Question de Mme POURTAUD Danièle (Paris - SOC) publiée le 04/10/2002

Mme Danièle Pourtaud attire l'attention de M. le ministre de la culture et de la communication sur l'avenir du site du 26-30 rue de la Tombe-Issoire dans le XIVe arrondissement, dit " Ferme Montsouris ". Ce site de plus de 2000 m² à deux pas de la place Denfert-Rochereau héberge l'un des derniers vestiges du passé agricole de Paris, une ferme de Paris datant du xixe siècle, avec en sous-sol un cellier voûté devenu chapelle. Le terrain abrite aussi les derniers restes d'un aqueduc gallo-romain et, vingt mètres plus bas, les carrières de Port-Mahon datant du xve siècle, classées en 1994 Monument historique. Depuis bientôt un an, 29 associations réunies en collectif luttent pour que le site ne soit pas transformé en appartements de standing et en parkings. L'archevêché, propriétaire du terrain à travers une société civile immobilière, est en effet en négociation avec des promoteurs immobiliers. Si l'opération est faite, ce sont 70 piliers de béton qui seront coulés dans un sol classé. Elle souhaiterait savoir ce qu'il est en mesure de faire pour préserver ce patrimoine inestimable de l'histoire de Paris.

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Réponse du Ministère de la culture et de la communication publiée le 06/11/2002

Réponse apportée en séance publique le 05/11/2002

Mme Danièle Pourtaud. Monsieur le ministre, ma question porte sur le site historique du 26-30, rue de la Tombe-Issoire, dans le XIVe arrondissement, à Paris.
Comme vous le savez, monsieur le ministre, ce site regroupe plusieurs vestiges importants qui témoignent de l'histoire de Paris sur au moins deux niveaux : d'une part, le bâtiment du xixe siècle appelé « Ferme Montsouris » est le seul témoin du passé agricole de Paris ; d'autre part, le sous-sol abrite les traces de toutes les époques du passé parisien. On trouve par ailleurs un aqueduc gallo-romain, massacré à quelques centaines de mètres de là, sur la ZAC Alésia-Montsouris et, vingt mètres en contrebas, les fameuses carrières de Port-Mahon, dont ont été extraites au xve siècle les pierres qui servirent à la construction de Paris.
Le travail remarquable de la Société historique et archéologique du XIVe arrondissement et, plus largement, de toutes les associations qui s'intéressent au passé de notre capitale et oeuvrent pour sa conservation a également permis, récemment, de mettre en évidence la probable présence sur le site du cardo romain et d'une cave du xviie siècle. Depuis bientôt un an, trente-deux associations réunies en collectif luttent pour que le site ne soit pas transformé en appartements de standing et en parkings.
Je souhaite plus particulièrement attirer votre attention, monsieur le ministre, sur les carrières de Port-Mahon qui, comme vous le savez, sont inscrites depuis 1994 à l'inventaire complémentaire. Les projets immobiliers impliquent que quelque soixante-dix poteaux de béton soient coulés dans ce sol classé, le défigurant définitivement. A notre grande surprise, les services de votre ministère ont levé les réserves qu'ils avaient émises sur le projet et rendu ainsi possibles des dégradations irrémédiables.
Saisi par les associations et par l'adjointe au maire de Paris chargée du patrimoine, vous avez répondu que vos services veilleraient à ce que les travaux ne portent pas atteinte au site, sans remettre en cause les poteaux de béton qui seraient habillés de calcaire ! Curieuse conception, à mon avis, de la préservation du patrimoine...
Que pouvez-vous faire aujourd'hui, monsieur le ministre, pour sauver ces traces uniques de notre passé ?
M. René-Pierre Signé. Bravo !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jacques Aillagon, ministre de la culture et de la communication. Madame la sénatrice, comme vous le savez, c'est en 1992 qu'un projet immobilier, sis au 26-30, rue de la Tombe-Issoire, avait suscité la demande de protection des bâtiments situés sur cet emplacement au titre des monuments historiques ainsi que la protection de la carrière de Port-Mahon située au sous-sol. La carrière et les parcelles correspondantes en surface, à l'exclusion des bâtiments, ont fait l'objet d'un classement par décret du 4 juin 1994, sur l'initiative de M. Jacques Toubon, alors ministre de la culture.
Le permis de construire pour un nouveau projet immobilier, déposé voilà déjà quelque temps, prévoit que le bâtiment sur rue, situé au 26, rue de la Tombe-Issoire, ainsi que la ferme seront conservés et réhabilités, les autres bâtiments étant démolis pour laisser place à des logements.
L'architecte des Bâtiments de France, autorité dont vous connaissez l'indépendance, a donné un avis favorable sur ces travaux, sous réserve du respect de certaines prescriptions.
De son côté, la direction régionale des affaires culturelles d'Ile-de-France, qui devait se prononcer sur les travaux concernant les parcelles classées, s'est montrée particulièrement vigilante pour que l'édification des nouveaux immeubles soit compatible avec la bonne conservation de la carrière.
L'autorisation de travaux a été donnée par le préfet de région le 20 décembre 2001, alors que Mme Catherine Tasca était ministre de la culture et de la communication, et comporte toutes les prescriptions nécessaires. Le permis de construire est en cours d'instruction par les services de la Ville de Paris.
A titre personnel, je souhaite particulièrement, comme vous, que la carrière classée ne subisse aucun dommage pendant les travaux et que les édifices dont la conservation est prévue soient sauvegardés.
Je sais bien, madame la sénatrice, qu'une carrière est un élément particulièrement fragile du patrimoine. Les carrières, comme les catacombes, subissent régulièrement des détériorations du fait de l'évolution naturelle du terrain et des affaissements. Il nous appartient donc, dans la mesure où il s'agit d'un élément remarquable du patrimoine industriel et funéraire de Paris, de tout faire pour préserver la dignité de ces lieux et la qualité de leur conservation.
Au cours des prochaines semaines, lorsque la Ville de Paris aura arrêté sa position sur le permis de construire, je veillerai personnellement à ce que ce dossier soit traité avec subtilité, finesse et attention, je vous en donne l'assurance.
M. le président. La parole est à Mme Danièle Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, mais je me permets néanmoins d'insister sur l'avenir incertain de ce site.
La presse écrite nationale s'est saisie du dossier. Le Figaro, 20 minutes, Le Journal du dimanche, France-Soir, Le Nouvel Observateur et Le Parisien ont mis l'accent sur le caractère historique du site et sur les problèmes liés à la méthode de confortation des carrières, à savoir les fameux poteaux de béton.
Le collectif des associations a demandé une expertise dont la conclusion sera bientôt connue. En effet, les puits de béton, d'une largeur de 60 à 120 centimètres, qui vont perforer la carrière peuvent avoir des répercussions techniques inconnues. Vous l'avez vous-même souligné, ces sous-sols sont fragiles et un effondrement risquerait, par « effet de domino », de remettre en question la totalité du site.

Monsieur le ministre, je voudrais faire observer que les services du ministère de la culture n'ont, quant à eux, sollicité aucune expertise. Par conséquent, je vous demanderai, pour conclure cette question, de diligenter une expertise sur les risques encourus non seulement par la carrière de Port-Mahon, mais également par l'ensemble du quartier. En effet, si les sous-sols s'effondrent, la carrière sera détruite, mais ce ne sera pas sans conséquences pour l'ensemble du quartier.

Mme Danièle Pourtaud. Monsieur le ministre, ma question porte sur le site historique du 26-30, rue de la Tombe-Issoire, dans le XIVe arrondissement, à Paris.
Comme vous le savez, monsieur le ministre, ce site regroupe plusieurs vestiges importants qui témoignent de l'histoire de Paris sur au moins deux niveaux : d'une part, le bâtiment du xixe siècle appelé « Ferme Montsouris » est le seul témoin du passé agricole de Paris ; d'autre part, le sous-sol abrite les traces de toutes les époques du passé parisien. On trouve par ailleurs un aqueduc gallo-romain, massacré à quelques centaines de mètres de là, sur la ZAC Alésia-Montsouris et, vingt mètres en contrebas, les fameuses carrières de Port-Mahon, dont ont été extraites au xve siècle les pierres qui servirent à la construction de Paris.
Le travail remarquable de la Société historique et archéologique du XIVe arrondissement et, plus largement, de toutes les associations qui s'intéressent au passé de notre capitale et oeuvrent pour sa conservation a également permis, récemment, de mettre en évidence la probable présence sur le site du cardo romain et d'une cave du xviie siècle. Depuis bientôt un an, trente-deux associations réunies en collectif luttent pour que le site ne soit pas transformé en appartements de standing et en parkings.
Je souhaite plus particulièrement attirer votre attention, monsieur le ministre, sur les carrières de Port-Mahon qui, comme vous le savez, sont inscrites depuis 1994 à l'inventaire complémentaire. Les projets immobiliers impliquent que quelque soixante-dix poteaux de béton soient coulés dans ce sol classé, le défigurant définitivement. A notre grande surprise, les services de votre ministère ont levé les réserves qu'ils avaient émises sur le projet et rendu ainsi possibles des dégradations irrémédiables.
Saisi par les associations et par l'adjointe au maire de Paris chargée du patrimoine, vous avez répondu que vos services veilleraient à ce que les travaux ne portent pas atteinte au site, sans remettre en cause les poteaux de béton qui seraient habillés de calcaire ! Curieuse conception, à mon avis, de la préservation du patrimoine...
Que pouvez-vous faire aujourd'hui, monsieur le ministre, pour sauver ces traces uniques de notre passé ?
M. René-Pierre Signé. Bravo !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jacques Aillagon, ministre de la culture et de la communication. Madame la sénatrice, comme vous le savez, c'est en 1992 qu'un projet immobilier, sis au 26-30, rue de la Tombe-Issoire, avait suscité la demande de protection des bâtiments situés sur cet emplacement au titre des monuments historiques ainsi que la protection de la carrière de Port-Mahon située au sous-sol. La carrière et les parcelles correspondantes en surface, à l'exclusion des bâtiments, ont fait l'objet d'un classement par décret du 4 juin 1994, sur l'initiative de M. Jacques Toubon, alors ministre de la culture.
Le permis de construire pour un nouveau projet immobilier, déposé voilà déjà quelque temps, prévoit que le bâtiment sur rue, situé au 26, rue de la Tombe-Issoire, ainsi que la ferme seront conservés et réhabilités, les autres bâtiments étant démolis pour laisser place à des logements.
L'architecte des Bâtiments de France, autorité dont vous connaissez l'indépendance, a donné un avis favorable sur ces travaux, sous réserve du respect de certaines prescriptions.
De son côté, la direction régionale des affaires culturelles d'Ile-de-France, qui devait se prononcer sur les travaux concernant les parcelles classées, s'est montrée particulièrement vigilante pour que l'édification des nouveaux immeubles soit compatible avec la bonne conservation de la carrière.
L'autorisation de travaux a été donnée par le préfet de région le 20 décembre 2001, alors que Mme Catherine Tasca était ministre de la culture et de la communication, et comporte toutes les prescriptions nécessaires. Le permis de construire est en cours d'instruction par les services de la Ville de Paris.
A titre personnel, je souhaite particulièrement, comme vous, que la carrière classée ne subisse aucun dommage pendant les travaux et que les édifices dont la conservation est prévue soient sauvegardés.
Je sais bien, madame la sénatrice, qu'une carrière est un élément particulièrement fragile du patrimoine. Les carrières, comme les catacombes, subissent régulièrement des détériorations du fait de l'évolution naturelle du terrain et des affaissements. Il nous appartient donc, dans la mesure où il s'agit d'un élément remarquable du patrimoine industriel et funéraire de Paris, de tout faire pour préserver la dignité de ces lieux et la qualité de leur conservation.
Au cours des prochaines semaines, lorsque la Ville de Paris aura arrêté sa position sur le permis de construire, je veillerai personnellement à ce que ce dossier soit traité avec subtilité, finesse et attention, je vous en donne l'assurance.
M. le président. La parole est à Mme Danièle Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, mais je me permets néanmoins d'insister sur l'avenir incertain de ce site.
La presse écrite nationale s'est saisie du dossier. Le Figaro, 20 minutes, Le Journal du dimanche, France-Soir, Le Nouvel Observateur et Le Parisien ont mis l'accent sur le caractère historique du site et sur les problèmes liés à la méthode de confortation des carrières, à savoir les fameux poteaux de béton.
Le collectif des associations a demandé une expertise dont la conclusion sera bientôt connue. En effet, les puits de béton, d'une largeur de 60 à 120 centimètres, qui vont perforer la carrière peuvent avoir des répercussions techniques inconnues. Vous l'avez vous-même souligné, ces sous-sols sont fragiles et un effondrement risquerait, par « effet de domino », de remettre en question la totalité du site.

Monsieur le ministre, je voudrais faire observer que les services du ministère de la culture n'ont, quant à eux, sollicité aucune expertise. Par conséquent, je vous demanderai, pour conclure cette question, de diligenter une expertise sur les risques encourus non seulement par la carrière de Port-Mahon, mais également par l'ensemble du quartier. En effet, si les sous-sols s'effondrent, la carrière sera détruite, mais ce ne sera pas sans conséquences pour l'ensemble du quartier.

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