Question de Mme LÉTARD Valérie (Nord - UC-UDF) publiée le 30/04/2003

Mme Valérie Létard attire l'attention de M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire sur les différents problèmes qui se posent aux communes qui souhaitent reprendre en régie les activités précédemment confiées par elles à des associations, en particulier en ce qui concerne notamment le devenir des personnels contractuels et la reprise de leur ancienneté. Or plusieurs chambres régionales des comptes ont jugé récemment que la pratique assez largement répandue pour des collectivités territoriales de faire participer des associations à des activités de service public pouvait constituer une gestion de fait. Pour se conformer au droit, de nombreuses collectivités réfléchissent donc à la possibilité de réintégrer en leur sein des activités déléguées à des associations. Dans de nombreux cas, et c'est notamment la situation de l'association Val Enfance de Valenciennes, la reprise de l'ancienneté des agents de ces associations constitue une réelle difficulté. C'est pourquoi elle lui demande, compte tenu du bilan des premières applications de l'article 9 de la loi n° 2001-2 du 3 janvier 2001, de lui indiquer quelles mesures pourraient être envisagées, notamment au regard du droit européen, pour régler les difficultés rencontrées par les communes pour la reprise de personnels contractuels employés par des associations gérant des services publics administratifs et de lui préciser selon quel calendrier ces mesures pourraient intervenir.

- page 2785


Réponse du Ministère de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire publiée le 28/05/2003

Réponse apportée en séance publique le 27/05/2003

Mme Valérie Létard. En application des premières lois de décentralisation, de nombreuses communes ont confié à des associations des activités de service public qu'elles ne pouvaient assurer elles-mêmes.

Pour se conformer au droit, les collectivités concernées réfléchissent aujourd'hui à la possibilité de réintégrer en leur sein les activités qu'elles avaient déléguées. La mise en régie de celles-ci suppose la disparition de la structure associative et le transfert de ses personnels à la collectivité territoriale. Pour les salariés concernés, cela implique de voir résilier leur contrat de droit privé pour, soit accéder à la fonction publique territoriale, soit bénéficier d'un nouveau contrat de droit public.

Dès l'origine, cette évolution s'est révélée problématique, car elle était encadrée par plusieurs dispositions, que ce soient l'article L. 122-12 du code du travail, la directive communautaire, modifiée, du 14 février 1977, ou la loi de 1984 relative au statut de la fonction publique territoriale. De plus, la jurisprudence du Conseil d'Etat et de la Cour de cassation ainsi que celle de la Cour de justice des Communautés européennes ont parfois pu être contradictoires.

Dans un souci de clarification, le législateur est intervenu pour tenter d'apporter des réponses aux difficultés que rencontraient les collectivités territoriales qui voulaient procéder à un tel changement. C'est dans ce contexte qu'ont été votées les dispositions de l'article 9 de la loi du 3 janvier 2001 relative à la résorption de l'emploi précaire et à la modernisation du recrutement dans la fonction publique ainsi, qu'au temps de travail dans la fonction publique territoriale, qui permettent à une collectivité de recruter en qualité d'agents non titulaires les personnels qui bénéficiaient d'un contrat de travail avec une association dont elle reprend les moyens et l'objet. Aux termes de cet article, les agents non titulaires ainsi recrutés « peuvent conserver le bénéfice de leur contrat à durée indéterminée ainsi que celui de la rémunération perçue au titre de leur contrat de travail antérieur et de leur régime complémentaire et de prévoyance ».

Mais ce texte ne précise pas un point important, à savoir la question de la reprise de l'ancienneté de ces personnels et l'évolution de leur carrière, question qui, dans de nombreux cas, est primordiale. En effet, certaines associations emploient depuis de nombreuses années parfois des salariés qui n'accepteront de changement de statut que s'ils sont assurés de pouvoir conserver leur ancienneté, ce qui paraît une demande légitime.

A la lecture des plus récentes décisions judiciaires rendues sur ce sujet, on comprend la perplexité des collectivités face à un choix qu'elles savent nécessaire, mais dont elles ne maîtrisent pas tous les paramètres.

Monsieur le ministre, quelle solution le Gouvernement envisage-t-il de proposer pour définir plus clairement les modalités de la municipalisation des associations gérant des activités de service public ? Entendez-vous profiter de la préparation des lois organiques sur la décentralisation pour proposer un ajustement de la loi du 3 janvier 2001 sur ce point ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Madame le sénateur, vous avez exposé un cas fréquent. De nombreuses collectivités locales qui, compte tenu de diverses décisions juridiciaires et pour éviter une gestion de fait, souhaitent remunicipaliser l'activité de certaines de leurs associations s'interrogent en effet sur le moyen de transférer les personnels de ces associations en préservant sinon leurs avantages - le terme est peut-être mal choisi -, du moins leur situation actuelle.

Les contrats de travail des personnes employées dans ces associations relèvent des dispositions de droit privé, et nombre de ces contrats sont à durée indéterminée. Or, pour l'heure, les règles statutaires de la fonction publique, territoriale et de l'Etat, ne permettent pas la conclusion de contrats à durée indéterminée. En effet, les personnels en question ne peuvent que bénéficier de la durée de contrat de droit public de droit commun la plus favorable, soit trois ans au maximum, renouvelables par reconduction expresse, selon l'article 3 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984.

Il peut être procédé à des adaptations marginales et de caractère exceptionnel. En particulier, deux mesures ont été arrêtées pour prendre en compte la situation particulière des personnels des associations dont l'objet et les moyens sont ainsi transférés dans leur intégralité à une collectivité territoriale : elles font l'objet de l'article 63 de la loi n° 99-506 du 12 juillet 1999 et de l'article 9 de la loi n° 2001-2 du 3 janvier 2001.

L'article 63 de la loi du 12 juillet 1999 précitée prévoit que les agents recrutés continuent à bénéficier des dispositions de leur contrat si celles-ci ne dérogent pas aux dispositions légales et réglementaires régissant les agents non titulaires de la fonction publique territoriale.

Il est apparu par ailleurs nécessaire d'aller plus loin dans le cas particulier d'associations actives, notamment, dans le domaine médico-social, et assurant depuis une période antérieure aux premières lois de décentralisation des tâches d'intérêt général transférées aux collectivités par lesdites lois. Ainsi, l'article 9 de la loi n° 2001-2 du 3 janvier 2001 s'applique aux personnes bénéficiant d'un contrat de travail à durée indéterminée conclu avant le 3 janvier 2001 avec une association créée avant le 31 décembre de l'année du transfert effectif des compétences prévu dans les lois du 2 mars 1982 et du 22 juillet 1983.

A condition que le domaine d'activité de ladite association relève des compétences tranférées, son objet et ses moyens sont tranférés dans leur intégralité à la collectivité territoriale concernée. Dans ce cas unique, ces agents peuvent conserver le bénéfice de leur contrat à durée indéterminée.

Une nouvelle modification de la réglementation portant extension des mesures exceptionnelles nécessite une expertise approfondie, compte tenu de son impact prévisible sur la construction statutaire actuelle, et, si l'on comprend tout à fait la pertinence de votre question, madame le sénateur, on voit bien les conséquences que peut entraîner la solution que vous envisagez.

Vous avez soulevé le cas très concret de l'association Val Enfance Valenciennes ; je suis bien entendu prêt à examiner avec vous ce que nous pouvons faire en la matière. D'ores et déjà, j'ai souhaité porter une attention particulière à cette problématique lors de la préparation de la loi sur la fonction publique territoriale qui est en cours d'élaboration.

J'espère qu'ensemble nous allons pouvoir apporter des réponses concrètes à une situation que vivent nombre d'élus locaux.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard.

Mme Valérie Létard. Les précisions que vient d'apporter M. le ministre et le souci qu'il a exprimé de réfléchir à cette question et d'y apporter une réponse dans un avenir très proche me donnent satisfaction.

- page 3651

Page mise à jour le