Question de M. HAMEL Emmanuel (Rhône - UMP) publiée le 27/03/2003

M. Emmanuel Hamel attire l'attention de M. le ministre délégué à la famille sur sa réponse à la question n° 3104 parue à la page 2649 du Journal officiel - Questions remises à la présidence du Sénat - Réponses des ministres aux questions écrites du 7 novembre 2002, dans laquelle il est précisé que son ministère " souhaite qu'un effort important soit entrepris pour renforcer l'aide aux victimes de maltraitance dans le cadre de structures plus adaptées à leurs spécificités. ". Il lui serait reconnaissant de bien vouloir lui indiquer dans quelle mesure un tel effort va être réalisé au cours de l'année 2003.

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Réponse du Ministère délégué à la famille publiée le 26/06/2003

La notion de maltraitance est une notion certes ancienne mais qui n'a trouvé toute sa considération par les pouvoirs publics que très récemment. Ainsi, il faudra attendre la fin des années 1980 pour que la loi du 10 juillet 1989 relative à la prévention des mauvais traitements à l'égard des mineurs et à la protection de l'enfance fasse état de la " maltraitance " à l'égard des enfants et organise l'obligation de signalement à l'autorité judiciaire. La loi du 17 juin 1998, relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu'à la protection des mineurs, renforce la répression des infractions sexuelles, améliore la protection des victimes et complète le dispositif en instituant le statut de mineur victime. Pour faire reculer ce fléau, le ministère de la famille mène depuis plusieurs années dans le secteur social et médico-social une véritable politique de prévention. Cette politique se déploie sur cinq axes prioritaires : mieux connaître le phénomène et sensibiliser le grand public et les professionnels ; renforcer les procédures de suivi et de traitement des signalements de maltraitance ; renforcer les contrôles des établissements et services sociaux et médico-sociaux ; garantir les droits des usagers et contribuer à l'amélioration de la qualité de leur prise en charge, pour prévenir les situations de maltraitance, enfin, apporter un appui technique et juridique mais aussi un soutien méthodologique aux acteurs de terrain et en premier lieu aux services déconcentrés. Le ministre délégué à la famille entend développer cette action, tant en matière de lutte contre la maltraitance que de promotion de la " bien-traitance ". Il rappelle que la maltraitance peut concerner tous les milieux sociaux, qu'elle peut se retrouver dans tous les établissements et structures qui accueillent des mineurs. La spécificité de ce phénomène particulièrement difficile à appréhender nécessite une prise de conscience de l'ensemble de la population. C'est dans cet esprit que doit s'analyser la campagne de publicité diffusée par l'association Enfance et Partage, il n'appartient pas au ministre délégué à la famille de juger de la qualité du message diffusé par ces spots télévisés. En revanche, cette campagne a le mérite de susciter des réactions sur un sujet trop souvent tabou. Par ailleurs, le ministre délégué à la famille insiste sur le fait que nous manquons encore de chiffres précis et d'une observation réellement partagée en matière de maltraitance à enfants. Chaque administration, qu'il s'agisse de la justice, de la santé, de l'éducation nationale, définit ses propres critères, utilise ses indicateurs avec des logiciels sans base commune. Seuls l'Observatoire national de l'action sociale décentralisée (ODAS) et le Service national d'accueil téléphonique pour l'enfance maltraitée (SNATEM) ont réalisé un précieux travail d'harmonisation concernant les indicateurs et les définitions. Il existe aussi des études sur le nombre d'enfants qui subissent des violences répétées sans être signalés ni protégés. Il y a urgence à prévenir les récidives de maltraitance et pour cela il faudrait assurer une surveillance épidémiologique rigoureuse en la matière et mesurer l'efficacité des mesures de prévention et de protection prises. S'agissant des signalements qui sont transmis à la direction générale de l'action sociale du ministère de la famille, ils sont en constante augmentation chaque année : 129 en 2000, 151 en 2001 et 219 en 2002, soit + 70 % entre 2000 et 2002. L'évolution du nombre de situations de maltraitance signalées à l'administration est la conséquence d'une meilleure prise en compte par les services déconcentrés du dispositif mis en place, il y a 5 ans par la circulaire du 5 mai 1998, plus que la traduction d'une réelle augmentation des situations de maltraitance en institution, phénomène dont nous ne sommes pas encore en mesure d'évaluer précisément l'ampleur. Il appartient aux services déconcentrés de l'Etat de veiller à ce que les responsables des établissements sociaux et médico-sociaux respectent les obligations auxquelles ils sont soumis dans de tels cas, pour permettre aux victimes d'être protégées et surmonter leur traumatisme. Il importe, à ce titre, que les établissements formalisent les dispositions à mettre en oeuvre, par exemple, sous la forme d'un " protocole " précisant la conduite à tenir en cas d'actes de maltraitance au sein de la structure. D'une manière générale, les échanges statistiques entre les services de l'Etat et ceux des conseils généraux restent peu développés sur le territoire national, exception faite de quelques départements pilotes dont il convient de valoriser l'expérience. Ce sont les raisons pour lesquelle, le ministre délégué à la famille a installé le 14 janvier dernier un groupe de travail préparatoire à la création d'un Observatoire national pour l'enfance maltraitée. Composé de différents représentants, ce groupe avait à préciser les missions et l'organisation d'un observatoire national afin de recueillir des données chiffrées et des études sur la maltraitance des mineurs, faire des propositions de simplification et d'harmonisation en ce qui concerne le recueil et le circuit des signalements, élaborer un cahier des charges minimales permettant de retrouver, dans tous les dispositifs statistiques ou l'observation, des données homogènes communes, tout en laissant à chaque institution la possibilité de développer son système d'information en fonction de ses besoins spécifiques, mettre en place un programme annuel ou pluriannuel d'études à réaliser, aider à la constitution d'observatoires locaux et valoriser les observatoires existants, participer aux échanges entre pays européens et avec les pays étrangers en général, enfin, définir le statut juridique de l'observatoire. Les conclusions de ces travaux devraient intervenir dans les prochaines semaines. Le ministre délégué à la famille a par ailleurs demandé, le 22 mai, à l'occasion de la réunion des directeurs régionaux et départementaux de l'action sanitaire et sociale de veiller particulièrement à la mission de surveillance des établissements accueillant des enfants. Il leur a rappelé qu'il leur appartient de contrôler qu'une situation de maltraitance dont ils ont connaissance n'est pas la conséquence d'un dysfonctionnement imputable à l'établissement dans lequel elle s'est produite. Dans la plupart des cas, une inspection sur place est nécessaire car les violences institutionnelles constituent souvent le symptôme de dysfonctionnements graves. Dans ce contexte, le programme quinquennal d'inspections (2002-2006), que la DGAS est chargée d'animer, répond à une double priorité du ministère : d'une part, lutter contre les maltraitances envers les personnes vulnérables ; d'autre part, renforcer la fonction d'inspection dans les services déconcentrés, dans le cadre du dispositif mis en place en 1999 en vue d'appuyer la professionnalisation des missions de contrôle des DDASS et des DRASS. Le programme, mis en couvre au niveau départemental par les DDASS (inspections) et la mission régionale et interdépartementale d'inspection, de contrôle et d'évaluation (MRIICE) de la DRASS (animation et assistance), porte sur le contrôle d'au moins 2 000 structures sociales et médico-sociales sur cinq ans, en plus des inspections menées à la suite de signalements de dysfonctionnements ou de maltraitances. En 2002, d'après un premier bilan des contrôles dans 17 régions, il apparaît que 249 inspections ont été menées. Pour accompagner ce programme et notamment faciliter la mise en oeuvre des inspections, un outil de prévention et de repérage des risques de maltraitance en institution a été diffusé aux services déconcentrés en 2002. Il conviendra d'en évaluer l'utilisation. Par ailleurs, afin de disposer d'un état des lieux objectif, le ministre délégué à la famille a saisi les préfets de département pour leur demander de lui adresser un bilan de la collaboration qu'ils mènent avec les présidents des conseils généraux. Le ministre délégué à la famille tient à rappeler que le succès de la lutte contre la maltraitance repose sur la convergence des efforts de multiples acteurs. Aussi, cet état des lieux permettra-t-il de repérer les manques, de mettre en valeur les partenariats et les initiatives afin de tracer de nouvelles voies. Le ministre de la famille va enfin engager une démarche visant à promouvoir la bien-traitance institutionnelle des enfants, dans laquelle sont engagés des établissements sociaux médico-sociaux et sanitaires de plusieurs régions. Ainsi, la bien-traitance, le développement de la qualité des pratiques, la formation et le soutien des professionnels pour mener à bien ce qui tient parfois du défi devant la complexité des processus en jeu se sont progressivement imposés au cours des années. Pour renforcer ce mouvement, le ministre délégué à la famille envisage de lancer à l'automne une opération destinée à donner à la démarche de bien-traitance une audience accrue. Ainsi, un appel à contributions permettra à des équipes de professionnels de faire connaître leurs réalisations en la matière. Un jury sélectionnera les plus significatives d'entre elles afin de leur donner la reconnaissance et la diffusion qu'elles méritent. L'ensemble de l'action du ministre délégué à la famille dans le domaine de la maltraitance fera l'objet d'une communication en Conseil des ministres dans le courant du mois de septembre 2003.

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