Question de M. COURTOIS Jean-Patrick (Saône-et-Loire - RPR) publiée le 08/11/2001

M. Jean-Patrick Courtois appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur certaines conséquences engendrées par la loi n° 98-349 du 11 mai 1998 relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France. Cette loi prévoit, pour les étrangers souhaitant un visa de court séjour en France, le remplacement du certificat d'hébergement délivré par les maires par l'établissement d'une attestation d'accueil. La mise en place de l'attestation d'accueil, gratuite et délivrée sans la moindre vérification de la capacité de l'hébergeant à accueillir un ou plusieurs étrangers a entraîné une très forte augmentation des attestations délivrées, notamment dans la ville de Mâcon où le nombre de demandes est passé de 400 à 600 en moins de deux ans. En effet, la réglementation ne confère aucune compétence au maire pour apprécier l'opportunité de l'accueil d'un étranger par le demandeur de l'attestation d'accueil puisque le maire doit seulement s'assurer de son identité et de la réalité de son domicile dans la commune. Ainsi, la demande d'attestation est faite à la mairie de sa commune par l'hébergeant qui doit se présenter personnellement muni d'un justificatif d'identité et de deux justificatifs de domicile. Dès lors que les pièces mentionnées sont produites, la certification par le maire est immédiate. Dans la mesure où le maire ne peut refuser la délivrance d'une attestation qu'en cas de non-présentation des pièces justificatives de l'identité et du domicile ou d'un doute de l'authenticité et qu'il ne dispose, de surcroît, d'aucun pouvoir propre d'investigation, celui-ci est contraint d'accorder dans la quasi-totalité des cas l'attestation d'accueil qui lui est demandée. Dans un souci de simplification administrative et du fait de l'absence de tout moyen de contrôle concernant l'opportunité de la délivrance de l'attestation d'accueil, il semblerait opportun que cette attestation puisse être délivrée directement et immédiatement par les services instructeurs de la mairie, du commissariat de police ou de la préfecture. Dans la négative, et dans la mesure où un contrôle de l'opportunité de la délivrance d'une attestation d'accueil paraîtrait nécessaire, il lui demande de bien vouloir lui préciser les critères d'appréciation qui doivent être retenus.

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Réponse du ministère : Patrimoine publiée le 09/01/2002

Réponse apportée en séance publique le 08/01/2002

M. Jean-Patrick Courtois. Monsieur le président, je voudrais appeler l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur certaines conséquences engendrées par la loi n° 98-349 du 11 mai 1998 relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France.
Cette loi prévoit, pour les étrangers souhaitant un visa de court séjour en France, le remplacement du certificat d'hébergement délivré par les maires par l'établissement d'une attestation d'accueil. La mise en place de l'attestation d'accueil, gratuite et délivrée sans la moindre vérification de la capacité de l'hébergeant à accueillir un ou plusieurs étrangers, a entraîné une très forte augmentation des attestations délivrées, notamment dans la ville de Mâcon, où le nombre de demandes est passé de 400 à 600 en moins de deux ans.
En effet, la réglementation ne confère aucune compétence au maire pour apprécier l'opportunité de l'accueil d'un étranger par le demandeur de l'attestation d'accueil puisque le maire doit seulement s'assurer de son identité et de la réalité de son domicile dans la commune. Ainsi, la demande d'attestation est faite à la mairie de sa commune par l'hébergeant, qui doit se présenter personnellement, muni d'un justificatif d'identité et de deux justificatifs de domicile. Dès lors que les pièces mentionnées sont produites, la certification par le maire est immédiate.
Dans la mesure où le maire ne peut refuser la délivrance d'une attestation qu'en cas de non-présentation des pièces justificatives de l'identité et du domicile ou d'un doute de l'authenticité et qu'il ne dispose, de surcroît, d'aucun pouvoir propre d'investigation, il est contraint d'accorder dans la quasi-totalité des cas l'attestation d'accueil qui lui est demandée.
Dans un souci de simplification administrative et du fait de l'absence de tout moyen de contrôle concernant l'opportunité de la délivrance de l'attestation d'accueil, il semblerait opportun que cette attestation puisse être délivrée directement et immédiatement par les services instructeurs de la mairie, du commissariat de police ou de la préfecture.
Dans la négative, et dans la mesure où un contrôle de l'opportunité de la délivrance d'une attestation d'accueil paraîtrait nécessaire, je souhaiterais que les critères d'appréciation devant être retenus me soient précisés.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Michel Duffour, secrétaire d'Etat au patrimoine et à la décentralisation culturelle. Monsieur le sénateur, M. le ministre de l'intérieur vous prie de bien vouloir excuser son absence et m'a chargé de vous faire cette réponse.
Le décret du 27 mai 1982, modifié après l'adoption de la loi du 11 mai 1998, ne laisse pas, en effet, à l'autorité chargée de certifier les autorisations d'accueil la possibilité de refuser la délivrance de ces documents, sauf en l'absence des pièces justificatives relatives à l'identité du demandeur et au lieu d'accueil de l'étranger.
Mais, pour autant, l'allégement de la procédure de délivrance des certificats d'hébergement jugée trop contraignante par le législateur lors du vote de la loi du 11 mai 1998 ne signifie pas que les autorités chargées de viser les attestations d'accueil doivent accepter de certifier des demandes qui constituent des détournements de procédure.
Les demandes multipes d'attestation d'accueil signées par un seul hébergeant « attestant pouvoir accueillir », pendant la même période, un nombre de personnes excessif au regard de sa capacité à les héberger peuvent constituer la preuve d'une aide à l'immigration irrégulière, et donc d'une fraude à la loi.
Plus généralement, en vertu d'une jurisprudence ancienne et constante du Conseil d'Etat, lorsqu'un administré se place dans une situation prévue par un texte à des fins étrangères à celles que le législateur ou le pouvoir réglementaire avait en vue, l'administration dispose de la faculté de faire échec aux agissements de cet administré. Tel semble être le cas de la personne qui demande la certification de multiples attestations d'accueil dans le but de faciliter l'entrée sur le territoire d'étrangers qu'elle n'a ni l'intention ni d'ailleurs les possibilités d'accueillir.
Dans cette situation, l'autorité chargée de viser l'attestation d'accueil n'a pas besoin d'une habilitation expresse résultant du texte dont l'application est revendiquée - c'est l'article 2-1 du décret du 27 mai 1982 - pour prendre une décision de refus de certification au motif que la demande de certification constitue une fraude à la loi.
Par ailleurs, en leur qualité d'officiers de police judiciaire, les maires, les commissaires de police ou les commandants de brigade de gendarmerie disposent de la possibilité de constater les infractions à la loi pénale. En tant qu'officiers publics, ils ont le devoir de faire usage de l'article 40 du code de procédure pénale et sont par conséquent tenus d'aviser sans délai le procureur de la République lorsqu'ils ont connaissance d'un délit.
Lors de la conférence annuelle des ambassadeurs de France, qui s'est tenue le 28 août dernier, l'attention de M. le ministre de l'intérieur a été appelée par les ambassadeurs sur les nombreuses tentatives de fraude portant sur les attestations d'accueil dans le cadre de la délivrance des visas.
A cette occasion, M. Vaillant a demandé aux ambassadeurs de faire établir des contacts directs entre leurs services et ceux des préfectures pour faciliter les recherches et lutter contre une telle fraude. Un télégramme du 17 octobre 2000 a invité les préfets à entretenir, en ce domaine, des relations directes avec les consulats de France.
M. Jean-Patrick Courtois. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Courtois.
M. Jean-Patrick Courtois. Je vous remercie de vos informations, monsieur le secrétaire d'Etat, mais elles ne règlent pas le problème des mairies !
A l'heure actuelle, lorsque les étrangers se présentent dans les services d'état civil des collectivités locales, ils fournissent des documents conformes au décret du 27 mai 1982 modifié après l'adoption de la loi du 11 mai 1998 et aux circulaires ministérielles ; dès lors - c'est automatique ! - le maire certifie l'autorisation d'accueil.
De deux choses l'une : ou bien l'on considère que cette procédure doit être conservée, et je ne vois pas pourquoi les services instructeurs de la préfecture, du commissariat de police et de la mairie ne pourraient pas délivrer directement les attestations aux particuliers - on leur ferait au moins gagner du temps ! -, ou bien l'on considère - et cela va dans le sens de la demande des ambassadeurs - qu'une vérification plus poussée est nécessaire.
Dans ce dernier cas, il faut donner aux collectivités locales les moyens juridiques de contrôler les demandes présentées par les étrangers, notamment la capacité de l'hébergeant, le nombre de demandes déjà formulées au cours des douze derniers mois et la solvabilité de ceux qui accueillent, afin que l'étranger venant en résidence en France ne se retrouve pas rapidement à la charge tant du centre communal d'action sociale de la collectivité que de l'établissement hospitalier qui, neuf fois sur dix, va être obligé de l'accueillir. Il faut donc donner de manière très précise des instructions aux collectivités locales pour qu'elles aient les moyens de vérifier les demandes d'attestation d'accueil.

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