Question de M. BARBIER Gilbert (Jura - RDSE) publiée le 24/10/2002

M. Gilbert Barbier appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le développement du travail d'intérêt général (TIG). Bien qu'ayant connu une forte progression à partir de 1994, on observe ces dernières années une stagnation de cette peine, en dépit de l'intérêt des magistrats pour la mesure. La mise en place difficile d'un suivi qualitatif, lequel ne constitue pas toujours un objectif pour les partenaires administratifs ou associatifs, expliquerait cette stagnation. Néanmoins, les collectivités territoriales, et notamment les communes les plus pourvoyeuses de postes, restent particulièrement demandeuses et regrettent que la prononciation de la peine de TIG soit subordonnée à l'acceptation par le prévenu. Ce regret est également partagé par les partenaires du contrat local de sécurité. Il lui demande quelles solutions il envisage de prendre pour développer cette mesure qui semble une alternative pédagogique et efficace pour les jeunes délinquants.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 19/12/2002

Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire qu'il partage son analyse sur l'intérêt que présente la peine de travail d'intérêt général en termes de pédagogie et d'efficacité. S'il est vrai que depuis 1994, le nombre de condamnations de cette nature ne progresse pas sensiblement, il se maintient à un niveau élevé puisque, en moyenne, depuis 1994, 23 000 peines délictuelles de travail d'intérêt général et de sursis assorti d'un travail d'intérêt général sont prononcées chaque année, soit 4,5 % du total des peines prononcées. Ce ratio peut être amélioré. Il est exact que la crédibilité de cette peine suppose un fort investissement tant des juges d'application des peines que du personnel des services d'insertion et de probation. Cela signifie qu'il faut réduire sensiblement le nombre de dossiers que ces professionnels ont en charge afin de leur permettre une attention complète pour chacun des condamnés à cette peine. Le garde des sceaux a fait adopter la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice, qui vise à doter la justice des moyens d'assurer pour chaque infraction commise une sanction effective, rapide, juste et utile. Ainsi, sur la période 2003-2007, il est prévu la création de 10 100 emplois permanents, dont 950 magistrats et 3 740 personnels de l'administration pénitentiaire. Par ailleurs, pour la seule année 2003, la loi de finances prévoit la création de 180 postes de magistrats et de 150 postes de personnel d'insertion et de probation. Ainsi, l'augmentation massive des capacités de suivi de ces mesures, doublée de la vitalité du partenariat avec les collectivités locales, qui conditionne la création de places de travail d'intérêt général, permettront une orientation plus importante des juridictions vers cette sanction, notamment pour les jeunes délinquants. Il est d'ailleurs encourageant de constater que 289 contrats locaux de sécurité sur les 602 signés à ce jour prévoient des actions de développement des alternatives à l'incarcération. S'agissant de l'exigence du recueil préalable du consentement du prévenu au prononcé de la peine, conformément au principe général de légalité, toutes les peines édictées par la loi doivent l'être en conformité avec les principes supérieurs posés par les textes constitutionnels et les déclarations internationales de droits. A cet égard, il y a lieu de rappeler que l'exigence du consentement du prévenu à la peine de travail d'intérêt général a été prévue par le législateur dans le souci de mettre la législation française en conformité avec l'article 4 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, ratifiée par la France, aux termes duquel " nul ne peut être astreint à accomplir un travail forcé ou obligatoire ". Les engagements internationaux de la France s'opposent donc à une modification législative sur ce point. En tout état de cause, le tribunal, confronté au refus du prévenu, conserve la possibilité de prononcer à son encontre une peine plus sévère. Enfin, une peine de travail d'intérêt général prononcée en dépit d'un refus explicite du prévenu présenterait un intérêt pédagogique bien moindre.

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