Question de M. DELFAU Gérard (Hérault - RDSE) publiée le 15/01/2003

M. Gérard Delfau attire l'attention de Mme la secrétaire d'Etat aux personnes handicapées sur le sous-équipement alarmant du département de l'Hérault en matière d'accueil de personnes handicapées dans une structure spécialisée. Il n'existe aucun établissement pour les enfants gravement autistes, jusqu'à l'âge de douze ans. Ils sont pris en charge dans des IME qui n'ont ni les moyens financiers ni l'encadrement nécessaire. Au-delà de douze ans, un seul établissement est habilité à les accueillir, dont la liste d'attente décourage les familles. Cette situation est ancienne et la forte croissance démographique du département vient l'aggraver. En tant que président de l'association l'Ensoleillade, qui gère un institut médico-éducatif (IME), une maison d'accueil spécialisée (MAS) et un service d'éducation spécialisé et de soins à domicile (SESSAD) sur sa commune, à Saint-André-de-Sangonis, il tire le signal d'alarme. En effet, il constate un malaise chez le personnel salarié : la mise en place des 35 heures et la faiblesse des moyens alloués ne lui permettent plus de s'occuper aussi bien que par le passé des résidents. C'est humainement insupportable pour le personnel d'encadrement, pour les patients et leur famille ainsi que pour les élus ! Par ailleurs, en tant que gestionnaire, il s'inquiète de l'arrivée prochaine du " budget global ". Sur la base actuelle, la MAS, sous-dotée, au départ, serait promise à des difficultés quasi insurmontables. Or, pour tous ces points, il ne trouve aucun interlocuteur qui lui apporte, au niveau local, de solution. Il lui signale que les services déconcentrés du ministère, à Montpellier, sont tellement sous-équipés en personnel que, lors du conseil d'administration de l'Ensoleillade, le 25 octobre dernier, le budget " prévisionnel " de 2002 n'avait toujours pas été reçu ! Aussi, au nom des élus de cette instance, il lui demande quelles mesures elle compte prendre pour que cela ne se reproduise pas et qu'une mise à plat soit décidée et effectuée pour l'année 2003. Sans oublier de rendre hommage aux nombreux bénévoles qui oeuvrent dans ce secteur sensible.

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Réponse du Secrétariat d'Etat aux personnes handicapées publiée le 26/02/2003

Réponse apportée en séance publique le 25/02/2003

M. Gérard Delfau. Madame la secrétaire d'Etat, je souhaite attirer votre attention sur la situation alarmante du département dont je suis le sénateur, l'Hérault, en matière d'accueil de personnes handicapées dans une structure spécialisée. Ainsi, il n'existe à ce jour aucun établissement pour accueillir les enfants autistes jusqu'à l'âge de douze ans. Ces derniers, de ce fait, soit restent chez eux, en famille, dans les conditions que l'on imagine, soit sont pris en charge dans les instituts médico-éducatifs, ou IME, qui ne disposent ni des moyens financiers suffisants ni de l'encadrement nécessaire. Au-delà de l'âge de douze ans, les jeunes autistes, dans un département aussi peuplé que l'Hérault, ne peuvent résider que dans un seul établissement habilité à les accueillir, et la liste d'attente décourage les familles.

Cette situation, ancienne, est en outre aggravée - comme pour tous les services publics d'ailleurs - par la forte croissance démographique du département.

En tant que président de l'association L'Ensoleillade, qui gère un IME, une maison d'accueil spécialisée, ou MAS, et un service d'éducation spécialisé et de soins à domicile, un SESSAD, je tiens à tirer la sonnette d'alarme sur le malaise que je constate chez les personnels salariés depuis la mise en place des 35 heures, compte tenu de l'absence de moyens humains de compensation. Aujourd'hui - vous le savez d'ailleurs, madame la secrétaire d'Etat -, nous n'avons plus tout à fait la possibilité de nous occuper aussi bien que par le passé des résidents. C'est humainement insupportable pour le conseil d'administration et pour les personnels d'encadrement.

Par ailleurs, je m'inquiète de l'arrivée prochaine du « budget global ». Sur la base actuelle, de nombreux MAS et IME seraient voués à des difficultés quasiment insurmontables. Or - et c'est le dernier point que je tiens à souligner - aucun interlocuteur n'est susceptible de m'apporter à ce jour, au niveau local, une réponse. Je vous signale, madame la secrétaire d'Etat, que les services déconcentrés à Montpellier de votre ministère sont tellement sous-dotés en personnel que, lors du dernier conseil d'administration de mon association, le 25 octobre dernier, nous n'avions toujours pas reçu le budget prévisionnel de 2002 ! Et la situation est généralisée dans le département ! Quelles mesures comptez-vous prendre pour que cette situation ne se reproduise pas et qu'une mise à plat soit décidée et effectuée pour l'année 2003 ?

Je souhaite surtout savoir comment l'engagement solennel de M. le Président de la République en faveur des personnes handicapées se traduira concrètement, notamment dans mon département, pour celles et ceux qui sont accueillis dans des structures d'accueil.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat.

Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Monsieur le sénateur, vous avez appelé mon attention sur les problèmes que rencontre le département de l'Hérault s'agissant notamment de l'accueil des enfants et des adolescents, mais également des adultes handicapés dans les établissements et dans les services médico-sociaux. Vous le faites à juste titre, et je me suis d'ores et déjà engagée, en collaboration avec mon collègue Jean-François Mattei, à doter la région Languedoc-Roussillon de moyens spécifiques au regard des déficits qui sont les siens.

M. Gérard Delfau. Très bien !

Mme Marie-Thérèse Boisseau, secrétaire d'Etat. En effet, à l'occasion d'un récent déplacement dans le Gard et dans les Pyrénées-Orientales, je n'ai pas manqué d'être alertée sur cette situation, qui fait l'objet de contacts étroits entre mon cabinet, l'administration centrale et les services déconcentrés de l'Etat.

Aussi, monsieur le sénateur, je tiens à vous assurer que des réponses seront apportées dès 2003 aux difficultés que vous évoquez.

Sans commenter l'attribution précise des moyens délégués au préfet de région, qui a la responsabilité de les répartir entre les cinq départements, je puis vous indiquer que ces moyens supplémentaires permettront, s'agissant des établissements pour enfants, d'opérer le réajustement budgétaire de certains établissements et services pour enfants, sur expertise de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales, la DDASS, et de ceux qui gèrent des SESSAD, en particulier l'amplification de la dernière tranche du plan triennal 2001-2003, notamment pour les places de SESSAD supplémentaires.

Ces moyens supplémentaires permettront également le financement, au titre des réseaux de santé décrits dans la circulaire ministérielle du 19 décembre 2002, d'une action coordonnée autour du dépistage et de l'annonce du handicap, compte tenu du partenariat entre les centres d'action médico-sociale précoce, ou CAMSP, le centre hospitalier et universitaire, la pédiatrie, la protection maternelle et infantile et les pédiatres libéraux.

S'agissant des établissements pour adultes, la dotation allouée à la région Languedoc-Roussillon permettra de créer, cette année, 149 places en centres d'aide par le travail, ou CAT, soit une majoration exceptionnelle de 100 places. L'effort le plus significatif portera sur la création de places en maisons d'accueil spécialisées, ou en foyers d'accueil médicalisés : si le nombre de places, vous le savez, va doubler en France en 2003, la dotation attribuée au Languedoc-Roussillon va, quant à elle, pratiquement quintupler.

En ouvrant des places nouvelles pour les adultes handicapés, le Gouvernement compte notamment rendre possible l'accueil d'enfants en IME, grâce à l'orientation effective de jeunes adultes, maintenus jusqu'alors en IME au titre de l'amendement Creton, dans des établissements enfin adaptés à leurs besoins.

Enfin, l'objectif national de dépenses d'assurance maladie pour 2003 en matière de handicap permettra le financement expérimental de la prise en charge à domicile de personnes très lourdement handicapées à partir d'une MAS ou d'un foyer d'accueil médicalisé. Au moins un projet par région sera retenu. Compte tenu de l'implication de l'Hérault dans ce domaine, je ne doute pas que votre département sera prêt dans le délai imparti.

Ces quelques engagements concrets que je viens de citer permettront de rattraper une partie du retard pris par l'Hérault en matière d'accueil des personnes handicapées. Ils résultent d'une collaboration permanente entre les services de l'Etat et les associations et témoignent du souci du Gouvernement de traduire dans les faits la volonté du Président de la République de faire de l'amélioration de la vie quotidienne des personnes handicapées l'une de ses trois priorités pour le quinquennat.

La mobilisation autour de l'année européenne des personnes handicapées y contribue également, et je sais pouvoir compter sur vous, mesdames, messieurs les sénateurs, pour y prendre une part active. Les travaux préparatoires de la commission des affaires sociales le prouvent déjà.

J'évoquerai, pour terminer mon intervention, deux autres problèmes.

S'agissant tout d'abord des 35 heures, je suis consciente, comme vous, monsieur le sénateur, des problèmes posés par l'aménagement et la réduction du temps de travail.

Les établissements régis par les conventions collectives du secteur social ont bénéficié, certes, de créations d'emplois en contrepartie d'engagements de modération salariale, mais des difficultés importantes d'organisation perdurent et la multiplication du nombre de personnes se succédant au chevet des handicapés n'est souvent, j'en suis consciente, ni souhaitée ni souhaitable. Il va donc nous falloir poursuivre ensemble notre réflexion sur ce point, comme sur les problèmes liés à la dotation globale de financement. La mise en oeuvre de cette dernière dans les établissements dépendra de celle des décrets d'application de la loi du 2 janvier 2002 rénovant les actions sociales et médico-sociales à propos desquelles la concertation avec les associations est très avancée sans être à ce jour achevée. Mais je pense que nous aurons l'occasion d'en reparler.

M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau.

M. Gérard Delfau. Madame la secrétaire d'Etat, je tiens à vous remercier tout d'abord de la précision et de l'exhaustivité de votre réponse sur un sujet complexe et humainement si important. Vous avez voulu prendre toutes les dimensions de ce dernier et ne rien laisser dans l'ombre.

Je veux vous remercier aussi de vos annonces relatives au rattrapage d'« une partie du retard ». Effectivement, la situation, ancienne, s'était aggravée ces dernières années.

J'ai entendu avec plaisir que des dotations spécifiques seraient attribuées dans les secteurs les plus cruciaux, au-delà du seul département de l'Hérault, à l'ensemble de la région Languedoc-Roussillon. J'espère que nous pourrons ainsi résoudre au moins les situations les plus préoccupantes.

Je voudrais rappeler, en y mettant toutes les formes, à quel point il est important que les structures, leur conseil d'administration et leur direction, retrouvent une capacité de dialogue avec les services déconcentrés de votre ministère. On le sait dans cette assemblée, je suis un défenseur acharné des services publics. Il est important qu'à chaque étape la fonction publique puisse assurer jusqu'au bout sa mission.

Je voudrais enfin vous remercier de vos propos très pondérés sur les 35 heures. Nous sommes inquiets, entre autres, de l'application d'une directive européenne sur le travail de nuit reprise par un décret, qui aboutirait à la multiplication des intervenants auprès des personnes handicapées, parfois âgées, ce qui ne serait évidemment pas de nature à procurer à ces dernières la tranquillité dont elles ont besoin.

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