Question de M. HOEFFEL Daniel (Bas-Rhin - UC) publiée le 25/07/2002

M. Daniel Hoeffel signale à M. le garde des sceaux, ministre de la justice, la difficulté que rencontrent de nombreux maires à faire respecter les dispositions relatives au permis de construire lorsque des infractions sont relevées à leur propos. En effet, il est fréquent que les plaintes déposées pour le respect des modalités du permis de construire soient classées sans suite, ne laissant aux maires aucune possibilité de réaction. Il lui demande quelles sont les possibilités de recours en vue de faire respecter l'autorité des maires dans le domaine de l'urbanisme et du logement, lorsque les voies de recours judiciaire sont épuisées suite aux classements sans suite.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 06/05/2004

Le garde des sceaux, ministre de la justice, entend apporter à l'honorable parlementaire les éléments de réponse suivants. Il convient en premier lieu de préciser que, depuis la loi n° 76-1285 du 31 décembre 1976 portant réforme de l'urbanisme, l'autorité administrative (maire, préfet, direction départementale de l'équipement) est tenue, lorsqu'elle a connaissance d'une infraction en matière d'urbanisme, d'en faire dresser procès-verbal et d'en transmettre sans délai copie au parquet (art. L. 480-1, alinéa 3, du code de l'urbanisme). La compétence de l'administration est donc liée et seul le parquet, qui dispose de l'opportunité des poursuites, est compétent pour apprécier les suites pénales à donner à un procès-verbal. En pratique, cependant, il laisse généralement le soin aux autorités administratives de rechercher la régularisation préalable de l'infraction par l'intermédiaire de mises en demeure. Une répression efficace des infractions en matière d'urbanisme exige donc des échanges réguliers entre les autorités administratives et judiciaires afin de coordonner leurs actions. Si les parquets peuvent être amenés à procéder au classement sans suite de certaines procédures en matière d'urbanisme, il convient cependant de préciser que le nombre de condamnations prononcées par les juridictions pénales pour des infractions de construction sans permis de construire ou au mépris des prescriptions légales ou réglementaires n'est pas négligeable, puisqu'il s'est élevé à : 1 555 condamnations pour l'année 2000 ; 1 395 condamnations pour l'année 2001 ; 976 condamnations pour l'année 2002 (dernières statistiques disponibles). Par ailleurs et même en cas de classement sans suite d'une procédure, les maires disposent de moyens d'action autonomes dans ce domaine. La loi du 18 juillet 1985 a en effet ouvert aux communes la faculté de se constituer partie civile au titre des délits d'urbanisme, ce dont la jurisprudence les privait jusqu'alors. Ainsi, l'article L. 480-1, alinéa 5, du code de l'urbanisme dispose que " la commune peut exercer les droits reconnus à la partie civile, en ce qui concerne les faits commis sur son territoire et constituant une infraction " aux dispositions relatives aux certificats d'urbanisme, aux permis de construire et de démolir, aux modes particuliers d'utilisation du sol (clôtures, installations et travaux divers, camping et stationnement de caravanes, remontés mécaniques et aménagements de domaine skiable), ainsi qu'aux contrôles et vérifications opérées par les autorités administratives. Jusqu'en 2002, le juge se référait cependant à l'article 2 du code de procédure pénale relatif aux conditions générales de mise en mouvement de l'action publique par la partie lésée et se livrait à une vérification rigoureuse de l'existence du préjudice " personnel " subi par la commune et du lien de causalité direct avec l'infraction. Les conditions d'appréciation de la recevabilité de la constitution de partie civile d'une commune dans ce domaine font désormais l'objet d'une appréciation plus extensive depuis un arrêt rendu le 9 avril 2002 par la chambre criminelle de la Cour de cassation. Cette décision rappelle en effet que l'article L. 480-1 constitue une disposition spéciale au droit de l'urbanisme et n'exige pas que le préjudice allégué soit personnel et direct. Concrètement, les maires peuvent se constituer partie civile au nom de leur commune et engager des poursuites pour des préjudices aussi divers que des atteintes à l'environnement, aux conditions de circulation, dégradations d'équipements ou d'espaces publics par exemple.

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