Question de Mme PRINTZ Gisèle (Moselle - SOC) publiée le 14/11/2001

Mme Gisèle Printz appelle l'attention de Mme le ministre de la culture et de la communication sur les décisions des architectes des Bâtiments de France (ABF) au sein des périmètres protégés. Elle lui rappelle en effet les nombreuses contestations dont ces décisions font l'objet, notamment à cause du changement de règles d'un ABF à l'autre, ainsi que le peu de voies de recours existant contre celles-ci. Elle reconnaît que des avancées ont été obtenues par le passé mais souligne que celles-ci demeurent insuffisantes. Elle précise en outre qu'il n'est pas question de jeter la pierre aux ABF et souligne le rôle inestimable qu'ils ont joué, qu'ils jouent toujours et qu'ils doivent continuer à jouer dans la préservation de notre patrimoine. Elle indique toutefois que leurs décisions doivent pouvoir faire l'objet d'un recours, au même titre que toute autre décision administrative, et que les règles qu'ils appliquent doivent être transparentes. Elle lui demande donc de bien vouloir lui faire connaître les pistes que le Gouvernement entend privilégier en vue d'améliorer et d'étendre les possibilités de recours contre les décisions des ABF, s'il est question d'associer les élus aux futures commissions, et si elle entend instaurer des règles publiques et durables au sein des périmètres protégés.

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Réponse du ministère : Patrimoine publiée le 09/01/2002

Réponse apportée en séance publique le 08/01/2002

Mme Gisèle Printz. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous connaissons toutes et tous la règle : tout projet de construction ou de travaux situé dans un périmètre de 500 mètres autour d'un édifice protégé au titre des différentes lois sur les monuments historiques, les secteurs sauvegardés ou les zones de protection du patrimoine architectural et urbain, est soumis à l'avis des architectes des Bâtiments de France, les ABF.
Depuis les années soixante, les ABF veillent à la sauvegarde de notre patrimoine, mais, aujourd'hui, leur rôle est régulièrement contesté. En effet, qui d'entre nous n'a pas été confronté aux sollicitations d'élus, de responsables d'association ou de particuliers désireux d'entreprendre une démolition, une restauration ou une construction et se heurtant aux services des architectes des Bâtiments de France ?
Les contestations sont nombreuses, et parmi celles-ci figurent notamment la fluctuation des règles et l'obligation de faire appel à des entreprises agréées.
En effet, il n'est pas rare, dans les périmètres protégés, que les règles varient en fonction des personnes et des circonstances.
Ces changements conduisent aujourd'hui de nombreuses personnes à s'interroger sur la pertinence des remarques des architectes des Bâtiments de France, à qualifier d'abus de pouvoir les décisions de cette autorité administrative et, surtout, à demander qu'un règlement connu, transparent et qui ne change pas au gré des personnes soit appliqué.
En outre, les voies de recours sont rares, ce qui n'atténue que très peu les pouvoirs de cette autorité, même si des avancées ont été obtenues par le passé.
Ce fut le cas en 1983, dans le cadre des lois de décentralisation, mais uniquement pour les zones de protection du patrimoine architectural et urbain créées par les communes.
Plus près de nous, la loi du 28 février 1997 relative à l'instruction des autorisations de travaux dans le champ de visibilité des édifices classés ou inscrits et dans les secteurs sauvegardés a institué une commission du patrimoine et des sites.
Malheureusement, celle-ci a montré ses limites puisque, en quatre ans, les recours dont a été saisie cette commission restent d'ordre anecdotique, et ses infirmations des décisions de l'architecte des Bâtiments de France représentent moins d'un quart des contentieux qui lui ont été soumis.
Il n'est pas question aujourd'hui de jeter la pierre aux architectes des Bâtiments de France, car nul ne contestera le rôle inestimable qu'ils ont joué, qu'ils jouent toujours et qu'ils doivent continuer à jouer dans la préservation de notre patrimoine. Toutefois, leurs décisions doivent pouvoir faire l'objet d'un recours, au même titre que toute autre décision administrative, et les règles qu'ils appliquent doivent être transparentes.
A défaut d'un accord sur le texte que nous avons examiné en juin dernier, le débat que nous avons eu à ce sujet n'a pas manqué d'intérêt. Il a révélé plusieurs préoccupations communes à nos différents groupes.
Mais, comme vous l'aviez fort justement souligné à ce moment, monsieur le secrétaire d'Etat, il ne faut pas légiférer à la hâte. La qualité architecturale en espaces protégés ne doit pas passer après le souci de surmonter un avis négatif de l'architecte des Bâtiments de France.
Je souhaite donc connaître les pistes que le Gouvernement privilégie en vue d'améliorer et d'étendre les possibilités de recours contre les décisions des ABF, et, plus particulièrement, s'il est envisagé de moderniser les commissions pour que les élus, qui sont les principaux intéressés, y trouvent une juste place. Par ailleurs, est-il question d'instaurer, une bonne fois pour toutes, des règles publiques et durables au sein des périmètres protégés ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Michel Duffour, secrétaire d'Etat au patrimoine et à la décentralisation culturelle. Vous vous interrogez, madame la sénatrice, sur les décisions des architectes des Bâtiments de France dans les périmètres protégés et sur les possibilités de recours contre ces décisions, en souhaitant mieux y associer les élus.
Le Gouvernement partage votre souci. Depuis l'adoption par votre Haute Assemblée, le 14 juin 2001, de la proposition de loi de M. Fauchon rapportée par M. Richert, nous avons poursuivi notre réflexion.
En effet, si les zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager et les secteurs sauvegardés font l'objet de règles connues et donc prévisibles pour les élus et les pétitionnaires, il n'en est pas de même pour les abords des monuments historiques. Nous souhaitons donc, dans l'intérêt de tous, améliorer l'information du public sur ces règles de protection.
En ce qui concerne les recours, outre le droit commun qui permet à une personne s'étant vu refuser un permis de construire de saisir la juridiction administrative, il existe, en vertu de la loi du 28 février 1997, pour tous les espaces protégés, une procédure de recours contre l'avis de l'ABF ouverte aux maires. Mais celle-ci n'ayant pas donné de résultats suffisamment probants, le Gouvernement a décidé de la faire évoluer en l'ouvrant aux pétitionnaires, comme l'avait souhaité le Sénat.
S'agissant de la commission statuant sur les recours, tout en gardant le niveau régional, qui permet de prendre le recul nécessaire vis-à-vis des intérêts locaux et qui présente une plus grande pertinence sur le plan scientifique, nous proposerons d'en revoir la composition et le fonctionnement en y associant mieux les élus locaux.
Le Gouvernement est donc prêt à avancer dans le sens de la modernisation du dispositif entourant les décisions des ABF. Il déposera des amendements au projet de loi relatif à la démocratie de proximité, lors de son examen par votre Haute Assemblée, examen qui doit débuter aujourd'hui même.
Mme Gisèle Printz. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Printz.
Mme Gisèle Printz. J'apprécie les réponses que M. le secrétaire d'Etat vient de me donner, et surtout le fait que les élus locaux seront impliqués dans ces commissions de recours. J'espère que ces nouvelles dispositions seront favorablement accueillies par les ABF ?

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