Question de M. de BROISSIA Louis (Côte-d'Or - RPR) publiée le 08/03/2001

M. Louis de Broissia appelle l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la situation des droits de l'homme en Afghanistan. Nombreux sont les témoignages relatant les violations inacceptables des droits fondamentaux de la personne humaine commises par les talibans à l'égard, en particulier, des femmes et des enfants. Ce régime dénie aux femmes le droit à l'éducation, au travail, à la santé. Aucune liberté de mouvement ne leur est permise. Victimes de traitements inhumains, les femmes afghanes sont littéralement réduites au statut d'esclaves. Par ailleurs, le sort réservé aux organisations non gouvernementales, qui apportent une aide essentielle au peuple afghan, ne leur permet pas de remplir leur mission, d'ailleurs soutenue par la communauté internationale et plus particulièrement par l'Union européenne dont le Conseil des affaires générales vient de réitérer, le 24 janvier dernier, sa position sur l'Afghanistan. Précisant les objectifs politiques de l'Union européenne dans ce pays, le conseil des affaires générales insiste, notamment, sur " la nécessité de permettre aux ONG (organisations non gouvernementales) et aux organisations internationales d'apporter, sans discrimination, une aide humanitaire aux populations ". Cette position commune met également l'accent sur la promotion du " respect du droit humanitaire international et des droits de l'homme, y compris des droits des femmes et des enfants ". Malgré l'attitude ferme de l'Union européenne, le régime des talibans poursuit, cependant, une politique de terreur et de violence condamnée par tous sur la scène internationale. Cette situation ne peut perdurer et l'Union européenne et les Nations unies devraient maintenant exiger que ce régime ne soit pas reconnu et que les ONG puissent remplir librement leur rôle en direction du peuple afghan et en particulier des Afghanes. Ainsi, il souhaiterait connaître les intentions de la France afin que les demandes formulées dans la position commune adoptée par le Conseil des affaires générales de l'Union européenne devienne effectives et que le peuple afghan, ses femmes et ses enfants puissent vivre librement dans un pays respectueux de leurs droits.

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Réponse du ministère : Affaires étrangères publiée le 26/04/2001

Réponse. - La France a régulièrement fait part de ses inquiétudes aux parties au conflit en Afghanistan et rappelé son profond attachement au respect des droits de l'homme et, en particulier, des droits des femmes. Elle défend cet engagement au sein de l'Organisation des Nations unies et le partage également avec ses partenaires de l'Union européenne. Au niveau national, les fonctionnaires du ministère des affaires étrangères qui ont reçu des représentants du régime des Taleban, à la demande de ces derniers, leur ont tenu, à chaque occasion, un langage particulièrement vigoureux sur ce point, destiné à leur faire comprendre que la France, comme l'ensemble de la communauté internationale, ne se contentait pas de vagues engagements pour l'avenir, mais attendait des résultats concrets, qu'il s'agisse d'améliorations dans les domaines de la santé et de l'éducation ou, plus largement, de la condition quotidienne des Afghanes. L'autre objectif de ces entretiens techniques avec les Taleban est d'assurer la sécurité et la liberté de circulation des organisations non gouvernementales françaises actives en Afghanistan, dans l'ensemble du territoire, qu'il s'agisse des zones contrôlées par les Taleban ou par l'Alliance du nord. Pour sa part, le chargé d'affaires de France en Afghanistan, en résidence à Islamabad, ne manque pas, lors de ses missions à Kaboul, d'accorder dans chacun de ses entretiens avec des dirigeants taleban une place centrale à la question du sort réservé aux femmes. C'est ainsi qu'après les entretiens avec le responsable de la santé des Taleban, il a pu obtenir en 1999 la réouverture d'une section chirurgicale réservée aux femmes dans l'hôpital Maiwand de Kaboul. Le ministère des affaires étrangères finance ce programme, ainsi que la réhabilitation de deux autres hôpitaux, dans la capitale afghane et dans la province du Wardak. Les organisations non gouvernementales humanitaires sont pour la plupart revenues progressivement en Afghanistan, depuis 1999, pour poursuivre leur action sur le terrain. Des ONG françaises sont ainsi parvenues à obtenir, au cours des deux dernières années, quelques résultats concrets, à force de ténacité : des écoles pour filles, ainsi que des établissements de formation pour femmes dans le secteur hospitalier, ont ainsi pou être ouverts. Le gouvernement français a par ailleurs participé activement à l'élaboration des résolutions sur l'Afghanistan dans les différentes enceintes des Nations unies, qu'il s'agisse du Conseil de sécurité, de l'assemblée générale ou de la commission des droits de l'homme. Les résolutions du conseil de sécurité exigent ainsi que les factions afghanes mettent un terme à la discrimination dont les femmes font l'objet, ainsi qu'aux autres violations des droits de l'homme et aux violations du droit international humanitaire, et se conforment aux règles et aux normes internationales reconnues dans ce domaine. Une résolution vient également d'être adoptée à l'Assemblée générale. L'Union européenne est également très impliquée dans la défense de ces principes. Des positions communes ont été adoptées depuis 1998, la dernière étant celle du 24 janvier 2001. L'Union appelle les factions afghanes à mettre un terme aux politiques discriminatoires, à reconnaître, protéger et promouvoir l'égalité des droits et la dignité des hommes et des femmes, y compris s'agissant de l'accès aux établissement et aux services de santé, l'emploi, l'intégrité physique et le droit de ne pas faire l'objet d'actes d'intimidation et de harcèlement. Elle attire également leur attention sur les conséquences néfastes des politiques discriminatoires sur la fourniture effective de l'aide. Toutefois, en dépit des quelques évolutions constatées par les intervenants directs comme par les représentants des organisations spécialisées des Nations unies, force est de reconnaître qu'aucune amélioration significative n'a été enregistrée. De toute évidence, les droits de l'homme et, en particulier, des femmes en Afghanistan ne pourront réellement être respectés, dans la limite des traditions locales, que lorsque la paix sera revenue. Cela implique d'obtenir des protagonistes l'application d'un cessez-le-feu et de les amener à s'engager pleinement dans un processus politique. La France, dans le cadre des Nations unies comme dans celui de l'Union européenne, s'efforce d'encourager les protagonistes à aller dans cette direction. Par ailleurs, une reconnaissance du régime des taleban est exclue. Les Nations unies, l'Union européenne et la France continuent de reconnaître l'Etat islamique d'Afghanistan qui occupe le siège de ce pays aux Nations unies.

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