Question de M. RICHERT Philippe (Bas-Rhin - UC) publiée le 11/02/2000

M. Philippe Richert appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le problème des critères de classement des emplois de direction des Etablissements publics de coopération intercommunale (EPCI). Un projet de décret devait solutionner ce problème en adoptant, pour l'ensemble des EPCI à fiscalité propre, le critère unique de la population regroupée pour le calcul des seuils d'accès aux emplois fonctionnels. Or il semblerait que ce critère unique de la population totale ne soit pas retenu pour les EPCI regroupant moins de 20 000 habitants. Une telle disposition introduit une discrimination tout à fait inacceptable entre les territoires urbains et les territoires ruraux et risque de rendre très difficile pour les structures intercommunales de moins de 20 000 habitants le recrutement de cadres motivés et compétents. Il souhaiterait donc connaître ses intentions réelles et les mesures qu'il entend prendre pour que les EPCI de moins de 20 000 habitants, qui sont les plus nombreux en France, puissent continuer de proposer des conditions de travail susceptibles d'attirer les cadres motivés et compétents dont elles ont besoin pour assurer leurs missions.

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Réponse du ministère : Défense publiée le 08/03/2000

Réponse apportée en séance publique le 07/03/2000

M. Philippe Richert. Monsieur le ministre, au-delà du seul classement des emplois de direction des établissements
publics de coopération intercommunale, les EPCI, je souhaite étendre mon interrogation à l'avenir même des EPCI dits
ruraux.
Un projet de décret devait résoudre le problème des critères de classement en adoptant pour l'ensemble des EPCI à
fiscalité propre le critère unique de la population regroupée pour le calcul des seuils d'accès aux emplois fonctionnels.
Autrement dit, pour un EPCI formé de plusieurs communes, on devait tenir compte tout simplement du nombre total
d'habitants résidant dans ces communes.
Or il semblerait que ce critère unique de la population totale ne soit finalement retenu que pour les EPCI regroupant
plus de 20 000 habitants, excluant donc les EPCI de moins de 20 000 habitants.
Une telle disposition introduit une discrimination tout à fait inacceptable et dommageable entre les territoires urbains et
les territoires ruraux, et risque de rendre très difficile pour les structures intercommunales de moins de 20 000 habitants
le recrutement de cadres motivés et compétents.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, nous savons tous que l'avenir de l'intercommunalité à fiscalité propre dans
les territoires ruraux est difficile à assurer et qu'il faut y favoriser le recrutement de collaborateurs de haut niveau pour
que les établissements concernés puissent disposer des ressources humaines leur permettant de mener à bon terme
leurs projets.
Je souhaiterais donc connaître les intentions réelles du ministre de l'intérieur et les mesures qu'il entend prendre pour
que les EPCI de moins de 20 000 habitants, qui sont les plus nombreux en France et qui concernent le monde rural,
puissent continuer de proposer des conditions de travail susceptibles d'attirer les cadres motivés et compétents dont ils
ont besoin pour assurer leurs missions.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Alain Richard, ministre de la défense. Monsieur le sénateur, à la suite du rapport remis à M. Zuccarelli, - qui est
actuellement retenu à l'Assemblée nationale -, sur le recrutement et le déroulement de carrière des fonctionnaires
territoriaux, le Gouvernement a engagé une réflexion, en liaison avec les représentants des différents partenaires
concernés, sur les seuils de création de certains grades ou emplois dans la fonction publique territoriale.
Dans son principe, le système des seuils démographiques encadrant l'accès aux grades et aux emplois supérieurs doit
être conservé - c'est la conclusion que le Gouvernement tire de la réflexion engagée - pour garantir à ces emplois un
niveau de recrutement constant et favoriser la mobilité de leurs titulaires. Ce système constitue, à notre avis, un
instrument objectif de régulation des carrières territoriales, propre à obvier au risque de surenchère et de désordre dans
les politiques de recrutement, risque lié notamment aux différences de richesse financière des collectivités.
Certains seuils doivent cependant être adaptés pour répondre aux besoins des collectivités territoriales et des EPCI,
plus de quinze ans après la mise en oeuvre des textes relatifs à la décentralisation et au statut des fonctionnaires
territoriaux.
Dans le cadre de l'application de la loi du 12 juillet 1999 sur le renforcement et la simplification de la coopération
intercommunale, le Gouvernement a décidé de donner la priorité à la redéfinition des critères assimilables entre
communes et EPCI à fiscalité propre sur la base de seuils démographiques.
Les choix effectués sont guidés par le souci de valoriser et de développer la coopération intercommunale la plus
intégrée, c'est-à-dire celle qui s'assortit d'une fiscalité propre.
En ce sens, un projet de décret qui se fonde sur le seuil démographique a été soumis, le 15 décembre 1999, au
Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, qui a émis un avis favorable à une large majorité.
Ce texte est construit à partir d'un principe simple, applicable aux EPCI à fiscalité propre : le critère de la population
regroupée. Ce critère, déjà applicable aux communautés urbaines, sera rendu également applicable aux communautés
d'agglomération, ainsi qu'aux communautés de communes regroupant au moins 20 000 habitants. Ce nouveau système
est appelé à remplacer un système de critères combinés, qui prenait en compte l'étendue des compétences de
l'établissement, l'importance de son budget, le nombre ainsi que la qualification de ses agents, et qui s'appliquait
jusqu'à présent à tous les EPCI, hormis les communautés urbaines. Ce système des critères combinés ne jouera plus
que pour les syndicats de communes.
Le seuil qui détermine l'accès aux emplois fonctionnels de direction dans les EPCI, qui a été fixé à 20 000 habitants,
reste inchangé par rapport à la situation actuelle.
Le simple maintien de cette exigence d'une population de plus de 20 000 habitants regroupée dans l'établissement
public est évidemment à rapprocher du seuil de fonctionnalité du secrétaire général de commune, qui, suivant la même
logique, s'applique également à partir de 20 000 habitants. Dans la mesure où les EPCI ont une gamme de
compétences moins large que les communes, on peut même considérer que le seuil de 20 000 habitants applicable à
un groupement de communes pour donner accès aux emplois fonctionnels fait bénéficier la coopération intercommnale
d'un traitement plus favorable que les structures communales elles-mêmes.
La modification introduite par le projet de décret réside dans la suppression de la référence aux trois autres critères
pour définir la vocation des EPCI à avoir des emplois fonctionnels. Ce dernier changement est important. Alors que la
très grande majorité des communautés de communes et des districts est actuellement exclue du droit d'avoir des
emplois fonctionnels, le nouveau dispositif leur permettra de relever de ce régime, qui est plus attractif en termes de
niveaux de qualification et de rémunération, pour le recrutement de leurs cadres supérieurs. En effet, l'application des
règles actuelles, quand on combine les trois critères, aboutit en réalité à écarter un très grand nombre d'établissements
publics de coopération intercommunale du droit de recrutement au titre des emplois fonctionnels.
Qu'en est-il des EPCI à fiscalité propre qui se situent en dessous du seuil de 20 000 habitants ? Ils gardent la
possibilité de confier les fonctions de directeur au titre des missions de son grade à un fonctionnaire relevant du cadre
d'emploi des attachés territoriaux, l'exercice de ces missions pouvant en outre donner lieu à l'attribution d'une nouvelle
bonification indiciaire, spécifique de cet emploi.
Le décret en cause devrait être prochainement publié. Il constitue une évolution très positive, à travers l'augmentation
des droits et avantages des personnels dans de nombreux établissements publics, sans porter préjudice à aucune
collectivité ni à aucun établissement public, au regard de leur situation actuelle.
Cette réforme constitue cependant une première étape. La réflexion se poursuivra à propos des principes d'assimilation,
notamment en ce qui concerne la création des grades subordonnée à un seuil démographique. En toute hypothèse,
cette évolution ne fera qu'accroître la possibilité donnée aux collectivités, suivant le mode de coopération
intercommunale qu'elles ont choisi, de recourir à des collaborateurs d'un niveau plus élevé en encourageant des
regroupements aussi larges et cohérents que possible, en milieu urbain comme en milieu rural.
M. Philippe Richert. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Richert.
M. Philippe Richert. Monsieur le ministre, nous savons bien que l'avenir de la structuration de notre territoire repose
largement sur la réussite des EPCI, sur leur faculté de dessiner de nombreux projets et de drainer des compétences
multiples, de disposer d'un encadrement qui soit à la hauteur de la complexité des tâches qui leur sont confiées.
La situation d'une commune de 20 000 habitants et celle d'un EPCI de 20 000 habitants ne sont pas du tout
équivalentes. En milieu rural, un EPCI de 20 000 habitants peut regrouper quarante communes ! Cela implique des
relations à organiser, le montage de projets autrement complexes, dans le domaine éducatif, dans le domaine culturel
ou dans le domaine social.
Il est donc très difficile de comprendre pourquoi on introduit aujourd'hui cette différence entre les EPCI selon qu'ils
regroupent plus ou moins de 20 000 habitants quant à leur faculté de recruter des collaborateurs de haut niveau.
Vous avez terminé votre propos en disant que la réflexion allait se poursuivre et que des projets complémentaires, dans
le cadre de cette restructuration, pourraient voir le jour.
Je souhaite que, dans cette perspective, il soit tenu compte du besoin vital qu'ont les structures intercommunales en
milieu rural de pouvoir se doter des moyens humains leur permettant de faire face aux enjeux du XXIe siècle. Il y a
aujourd'hui trop de secteurs ruraux en déliquescence. Ils se cherchent un avenir, et nous devons leur offrir la possibilité
de se doter eux-mêmes des moyens nécessaires pour réussir cette mutation du XXIe siècle. J'espère que la réflexion
que vous avez évoquée, monsieur le ministre, va effectivement se poursuivre et qu'elle aboutira.

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