Question de M. VASSELLE Alain (Oise - RPR) publiée le 03/10/2002

M. Alain Vasselle attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur les légitimes préoccupations exprimées par bon nombre d'élus locaux concernant la maîtrise des flux migratoires en France. En effet, l'immigration clandestine en France est chaque jour mise en lumière par les dramatiques problèmes humains engendrés par ce type de situation dont l'exemple symbolique est le camp de Sangatte. A l'heure actuelle, aucun Etat membre de l'Union européenne n'arrive malheureusement à solutionner efficacement, d'une manière définitive, le problème des étrangers en situation irrégulière, déboutés du droit d'asile et sans identité reconnue ou attestée par leur pays d'origine. Face à ce problème, seule la Grande-Bretagne n'a jamais voulu modifier en profondeur sa législation en matière de séjour des étrangers. Elle est devenue progressivement le maillon faible du dispositif européen avec une politique permissive et mal contrôlée. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle les réseaux d'immigration irrégulière ont privilégié cette destination. La France est aujourd'hui dans une situation dortoir et en subit les conséquences. Elle est notamment due à l'irresponsabilité de nos pays voisins qui laissent pénétrer les immigrés clandestins et ne respectent pas leurs obligations " Schengen ". Or, ces flux migratoires irréguliers peuvent engendrer certains risques importants pour notre pays et constituer des menaces de cohésion sociale et d'ordre public. La première menace concerne la réalisation d'actes terroristes sur le territoire français, mettant en péril les valeurs démocratiques et l'équilibre précaire de la paix dans le monde. La seconde menace, d'ordre social, concerne le risque pour la démocratie française de basculer vers un système nationaliste remettant en cause les principes de la construction européenne. Notre pays n'est pas responsable de la perméabilité des frontières extérieures terrestres de l'espace Schengen. La France doit conserver l'exercice de sa souveraineté en matière de décision du droit au séjour (asile et autres domaines), mais, lorsque sa décision est prise en matière d'éloignement et que toutes les démarches ont été réalisées dans le cadre de sa solidarité pour traiter le problème (12 jours apparaissent suffisants dans ce contexte), elle doit pouvoir transférer sa responsabilité vers une agence européenne dont les principes d'action ont été affirmés par la France au Conseil de Séville (codéveloppement et sanctions éventuelles). En conséquence, il le remercie à l'avance de bien vouloir lui indiquer la position ministérielle face à cette délicate question de l'immigration irrégulière en France et lui préciser les mesures décidées par le Gouvernement pour lutter efficacement et de façon définitive contre ce phénomène de plus en plus insupportable à la fois par les populations concernées et nos concitoyens excédés d'assister à l'impuissance de l'autorité de l'Etat en certaines circonstances.

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Réponse du Ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales publiée le 03/04/2003

La maîtrise des flux migratoires est une composante incontournable d'une politique équilibrée en matière d'immigration en France : autant notre pays se fait un devoir d'accueillir dans de bonnes conditions les ressortissants étrangers présents régulièrement sur le territoire national, aussi bien que ceux qui peuvent faire valoir avec la France des attaches particulières ou encore viennent y demander asile, autant il se doit de prendre des mesures d'éloignement à l'égard de ceux qui n'ont pas vocation à y résider ou à s'y intégrer et de procéder effectivement à l'exécution de ces décisions. La maîtrise des flux migratoires suppose le renforcement du contrôle aux frontières et la création de nouveaux outils juridiques pour lutter contre l'immigration clandestine et les filières mafieuses. Elle demande aussi une intensification de la lutte contre les fraudes à l'immigration (état civil, mariages de complaisance, attestations d'hébergement) et une nécessaire adaptation de la législation sur les reconduites aux frontières, qu'il s'agisse de la procédure ou de la durée de la rétention. Ce sont autant de thèmes qui font l'objet de travaux de réflexion au plan interministériel et pourraient trouver leur traduction dans une modification de la législation. Mais il importe aussi de construire une nouvelle politique d'immigration et de coopération avec les pays sources et de créer des filières " positives " comme celles qui se mettent en place avec la Roumanie et avec l'Afghanistan. Pour que ces retours soient pérennes, il faut qu'ils s'inscrivent dans une approche plus large que la seule logique de l'éloignement et prennent en compte la dimension de la réinsertion sociale et économique des ressortissants étrangers concernés. La France met en oeuvre des procédures d'aide au retour permettant la réinstallation dans le pays d'origine et aussi le financement de projets économiques garantissant une réinsertion durable et prend sa part de l'aide à apporter aux pays sources, mais par ailleurs l'intervention européenne trouve ici toute sa portée. Les conclusions du Conseil de Séville des 21 et 22 juin 2002 montrent la détermination du Conseil européen à accélérer la mise en oeuvre, sous tous ses aspects, du programme adopté à Tampere en vue de la création d'un espace de liberté, de sécurité et de justice dans l'Union européenne et expriment sa volonté de développer une politique commune sur les questions de l'immigration et de l'asile. La directive sur la reconnaissance mutuelle des mesures d'éloignement des ressortissants des pays tiers, bientôt transposée en droit français, et celle sur l'assistance au transit dans le cadre de l'éloignement par voie aérienne en cours de négociation illustrent de façon pratique ces grands engagements. Tout comme le font aussi la réflexion engagée sur la mise en place d'un système commun d'identification des données des visas, la négociation en cours de nouveaux accords de réadmission avec des pays sources, ou encore les travaux menés pour le renforcement des procédures de contrôle des passeports aux frontières extérieures. S'agissant de ce dernier point, la position française est ferme sur l'obligation de compostage systématique des passeports lors du passage de la frontière extérieure. La collaboration bilatérale avec nos partenaires européens reste un élément très important de notre maîtrise des flux migratoires, comme le montrent les travaux du groupe franco allemand sur la rationalisation des mesures d'éloignement par le moyen de vols groupés ainsi que l'accord trouvé avec la Grande Bretagne pour la fermeture du centre d'accueil de la Croix Rouge à Sangatte, qui s'est assortie de la mise en place d'un ensemble de mesures de prise en charge de ses résidents et du démantèlement de filières clandestines côté français aussi bien que côté anglais. La Grande Bretagne a par ailleurs engagé dans cette même période une réflexion sur sa politique en matière d'immigration, durcie par le National Immigration Act du 9 novembre dernier. C'est dans ce cadre général de collaboration intensifiée au sein de l'Union européenne et avec nos partenaires que viendra s'inscrire le nouveau dispositif légal en cours d'élaboration sur le plan national.

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