Question de M. BERNARD Jean (Marne - RPR) publiée le 17/11/2000

Question posée en séance publique le 16/11/2000

M. Jean Bernard. Ne m'en veuillez pas, monsieur le ministre, de revenir sur le sujet, mais il s'agit
vraiment d'une question d'actualité, dont nous espérons toutefois qu'elle ne le restera pas trop
longtemps tout de même !
Le Gouvernement vient d'annoncer une série de mesures afin de renforcer la sécurité alimentaire
concernant le dossier crucial de l'encéphalopathie spongiforme bovine. Parmi ces mesures figurent
la suspension de l'utilisation des farines de viande et d'os dans l'ensemble de l'alimentation animale
ainsi que la suspension de l'importation sur le territoire national de farines carnées et d'aliments de
bétail contenant ces farines.
Si l'absence de certitude recommandait irrémédiablement cette suspension de l'utilisation des
farines animales, conformément d'ailleurs à la demande lucide et opportune du Président de la
République, se pose néanmoins la question de la substitution à ces protéines animales de
protéines végétales.
Un tel plan devra prendre en compte la destruction annuelle de 430 000 tonnes de farines
animales, la construction de centres d'incinération, vous l'avez dit, la maîtrise des rejets de dioxine
et la réduction des jachères pour relancer la production d'oléoprotéagineux sur deux millions
d'hectares environ.
Son coût est estimé à plus de 5 milliards de francs, mais la santé de nos concitoyens d'abord, la
survie et le renom de l'élevage français ensuite, sont, à mes yeux, à ce prix.
Or, monsieur le ministre, au regard des fameux accords de Blair House, nous resterions
dépendants pour 80 % de nos besoins en protéines végétales. C'était hier un problème de balance
commerciale, c'est devenu aujourd'hui, et ce le sera plus dans l'avenir, un problème de sécurité
alimentaire.
En conséquence, monsieur le ministre, allez-vous profiter de la présidence française pour
demander à vos collègues de l'Union européenne de reconsidérer le différentiel de subventions
entre céréales et protéagineux et ainsi inciter nos agriculteurs en pleine détresse à produire plus
de protéines végétales ? (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et
Indépendants, de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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Réponse du ministère : Agriculture publiée le 17/11/2000

Réponse apportée en séance publique le 16/11/2000

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le sénateur, ma réponse
comportera deux parties.
La première concerne l'interdiction des farines animales. Il était temps, avez-vous dit.
M. Jean Delaneau. Plus que temps !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. J'ai insisté tout à l'heure sur le fait qu'il
fallait au contraire prendre son temps compte tenu des problèmes que nous avons. Un responsable
de l'opposition - pas dans cet hémicycle, on y est sage par tradition,...
M. Philippe François. Et par nature !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. ... mais peut-être dans un autre... -
nous a demandé pourquoi nous n'avions pas pris plus tôt la décision d'interdire les farines compte
tenu de l'avis des scientifiques. Mais aucun scientifique français n'a émis d'avis dans ce sens !
Seul le bon sens nous a amenés à prendre une telle décision, et j'ai d'autant moins de scrupules à
en parler que j'ai été le premier des ministres de l'agriculture en Europe, voilà deux ans, à dire qu'il
fallait aller dans cette direction. Cela me paraissait déjà de bon sens. Il faut remettre les choses à
leur place !
La seconde partie de ma réponse concerne le « plan protéines », qui est évidemment nécessaire !
Là encore, j'ai d'autant moins de scrupules à en parler que la France a été le seul pays d'Europe,
au moment des accords de Berlin, par ma voix, par celle du Premier ministre, par celle du
Président de la République, à critiquer les mesures concernant les oléoprotéagineux et à exiger
une clause de rendez-vous en 2002 pour revoir la politique d'aide aux oléoprotéagineux dans le cas
où les emblavements diminueraient, et ce n'était pas être grand clerc que de deviner qu'ils allaient
effectivement diminuer.
Il faut donc revenir sur les dispositions des accords de Berlin le plus vite possible, sans attendre
2002. Nous pourrons aussi remettre en cause les accords de Blair House, qui, reconnaissons-le,
résultaient d'un compromis entre les exigences américaines et les exigences européennes,
puisque l'Europe avait demandé l'autorisation de « surprimer » les oléoprotéagineux contre cette
autolimitation des surfaces. Comme nous nous sommes engagés, à Berlin, à limiter ou à éliminer
les surprimes, nous allons nous libérer automatiquement de l'accord de Blair House sans attendre
sa remise en cause et sans attendre une éventuelle renégociation de la PAC. Je vais m'y employer
dès lundi et mardi prochains à Bruxelles.
En France, nous avons les moyens d'élaborer un « plan protéines » afin de relancer la production
de soja, notamment de soja de pays sans OGM, pour répondre à une autre aspiration des
consommateurs de notre pays. Vous pouvez en être sûr, le Gouvernement prévoira des mesures
dans ce sens dans le plan qu'il prépare. (Applaudissements sur les travées socialistes, sur celles
du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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