opération de transfert intervient dans des conditions
garantissant la continuité des soins et la sécurité des enfants et des jeunes adultes qui sont actuellement suivis.
Mme Nicole Borvo. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Vous comprendrez, madame la ministre, que je ne sois pas intégralement satisfaite par votre
réponse.
Je sais que la création d'une unité fonctionnelle d'adolescents, selon les critères de l'OMS, c'est-à-dire d'une unité
destinée aux jeunes âgés de dix à vingt ans, dans laquelle seraient pris en charge tous les enfants, adolescents et
jeunes adultes traités actuellement dans le service d'oncologie par l'équipe Desbois-Delépine, est une idée chère à M.
le secrétaire d'Etat à la santé.
Si on lui en donne les moyens, l'hôpital Avicenne, dirigé par des administratifs et des médecins respectés et qui savent
se faire respecter, est prêt à recevoir dans ses murs cette petite équipe de très haut niveau, spécialisée dans le
traitement des cancers rares de l'enfant et de l'adolescent. Il n'y aurait donc aucun risque pour les enfants de dix à
quinze ans, surtout si la garde médicale spécialisée qui a permis le développement de ces activités pointues depuis
1986 est maintenue.
Cette solution que vous n'avez, me semble-t-il, pas évoquée, permettrait de résoudre les problèmes d'éclatement de ce
service vers deux hôpitaux différents.
Je me permets d'évoquer cette éventualité, parce que l'éclatement du service entre les deux hôpitaux me paraît
contestable. Je ne sais pas ce que les intéressés en pensent exactement à l'heure qu'il est, mais il me semble que l'on
devrait prendre davantage en considération l'hypothèse d'un transfert global.

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