Question de M. ABOUT Nicolas (Yvelines - RI) publiée le 14/09/2000

M. Nicolas About attire l'attention de M. le Premier ministre sur la forte déception exprimée par les orphelins de guerre non juifs, qui se retrouvent exclus du bénéfice de l'indemnisation, instaurée par le décret du 13 juillet 2000 et réservée aux seuls orphelins de déportés juifs. Loin de remettre en cause la légitimité d'une réparation officielle pour les orphelins de déportés juifs, victimes des persécutions nazies, et dont les souffrances ne sont pas contestables, il s'interroge néanmoins sur la constitutionnalité de ce décret, qui instaure une discrimination entre les orphelins de déportés, fondée sur des critères exclusivement religieux. La souffrance des uns ne saurait primer sur la souffrance des autres. Perdre un parent en déportation est aussi douloureux pour un enfant juif que pour un enfant chrétien, musulman ou tzigane. Le devoir de mémoire doit s'exercer à l'égard de tous ceux qui sont morts, dans des conditions terribles, dans les camps de déportation et ce, sans distinction de race, de sexe, d'origine, d'Etat de santé ou de religion. Il lui rappelle, d'ailleurs, que depuis le Concordat, et la loi de séparation de l'Eglise et de l'Etat, la Constitution française n'autorise pas l'Etat à opérer des différences de traitement entre les Français, en fonction de leur appartenance religieuse. L'Etat se doit de rester neutre. Comme le précise l'article 2 de la Constitution de 1958, la République " assure l'égalité devant la loi des citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion " et elle " respecte toutes les croyances ". C'est pourquoi, par souci d'équité et dans le respect dû à l'ensemble des déportés de France, il lui demande de revenir sur le décret du 13 juillet 2000, et d'étendre le bénéfice de ces indemnisations à tous les orphelins de déportés, quelles que soient leur origine, leur race ou leur appartenance religieuse.

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Réponse du ministère : Premier ministre publiée le 28/09/2000

Réponse. - L'honorable parlementaire attire l'attention de monsieur le Premier ministre sur les mesures de réparation pour les orphelins dont les parents sont décédés pendant la Seconde Guerre mondiale. Comme vous le savez, une commission, présidée par M. Jean Mattéoli, a été mise sur pied au début de l'année 1997 pour examiner l'ampleur des spoliations dont les juifs ont été victimes en France pendant cette période et de faire toutes propositions utiles pour que soit réparé ce qui ne l'avait pas encore été. Dans son rapport d'étape, la mission Mattéoli a attiré l'attention du Gouvernement sur la situation des enfants orphelins de déportés juifs partis de France, dont certains, parce qu'ils étaient enfants de parents étrangers, n'avaient pas perçu après guerre d'indemnisation. Elle exprimait donc le v u que " la situation des enfants de déportés juifs de France assassinés soit prise en compte, quels que soient leur nationalité et leur lieu de résidence et fasse l'objet de mesures appropriées, par exemple sous la forme d'une indemnité viagère pour ceux d'entre eux qui ne bénéficieraient pas déjà d'une indemnisation répondant au même objet ". Afin de faire le point sur les questions relatives à l'indemnisation des orphelins, une mission interministérielle a été constituée sous l'égide du secrétariat d'Etat aux anciens combattants et a remis un rapport à la fin du mois de novembre 1999. Sur la base de l'ensemble de ces éléments, il est apparu au Gouvernement que, dans le cadre du processus de réparation lié au travail de la commission Mattéoli et après la reconnaisance, par le Président de la République dans un discours prononcé en juillet 1995, de la responsabilité de la France dans la déportation des juifs partis de France, la situation spécifique de la déportation d'hommes et de femmes à des fins d'extermination appelait une réponse particulière qui a donné lieu à la publication, le 13 juillet 2000, d'un décret instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites. Conscient de la souffrance qui fut celle de tous les orphelins de déportés, le Gouvernement mènera une réflexion globale sur les conditions dans lesquelles l'Etat les a indemnisés.

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