Question de M. TRÉGOUËT René (Rhône - RPR) publiée le 07/09/2000

M. René Trégouët attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat au patrimoine et à la décentralisation culturelle sur l'avancée rapide de la numérisation, et donc de l'accès à tous par l'internet, des grands musées européens tels que le Rijksmuseum d'Amsterdam. Il lui demande de bien vouloir, d'une part, lui confirmer la compétence de son ministère en la matière et dans l'affirmative de lui faire un point de l'état d'avancement de celle-ci pour les musées nationaux. Il lui demande en second lieu de bien vouloir lui expliquer ce qu'il compte entreprendre dans le cadre de la décentralisation culturelle pour laquelle il a reçu compétence. Il lui demande enfin de bien vouloir lui faire un point sur la technique du nettoyage des cathédrales au laser, afin de savoir si son utilisation s'avère concluante, notamment en termes de qualité/prix, et si elle va continuer à être utilisée.

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Réponse du ministère : Patrimoine publiée le 28/12/2000

Réponse. - Le ministère de la culture et de la communication est fortement engagé depuis plusieurs années dans l'action menée par le Gouvernement pour préparer l'entrée de notre pays dans la société de l'information. Pour faciliter l'accès aux fonds publics et aux informations sur les collections nationales, un plan de numérisation des fonds iconographiques et sonores appartenant à l'Etat a été lancé en 1996, avec le soutien initial de la DATAR. Depuis cette date, il a été poursuivi chaque année et a bénéficié d'un financement croissant (5 millions de francs en 1999, 8 millions en 2000). En 2000, une dotation supplémentaire de 4 millions de francs a été inscrite au budget du ministère afin de subventionner des programmes de numérisation menés par des partenaires publics ou privés qui seraient complémentaires des projets des services du ministère. Ainsi, en ce qui concerne les musées, certaines opérations d'importance ont fait l'objet d'un effort des établissements eux-mêmes. Au musée du Louvre par exemple, 77 000 vues couleur ont été numérisées et intégrées dans la base du département des arts graphiques qui couvre la totalité du fonds de dessins en noir et blanc et couleur ; sur l'ensemble des 53 900 fiches des départements des antiquités égyptiennes et des antiquités grecques, étrusques et romaines présentes dans les bases Pharaon et Jupiter, 85 % sont illustrées d'une ou plusieurs images, soit environ 46 000 images numériques ; l'inventaire du département des objets d'art est complètement saisi, la couverture en images est réalisée à 51 %. Le pourcentage d' uvres illustrées dans les bases de données est de 38 % et il devrait augmenter dans les années à venir avec la numérisation des collections des départements des sculptures, des peintures et des antiquités orientales. Mais la numérisation des fonds des musées nationaux est aussi en grande partie assurée par l'agence photographique de la réunion des musées nationaux (120 000 images consultables en ligne à l'adresse : www.photo.rmn.fr). En outre, certains fonds, d'un intérêt scientifique incontestable mais ne relevant pas directement de la politique commerciale de l'agence photographique, ont bénéficié d'un financement du plan de numérisation. En 1999, 1 300 phototypes anciens conservés au musée Guimet (notamment les premières photographies d'Angkor en 1866), 10 000 photographies des archives Picasso et 12 000 cartes postales du Musée national des arts et traditions populaires ont ainsi été numérisés. Ces images numériques sont reversées sur le système informatique de chaque musée national de manière à faciliter les opérations d'inventaire, de gestion et de documentation. Les images libres de droits sont également reversées sur les bases documentaires nationales. Ainsi se constitue progressivement le catalogue collectif national des musées de France consultable sur Internet depuis 1995 ; 208 500 images plein écran ont été consultées en 1999 et 403 500 pendant les huit premiers mois de 2000. La procédure mise en place pour la numérisation des fonds d'Etat a également permis de soutenir de nombreuses initiatives prises dans toutes les régions de France. Le rôle de coordination des DRAC est demeuré déterminant pour maintenir une cohérence dans les actions régionales, soutenir les services les moins bien pourvus et susciter des collaborations entre équipes. Le plan de numérisation a incité au regroupement de moyens et à leur mutualisation. Ainsi, plusieurs DRAC (PACA, Pays de la Loire, Champagne-Ardenne, Poitou-Charentes...) ont mis en place des pôles techniques sur l'image dont la vocation est de travailler pour tous les services et de rassembler les compétences. Dans certaines régions, de véritables synergies se sont créées en interne mais aussi avec des partenaires extérieurs et des collectivités locales. Le financement du ministère de la culture et de la communication a permis de débloquer des crédits locaux qui ont accéléré les programmes de numérisation, menés pour des musées régionaux, pour des archives départementales ou des bibliothèques municipales dont les responsables ont montré un grand dynamisme. Les synergies qui se constituent ainsi autour de certains projets scientifiques et culturels peuvent être très productives en termes de développement et d'action. Dès les années 1990, la France a été en pointe dans le développement de la technique de nettoyage de la pierre au laser. A la suite des recherches menées au laboratoire de recherchedes monuments historiques, une gamme d'appareils laser a été produite et commercialisée par la société BMI. Le nettoyage et la restauration du portail sud de la façade occidentale de la cathédrale d'Amiens ont fait l'objet d'un chantier expérimental dont les résultats ont paru si prometteurs que depuis lors, la technique du laser s'est largement répandue en France tant pour le nettoyage de sculptures in situ, sur les édifices en cours de restauration, que pour le nettoyage dans un atelier de restauration de statues provenant de monuments ou de musées. Par rapport aux techniques traditionnelles de nettoyage par microsablage ou par application de compresses, l'utilisation du laser présente en effet l'avantage, grâce à la possibilité d'un réglage très fin du faisceau laser, d'éliminer les salissures sans attaquer la pierre, avec moins de risques pour l'environnement (le procédé n'emploie pas d'eau ni d'abrasif), en conservant les patines (ce qui est important sur des monuments historiques) et en permettant, grâce à une plus grande vitesse de nettoyage, des gains de temps appréciables sur les chantiers. Le nettoyage au laser n'est cependant pas d'application universelle. Il ne permet pas d'éliminer les lichens, les mousses ou les algues, il ne décape pas les peintures, il modifie la teinte des pigments et son usage est donc déconseillé pour nettoyer par exemple des sculptures polychromes. Son emploi entraîne des contraintes : mise en place d'échafaudages larges et solides capables de supporter de gros appareils, conditions de sécurité draconiennes, alimentation électrique importante, circuit de refroidissement craignant le gel. Enfin, le prix d'achat des machines reste relativement élevé : de 400 000 à 700 000 francs selon les modèles, et le coût de cet investissement se répercute nécessairement sur le coût horaire des restaurations, ce qui explique sans doute que l'emploi du laser ait été jusqu'à présent limité au nettoyage d' uvres d'art ou d'ensembles sculptés de grande qualité sur des édifices importants et complexes. Mais des recherches sont en cours pour le développement de lasers de nettoyage " grandes surfaces " qui permettraient d'appliquer le procédé aux façades. En conclusion, on peut considérer que le laser a aujourd'hui fait ses preuves : il s'est révélé un outil fiable, performant et supérieur dans de nombreux cas aux méthodes traditionnelles. On compte plus d'une quinzaine de portails sculptés nettoyés avec le laser (portails de Notre-Dame-de-Paris, des cathédrales d'Amiens, Bordeaux, Poitiers, du transept Sud de la cathédrale de Bourges, du transept Nord de l'église Saint-Michel de Bordeaux, portails Sud de l'abbaye de Saint-Benoît-sur-Loire, de la cathédrale de Tours, etc.). Les maîtres d' uvre, les restaurateurs l'ont adopté et intégré dans la panoplie des procédés de restauration. Dix ans après l'apparition du procédé, la France conserve une certaine avance mais la technique est en train de se répandre rapidement en Europe, notamment en Italie et au Royaume-Uni.

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