Question de M. ANDRÉ Pierre (Aisne - RPR) publiée le 29/11/2000

M. Pierre André attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur les inquiétudes, les interrogations et les doutes que suscite le silence du Gouvernement sur l'avenir du projet de réalisation du canal Seine-Nord, canal à grand gabarit qui permettrait de relier le bassin de la Seine aux canaux du nord de la France et, au-delà, au nord de l'Europe. Compte tenu des engagements pris, dès 1997, par M. le ministre, de faire évoluer rapidement et dans la transparence ce dossier, il lui demande de bien vouloir faire toute la lumière sur ses véritables intentions concernant la réalisation effective de ce projet qu'il qualifiait, il y a près de quatre ans, de prioritaire et dont il reconnaissait, alors, publiquement l'importance des enjeux sociaux, économiques et environnementaux pour les régions concernées. Le long silence du Gouvernement sur la suite qu'il entend donner à ce projet est d'autant plus troublant que cette future liaison fluviale a fait l'objet d'un large consensus de la part des responsables politiques, socio-économiques et associatifs, ainsi que des populations concernées. Or, à ce jour, en l'état actuel de la procédure et après les études qui ont été réalisées sur l'opportunité et sur le tracé du canal Seine-Nord, la poursuite du projet et sa concrétisation restent suspendues au choix de ce tracé qui appartient au Gouvernement, lequel doit décider entre les deux options retenues dans l'enquête publique : le tracé Est par le canal de Saint-Quentin et le tracé Ouest par le canal du Nord. De mois en mois, d'année en année, la décision est annoncée comme imminente. En conséquence, et parce qu'il n'est pas possible de laisser plus longtemps les décideurs et élus dans l'expectative et parce que ce tracé du futur canal conditionne et oblige un certain nombre de choix en matière économique et urbanistique pour les communes et les régions traversées, il lui demande s'il entend mettre un terme à ce suspense préjudiciable en annonçant rapidement et clairement le tracé qu'il a choisi, ainsi que l'échéancier du projet.

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Réponse du ministère : Équipement publiée le 17/01/2001

Réponse apportée en séance publique le 16/01/2001

M. Pierre André. Monsieur le ministre, dès votre prise de fonctions, en 1997, vous avez
marqué votre volonté et celle du Gouvernement de réaliser rapidement la liaison fluviale
Seine-Nord.
Pour vous, pas de doute, cette liaison Seine-Nord est une priorité nationale, et vous venez, il
y a quelques instants, de rappeler votre désir de rééquilibrer, les modes de transport en
France !
Nombreux ont été les élus et les responsables socio-professionnels de toutes tendances à
approuver votre position et votre méthode de travail : dizaines de réunions de concertation,
étude de vingt-trois tracés différents, nomination d'un préfet de région coordinateur du projet.
Nous avons applaudi à votre détermination : fin des études et présentation de l'échéancier,
deuxième semestre 1998 ; puis déclaration d'utilité publique, acquisition des terrains et début
des travaux en 2001.
Aujourd'hui, trois ans après, les mêmes élus et les mêmes responsables
socioprofessionnels, qui vous ont approuvé et largement soutenu, sont non seulement déçus
mais très en colère. (M. le ministre fait un signe de dénégation.) Malgré vos engagements
nombreux, notamment en juin dernier, auprès de Jean-Paul Delevoye, notre collègue
président de l'Association des maires de France et président de l'association des liaisons
fluviales Seine-Est et Seine-Nord, à ce jour, aucun tracé n'a été retenu, aucun échéancier ne
nous est connu.
Il est de votre devoir, monsieur le ministre, de nous dire qu'il s'agit d'une décision du
Gouvernement d'abandonner le projet Seine-Nord.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Mais
non !
M. Pierre André Sinon, pourquoi attendre pour préciser, et c'est l'objet de ma question, le
tracé retenu - canal du Nord ou canal de Saint-Quentin - ainsi que l'échéancier ? En effet, de
votre réponse, monsieur le ministre, dépendent des choix importants en matière économique
et urbanistique pour nos villes, pour nos départements et pour nos régions.
M. Gérard Cornu Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Monsieur le sénateur, vous avez d'abord souligné ma détermination et ma méthode de travail,
mais pour les critiquer ensuite.
Je soutiens le projet Seine-Nord, je l'ai déjà dit et je vous le redis. J'entends en poursuivre
l'élaboration avec la meilleure efficacité possible afin de le mener à bien.
L'objectif d'un aménagement progressif à grand gabarit de cette liaison a été inscrit par le
Gouvernement dans le projet de schéma de services de transport de marchandises,
actuellement soumis à une consultation régionale.
Vous dites que rien ne s'est passé depuis. Mais si, puisque, dans le projet de schéma de
services qui a été présenté par le Gouvernement figure cette liaison ! Vous prétendez que
nous n'avançons pas, vous vous demandez où nous en sommes, si nous avons abandonné
ce projet, mais c'est le contraire !
Vous auriez dû, avec le même esprit d'objectivité qui caractérisait le début de votre propos,
dire que c'est formidable, que le Gouvernement a confirmé la réalisation du projet. Or vous
faites comme si rien ne s'était passé. Pourtant, c'est écrit ; c'est officiel !
Sans attendre les conclusions de la consultation régionale, préalable à tous les schémas de
services, qui seront connus en 2001, j'ai voulu, pour donner toutes les chances à ce projet,
procéder à l'aménagement des extrémités de la liaison au nord et au sud. Cet aménagement
participe à la réalisation totale, c'est-à-dire Dunkerque-Escaut, d'une part, et Oise-aval, d'autre
part. En effet, on peut réaliser la partie centrale mais, si l'on ne procède pas à l'aménagement
des extrémités, cela ne sert à rien. En revanche, si on relève le tirant d'air - c'est-à-dire le fait
de réhausser les ponts pour permettre aux péniches de passer - entre Dunkerque et Escaut,
et si on aménage Oise-aval, le projet global s'en trouve conforté.
L'objectif est véritablement de développer le transport fluvial - et actuellement celui-ci
fonctionne bien - dans les bassins concernés et d'améliorer la desserte fluviale des ports de
Dunkerque, de Rouen, de Paris et du Havre en traversant, bien entendu, les territoires
concernés.
J'insiste, monsieur le sénateur, le schéma de services, d'une part, et les décisions prises
dans le cadre des contrats de plan, s'agissant notamment de l'aménagement des extrémités
de la liaison, d'autre part, sont l'expression même de la détermination du Gouvernement.
Sur le bassin Nord - Pas-de-Calais, le programme contractualisé avec la région reprend le
rehaussement des ponts sur le canal Dunkerque-Escaut et l'amélioration des liaisons avec la
Belgique. Au sud de la liaison, l'objectif du Gouvernement est d'améliorer sur cette période du
contrat de plan les conditions de navigation sur la Seine et l'Oise, principalement par la
modernisation des barrages et écluses.
Un programme a été proposé dans ce sens aux régions Ile-de-France et Picardie.
Ces aménagements permettront de conforter la forte croissance du mode fluvial avec l'objectif
de doubler le trafic d'ici à 2010. Nos ambitions sont grandes. C'est donc en fonction de
l'évolution du trafic à l'horizon des contrats de plan 2000-2006 que sera déterminée la
programmation du tronçon central, entre Compiègne et le canal Dunkerque-Escaut. Le choix
du fuseau de tracé de cette partie centrale sera précisé dans le cadre du débat avec les
régions concernées sur le projet de schéma de services de transport de marchandises.
Monsieur le sénateur, nous n'avons rien oublié, rien abandonné et la méthode de travail
consiste à retenir la meilleure solution après la meilleure concertation.
M. Pierre André. Le demande la parole.
M. le président. La parole est à M. André.
M. Pierre André. Monsieur le ministre, nous avons aujourd'hui franchi un grand pas. Cela fait
trente ans que les ministres de l'équipement nous répètent dans cet hémicycle et ailleurs que
le tracé de cette liaison fluviale sera annoncé dans les semaines et les mois qui viennent...
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Ah, si
cela avait été fait depuis trente ans...
M. Pierre André. Le problème serait réglé !
Nous avons certes approuvé votre méthode de travail, mais je me permets de vous dire que
votre démarche m'inquiète quelque peu : nous savons aujourd'hui par quelles extrémités nous
allons commencer, mais nous ne savons pas encore, après votre réponse, si elles seront un
jour reliées car nous ne savons pas quel tracé sera retenu.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Elles se
rejoindront !

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