Question de M. HOEFFEL Daniel (Bas-Rhin - UC) publiée le 02/06/1999

M. Daniel Hoeffel attire l'attention de Mme le ministre de la culture et de la communication sur l'importance de la ratification de la convention Unidroit. L'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe a adopté à l'unanimité la recommandation 1372 demandant aux 40 Etats membres du conseil de l'Europe de ratifier la convention Unidroit qui impose à l'acquéreur d'un objet d'art un minimum de diligence pour s'assurer de la régularité de son achat et bénéficier ainsi de la présomption de bonne foi. Notre pays ne serait-il pas dans son rôle en prenant l'initiative de la ratification de cette convention et en invitant nos partenaires de l'Union européenne ainsi que les candidats à l'adhésion à la ratifier également ? Nos concitoyens ne s'attacheront durablement à l'Europe que si la disparition des frontières s'accompagne du respect des cultures et d'une meilleure sécurité. Une large ratification de la convention Unidroit compléterait cet effort nécessaire en rendant plus difficile la revente d'objets arrachés au patrimoine des différentes nations européennes.

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Réponse du ministère : Culture publiée le 10/11/1999

Réponse apportée en séance publique le 09/11/1999

M. Daniel Hoeffel. Madame la ministre, je souhaite attirer une fois de plus votre attention sur l'importance de la
ratification de la convention européenne « Unidroit ».
En répondant à une question orale, le 15 décembre dernier, vous aviez bien voulu indiquer, madame la ministre, que
vous étiez convaincue de l'intérêt que présentait pour la France la ratification de cette convention et que vous meniez un
dialogue constructif et actif afin que cette ratification soit le fait non seulement de la France, mais aussi d'autres Etats.
L'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe a adopté à l'unanimité la recommandation 1372 demandant à tous
les Etats membres du Conseil de l'Europe de ratifier la convention « Unidroit », qui impose à l'acquéreur d'un objet d'art
un minimum de diligence pour s'assurer de la régularité de son achat et bénéficier ainsi de la présomption de bonne foi.
La convention « Unidroit » vise non pas à abolir la présomption de bonne foi de l'acquéreur, mais à l'adapter aux
spécificités des objets d'art, et cette adaptation me semble à la fois plus opportune et plus nécessaire que jamais.
Elle est plus opportune que jamais, car l'information circule aujourd'hui - et ce sera encore plus vrai demain - avec une
facilité naguère inconnue. On peut ainsi publier sur Internet les photographies et les caractéristiques de tableaux, de
sculptures, d'objets d'orfèvrerie et de mosaïques qui forment le patrimoine public et privé des différentes nations. Il est
donc possible de diffuser le signalement des oeuvres volées.
Elle est plus nécessaire que jamais, car le marché de l'art est déjà largement mondialisé. Or ce sont les receleurs qui
font les voleurs, et il importe donc d'assécher les débouchés de tels trafics, qui sont liés au grand banditisme et au
recyclage de l'argent de la drogue et du terrorisme. En outre, il n'est pas admissible que les grands musées et les
grandes collections des pays les plus opulents s'enrichissent d'objets volés et même arrachés à leur lieu d'origine. Les
exemples ne manquent pas à cet égard.
Notre pays serait dans son rôle en prenant l'initiative de la ratification de cette convention et en invitant ses partenaires
de l'Union européenne, ainsi que les pays candidats à l'adhésion, à la ratifier également.
Nos concitoyens ne s'attacheront durablement à l'Europe que si la disparition des frontières s'accompagne du respect
des cultures et, d'une manière générale, d'une meilleure sécurité. Une large ratification de la convention « Unidroit »
compléterait cet effort nécessaire, en rendant plus difficile la revente d'objets arrachés au patrimoine des différentes
nations européennes.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le sénateur, vous n'ignorez pas
que je considère la convention « Unidroit » sur les biens culturels volés ou illicitement exportés, signée à Rome le 24
juin 1995, comme un instrument international de première importance pour la sauvegarde des patrimoines culturels
nationaux et du patrimoine de l'humanité tout entière.
La convention « Unidroit » est entrée en vigueur pour les neuf Etats qui l'ont ratifiée ou y ont adhéré, parmi lesquels trois
pays européens, la Finlande, la Hongrie et la Roumanie.
La France a d'ores et déjà engagé le processus législatif de ratification de la convention. Un projet de loi de ratification a
ainsi été soumis à l'ensemble des ministères concernés. J'ai obtenu l'assurance de mon collègue Hubert Védrine,
ministre des affaires étrangères, qu'une fois le traitement juridique interministériel du texte achevé la convention serait
traitée de façon prioritaire.
Mais, comme vous le savez, l'efficacité des dispositions de la convention dépend très largement de la mise en oeuvre
de celle-ci par l'ensemble des pays concernés, notamment par les principaux pays importateurs de biens culturels. Il
importe donc que la convention « Unidroit » devienne effective entre la plupart des pays européens et qu'elle puisse les
lier par une action commune.
Dans ces conditions, je considère que l'annonce de la ratification de la convention « Unidroit » par la France constituera
un signal fort adressé aux autres pays qui devraient s'engager, à leur tour, dans la voie de la ratification.
Ainsi, monsieur le sénateur, depuis la précédente question orale que vous m'aviez posée en décembre 1998, j'ai non
seulement engagé le processus interministériel qui permettra d'aboutir à la discussion du projet de loi de ratification,
mais j'ai aussi signalé à un certain nombre de mes collègues européens la nécessité de cheminer ensemble vers la
ratification de cette convention.
Il est aussi très important, comme vous l'avez souligné, que, pour lutter contre les vols et le banditisme liés à ce
marché illicite d'oeuvres d'art volées, nous puissions mettre en oeuvre - Mme le garde des sceaux y travaille - une
coopération judiciaire active. Par ailleurs, une collaboration très étroite avec M. Chevènement m'a permis d'obtenir le
concours d'un spécialiste des questions de sécurité, qui travaille exclusivement pour le ministère de la culture en
apportant ses conseils à nos institutions publiques, mais aussi aux propriétaires privés, car les uns et les autres sont
évidemment menacés.
En outre, grâce aux créations d'emplois qui sont inscrites à mon projet de budget pour 2000, nous pourrons également
accroître le nombre d'emplois de surveillance et améliorer l'accueil du public, ce qui est aussi une façon de prévenir les
vols qui, parfois, surviennent même de jour.
Il s'agit en tout cas d'une question d'actualité. Les ventes qui ont eu lieu ces temps-ci à New York montrent en effet à
quel point les prix peuvent monter, à quel point aussi cela peut tenter un certain nombre de malfaiteurs qui, à partir des
vols d'oeuvres d'art, cherchent à créer de véritables réseaux mafieux.
Ce problème constitue une préoccupation importante pour le Gouvernement. Je suis heureuse d'avoir pu le réaffirmer en
répondant à cette question.
M. Daniel Hoeffel. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Hoeffel.
M. Daniel Hoeffel. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse qui témoigne de l'intérêt que vous portez à
la ratification de la convention Unidroit.
Je me réjouis que, depuis décembre 1998, la procédure interministérielle qui doit déboucher sur cette ratification ait fait
des progrès incontestables ; je souhaite qu'elle aboutisse très rapidement car, si la convention Unidroit est importante
pour la France, je crois davantage encore en sa position de pays phare pour bien montrer à tous les pays européens
qui n'ont pas encore procédé à la ratification de cette convention l'importance qu'elle y attache. Il y va de la préservation
du patrimoine culturel et artistique européen. Puissiez-vous, très rapidement, madame la ministre, nous annoncer la
concrétisation de la dernière phase de cette ratification.

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