Question de M. PEYRAT Jacques (Alpes-Maritimes - RPR) publiée le 07/11/2002

M. Jacques Peyrat souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur l'article 10 de la loi d'orientation et de programmation n° 95-73 du 21 janvier 1995 relatif au système de vidéosurveillance et sur son décret d'application du 17 octobre 1996. Les sociétés de vidéosurveillance se heurtent en effet à quelques difficultés dans la mise en couvre et l'exploitation des systèmes de vidéosurveillance compte tenu de la réglementation en vigueur concernant notamment les conditions d'autorisation d'enregistrement et la gestion de la demande d'autorisation d'installation d'un système de vidéosurveillance par l'administration préfectorale. Tout d'abord, les autorisations d'enregistrement, notamment pour les établissements faisant l'objet de risques de vols, sont délivrées par des commissions selon des conditions insuffisamment définies entraînant ainsi de réelles divergences dans l'appréciation des critères qui prévalent dans leurs décisions. Aussi, certains établissements, pourtant sujet à ce type d'infraction, ne peuvent bénéficier d'une protection par vidéosurveillance, telles les pharmacies. Par ailleurs, le système actuel, faisant de l'absence de réponse de l'administration préfectorale à une demande d'autorisation de mise en place d'un système de vidéosurveillance une décision implicite de refus, apparaît totalement inadaptée compte tenu des délais souvent longs d'instruction des dossiers. Les sociétés de vidéosurveillance souhaiteraient donc l'adoption du principe de décision implicite d'acceptation, dans un délai raisonnable, favorisant ainsi la mise en place rapide des équipements dans les établissements concernés. Considérant les engagements du Gouvernement pour lutter contre l'insécurité et sa réelle ambition en la matière, il est nécessaire de tout mettre en oeuvre pour prévenir les atteintes à la sécurité des personnes et des biens. La vidéosurveillance fait partie des moyens qu'il convient d'utiliser et de développer en conciliant la sauvegarde des libertés individuelles et la préservation de l'ordre public. Aussi, il souhaiterait savoir si le Gouvernement envisagerait éventuellement un aménagement de la réglementation actuelle en matière de vidéosurveillance afin de faciliter sa mise en place et de répondre ainsi aux attentes des citoyens.

- page 2594


Réponse du Ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales publiée le 30/01/2003

L'honorable parlementaire appelle l'attention du ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur les conditions d'autorisation d'enregistrement posées par l'article 10 de la loi du 21 janvier 1995, relatif à la vidéosurveillance, qui, insuffisamment définies, entraîneraient des divergences dans les décisions de délivrance d'autorisation rendues par les commissions départementales et ne permettraient pas à des établissements ayant un réel besoin de protection, telles les pharmacies, de se doter de dispositifs de vidéosurveillance. II demande s'il envisage également de renverser la règle selon laquelle le silence gardé par l'administration vaut décision implicite de rejet, afin de ne pas pénaliser les pétitionnaires confrontés à une longueur importante des délais d'instruction de leurs demandes. L'article 10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité et son décret d'application n° 96-926 du 17 octobre 1996 ont pour objet de définir les conditions d'un recours à la vidéosurveillance garantissant le respect des libertés individuelles. Ils soumettent notamment à autorisation la mise en place de systèmes de vidéosurveillance dans les lieux et établissements ouverts au public. La condition fixée par la loi pour l'installation de caméras est que le lieu ou l'établissement soit particulièrement exposé à un risque d'agressions ou de vols. La finalité du système doit être d'assurer la sécurité des personnes et des biens. La décision de délivrer une autorisation n'est pas prise par la commission départementale de vidéosurveillance. Elle appartient à l'autorité préfectorale, qui se prononce, après avis de cette commission, au regard des éléments communiqués dans le dossier de demande d'autorisation. Cet avis ne lie pas le préfet. Le principe de l'appréciation des données propres à chaque dossier explique les divergences parfois constatées entre préfets sur des demandes déposées par des établissements appartenant à une même catégorie. En effet, même pour de tels établissements, les conditions de fonctionnement sont rarement en tout point comparables d'un département à l'autre, et à l'intérieur même d'un département. Pour des demandes semblables, la disparité des décisions entre préfectures est toutefois très limitée. La circulaire du 22 octobre 1996, publiée au Journal officiel du 7 décembre 1996, et les instructions régulièrement adressées aux préfets permettent de définir, pour les principaux types de dossier, un cadre d'appréciation partagé sur l'ensemble du territoire national. Ce cadre n'impose aucune solution, celle-ci étant adaptée selon les données particulières à chaque dossier, mais il permet d'assurer une cohérence dans les décisions prises. Le préfet apprécie si le risque est réel et si son importance est de nature à justifier l'installation d'un dispositif de vidéosurveillance. II prend en compte, ainsi que cela a été précisé dans la circulaire du 22 octobre 1996 précitée, de multiples critères, tels l'isolement, l'ouverture tardive, la nature des marchandises, les précédents vols ou agressions commis dans l'établissement concerné, ou dans le périmètre où il se situe, ou dans un établissement similaire dans une autre partie du département. Dans le cas des pharmacies, le recours à un système de vidéosurveillance est expressément prévu par l'article 4-III du décret n° 97-46 du 15 janvier 1997, relatif aux obligations de surveillance ou de gardiennage incombant à certains propriétaires, exploitants ou affectataires de locaux professionnels ou commerciaux, pris en application de l'article 12 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995. L'autorisation d'installation est donnée au cas par cas, selon les données propres à chaque dossier. C'est parce qu'ils ont estimé que les risques d'agression ou de vol étaient caractérisés que les préfets ont, à de très nombreuses reprises, autorisé l'installation de caméras de vidéosurveillance dans des pharmacies. S'agissant des conséquences liées à l'absence de réponse de l'administration, le décret n° 2002-814 du 3 mai 2002, pris pour l'application de l'article 21 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 et relatif aux délais faisant naître une décision implicite de rejet, a pris en compte la longueur de la procédure d'autorisation applicable en matière de vidéosurveillance, liée notamment à la nécessité de consulter pour avis une commission départementale. Par dérogation à l'article 21 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000, relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, qui a posé comme principe que, passé un délai de deux mois, le silence gardé par l'administration valait décision implicite de rejet, le décret a prévu un délai de quatre mois avant que la règle du refus implicite ne s'applique. L'expiration de ce délai n'empêche pas l'autorité préfectorale de rendre par la suite une décision explicite d'acceptation. L'adoption par voie législative ou réglementaire du principe de décision implicite d'acceptation en matière de vidéosurveillance n'est juridiquement pas possible. L'article 22 de la loi n° 2000-321 prévoit certes que, par exception, le silence gardé par l'administration pendant deux mois peut valoir acceptation. Toutefois, un tel régime ne peut être institué " lorsque les engagements internationaux de la France, l'ordre public, la protection des libertés ou la sauvegarde des autres principes de valeur constitutionnelle s'y opposent ". Dans sa décision n° 94-352 du 18 janvier 1995 sur la loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité, " compte tenu des risques que peut comporter pour la liberté individuelle l'installation de systèmes de vidéosurveillance ", le Conseil constitutionnel a censuré une disposition de l'article 10 qui prévoyait que le silence gardé par l'administration pendant quatre mois valait acceptation. II importe en effet qu'une installation ne puisse être effectuée sans qu'auparavant la vérification des garanties légalement prévues ait été assurée. Les préoccupations de ceux qui déposent un dossier ne sont pas négligées pour autant. Des instructions sont régulièrement adressées aux préfets pour qu'ils traitent avec diligence les demandes d'autorisation d'installation de système de vidéosurveillance.

- page 367

Page mise à jour le