Question de M. LEGENDRE Jacques (Nord - RPR) publiée le 01/11/2000

M. Jacques Legendre rappelle à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation que le Gouvernement a annoncé le 11 octobre dernier sa décision d'interdire l'utilisation de l'ensemble des intestins provenant de bovins, quel que soit leur âge, dans la fabrication de la charcuterie. L'une des spécialités culinaires de la région de Cambrai est ainsi concernée au premier chef. En effet, l'andouillette qui y est fabriquée est composée à 95 % de fraise de veau, produit dont l'utilisation représente 700 tonnes environ par an pour la confection de 500 tonnes d'andouillette, et qui serait visée par la mesure en question. La décision d'interdiction, qui n'a pour l'instant que simplement été annoncée sans prendre de caractère officiel par voie d'arrêté interministériel, est extrêmement lourde de conséquences économiques et sociales pour le tissu artisanal local. Le Cambrésis assure en effet plus de 25 % de la production nationale d'andouillette à base de fraise de veau. Or, outre la dégradation de l'image des artisans charcutiers concernés (quatre-vingt-dix dans le Cambrésis), le chiffre d'affaires de ces derniers a chuté en deux semaines seulement de 15 à 25 % selon les cas, et des mesures de chômage technique ont malheureusement d'ores et déjà dû être mises en oeuvre. Il l'approuve dans sa volonté de faire prévaloir le principe de précaution quand la santé du consommateur peut être compromise. Mais il lui demande quelles mesures il entend prendre rapidement pour sauvegarder un secteur économique qui a su promouvoir jusqu'ici un produit traditionnel reconnu.

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Réponse du ministère : Petites et moyennes entreprises publiée le 20/12/2000

Réponse apportée en séance publique le 19/12/2000

M. Jacques Legendre. Monsieur le secrétaire d'Etat, le Gouvernement a annoncé, le 11
octobre dernier, sa décision d'interdire l'utilisation de l'ensemble des intestins provenant de
bovins, quel que soit leur âge, dans la fabrication de la charcuterie.
L'une des spécialités culinaires, parmi les plus célèbres, de la région de Cambrai est ainsi
concernée au premier chef. En effet, l'andouillette qui y est fabriquée est composée à 95 %
de fraise de veau, produit dont l'utilisation représente 700 tonnes environ par an pour la
confection de 500 tonnes d'andouillettes.
La décision d'interdiction, qui n'a semble-t-il pour l'instant pas encore été confirmée par voie
d'arrêté interministériel, est lourde de conséquences économiques et sociales pour le tissu
artisanal local.
Le Cambrésis assure en effet plus de 25 % de la production nationale d'andouillettes à base
de veau. Or, outre la dégradation de l'image des artisans charcutiers concernés, qui sont au
nombre de quatre-vingt dix dans le Cambrésis, force est de constater que le chiffre d'affaires
de ces professionnels a chuté dans les deux semaines qui ont suivi cette annonce de 15 % à
25 % selon les cas et que des mesures de chômage technique ont malheureusement d'ores
et déjà dû être mises en oeuvre.
Dans ces conditions, monsieur le secrétaire d'Etat, que les choses soient bien claires. Je
comprends tout à fait votre volonté de faire prévaloir le principe de précaution, car il n'est pas
question de mettre en balance la santé du consommateur avec tel ou tel intérêt, mais il est
souhaitable que vous nous précisiez les intentions du Gouvernement sur l'application
annoncée ou envisagée d'une telle interdiction et les mesures qu'il entend prendre pour
sauvegarder un produit artisanal traditionnel célèbre de la cuisine française et, surtout, aider
la profession directement touchée par cette décision d'appliquer le principe de précaution, qui
est sans doute nécessaire, mais qui serait un coup terrible, dont toutes les conséquences
doivent être mesurées.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat. M. François Patriat, secrétaire
d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.
Monsieur Legendre, je comprends bien votre préoccupation d'ordre économique, et vous
n'avez d'ailleurs, à juste titre, pas mis en balance dans votre question à l'impératif de sécurité
sanitaire et l'impératif économique, dont le Gouvernement ne sous-estime pas les effets.
La décision de retirer de la chaîne alimentaire les intestins provenant de bovins a été prise sur
la base d'un avis de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments, l'AFSSA, a donné
lieu - je vous donne la réponse aujourd'hui - à un arrêté en date du 10 novembre 2000 et fait
suite à la décision de retirer de la chaîne alimentaire la rate, les ganglions, la moelle épinière
et le thymus.
Pourquoi interdire aujourd'hui l'utilisation des intestins de bovins ? Parce qu'ils comportent
une zone qu'il convient particulièrement de redouter, celle des plaques de Peyer,
potentiellement chargée d'agents infectants dans la cas où l'animal est contaminé. Il va de soi
que, devant un danger potentiel, non prouvé aujourd'hui, le principe de précaution doit être
appliqué.
Le Gouvernement a suivi l'avis de l'AFSSA, comme il le fait pour l'ensemble des décisions
prises à la suite d'une consultation et d'un avis scientifique indépendant, car personne
aujourd'hui ne peut prendre le risque de mettre en danger la sécurité et la santé des
consommateurs. Il le fait dans la transparence et en étant bien conscient des problèmes
qu'une telle décision pose pour des produits spécifiques tels que celui que vous avez évoqué,
auquel une région est très attachée et dont elle est très friande !
Les charcutiers doivent bien comprendre que le traitement de ce dossier est très important
pour des raisons non seulement de sécurité, mais aussi d'image. En effet, si des décisions
n'étaient pas prises à temps, les conséquences seraient encore beaucoup plus graves pour
eux demain. Conscient de cela, le Gouvernement a mis en place un dispositif. J'invite tous les
professionnels à en demander le détail à leur direction départementale de l'agriculture et de la
forêt. Il comprend des mesures d'ordre social, concernant notamment le chômage partiel, des
aides économiques et financières ; des mesures de solidarité pour accompagner les
entreprises, l'objectif prioritaire étant de favoriser la reconversion de ces dernières ; enfin, des
aides leur permettant de réfléchir à l'utilisation d'autres produits, afin que ces spécialités
alimentaires de qualité, très prisées, puissent être maintenues.
Le Gouvernement, monsieur le sénateur, reste très attaché aux entreprises artisanales de
métiers de bouche, qui font la valeur économique des territoires français, car la France des
terroirs est la France de ces produits. Sachez qu'il tentera, avec les professionnels
concernés, d'apporter des réponses aussi précises et aussi efficaces que possible.
M. Jacques Legendre. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Legendre.
M. Jacques Legendre. Je remercie M. le secrétaire d'Etat de sa réponse. Il a en particulier
abordé un point sur lequel je souhaitais l'entendre et qui concerne la possibilité de recourir à
d'autres produits ne présentant pas de dangers pour la santé, de manière à sauver cette
production traditionnelle.
L'andouillette de Cambrai n'est qu'un exemple de ces produits des terroirs qui donnent sa
saveur à la cuisine française et auxquels nous sommes tous attachés. On ne peut donc pas
se résigner à les voir disparaître, même si, par ailleurs, chacun considère que la santé est
une priorité absolue.
Les professionnels et le Gouvernement doivent par conséquent s'attacher à favoriser le
recours à d'autres produits afin de sauver ces spécialités traditionnelles, dont fait partie
l'andouillette de Cambrai.

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