Question de M. MARINI Philippe (Oise - RPR) publiée le 08/08/2002

M. Philippe Marini appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la nécessaire clarification du champ d'application de l'article L. 313-3 du code de la consommation relatif à l'usure. Il lui demande de lui confirmer que cette législation, qui prohibe tout prêt dont le taux effectif global excède de plus du tiers le taux effectif moyen pratiqué au cours du trimestre précédent par les établissements de crédit pour des opérations de même nature comportant des risques analogues, ne s'applique pas aux émissions de titres de créance visés à l'article L. 211-1, I-2, du code monétaire et financier (obligations, titres de créance négociables, titres de créance complexes...). En effet, une émission de titres de créance ne constitue pas un prêt conventionnel au sens de la loi : un titre de créance est un titre négociable, ce qui le distingue d'un contrat de prêt conventionnel. En outre, la législation sur l'usure vise à protéger l'emprunteur de la fixation, par le prêteur, d'un taux d'intérêt excessif. Or, en matière de titres de créance, c'est précisément le débiteur lui-même qui fixe les modalités de l'émission. Une éventuelle application de la législation sur l'usure aux émissions de titres de créance n'apparaît, par conséquent, aucunement fondée. Pourtant, malgré un consensus certain sur la question, les termes trop généraux de l'article L. 313-3 du code de la consommation et l'absence de jurisprudence en la matière engendrent un doute qu'il convient de lever afin d'éviter de porter atteinte à la compétitivité de la place de Paris et à la capacité de financement de certains émetteurs par des émissions obligataires. D'autant que se développe en Europe et en France la pratique de l'émission de titres de créance indexés ou à haut rendement dites high yield qui permettent à certaines entreprises de trouver sur le marché des financements adaptés à leur situation. Il lui demande donc de lui confirmer que l'article L. 313-3 du code de la consommation n'est pas applicable aux émissions de titres de créance.

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Réponse du Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie publiée le 02/01/2003

Le taux de l'usure ne s'étend pas aux émissions de titres de créance, et ce, pour plusieurs raisons : une émission de titres de créance ne constitue pas un prêt conventionnel au sens de l'article L. 313-3 du code de la consommation relatif au taux de l'usure qui assimile exclusivement aux prêts conventionnels les crédits accordés à l'occasion de vente à tempérament ; l'appréciation du taux ne peut se faire que par rapport à des opérations de même nature comportant des risques analogues et les émissions de titres de créance ne figurent pas dans la nomenclature des prêts (arrêté du 25 juin 1990 et art. D. 313-6 du code de la consommation) pour lesquels le seuil de l'usure est déterminé, ce qui interdit la connaissance a priori d'un taux pour ces émissions ; le dispositif de l'article L. 313-3 a pour objet de protéger l'emprunteur. Or, en matière d'émission de titres de créance, l'emprunteur, émetteur des titres, détermine lui-même le taux et les modalités de l'émission. C'est en faveur du prêteur, c'est-à-dire de l'investisseur qu'a été organisé un dispositif de protection. Les logiques sont donc profondément différentes ; enfin, ces dispositions étant pénalement sanctionnées, elles font l'objet d'une interprétation stricte. En conclusion, si la non-application de la législation sur l'usure aux émissions de titres de créance ne fait pas de doute, il convient de distinguer cette question de celle de l'appel public à l'épargne sur les obligations à haut rendement. Il reviendrait aux autorités de place saisies sur ce point de répondre à la question de la protection de l'épargne et de l'information du public sur ce segment de marché.

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