Question de M. CHARASSE Michel (Puy-de-Dôme - SOC) publiée le 26/06/2003

La suite de l'intention manifestée par une dame magistrat en disponibilité, ancien juge d'instruction au tribunal de grande instance de Paris, de publier un livre consacré à un procès en cours alors même qu'elle a participé de très près à l'instruction et que ce procès n'est pas encore achevé, et à la suite de ses déclarations selon lesquelles il n'y aurait pas lieu de s'émouvoir de cette attitude, M. Michel Charasse demande à M. le garde des sceaux, ministre de la justice, s'il envisage de faire aménager les locaux des palais de justice afin de pouvoir mettre à la disposition des usagers du service public de la justice une petite galerie commerciale où les magistrats les moins à cheval sur les principes pourront librement installer un stand ou un banc pour y faire petit commerce de leurs productions personnelles, littéraires, musicales, théâtrales, y compris les droits dérivés, agricoles, industrielles, artisanales, type travaux d'aiguilles ou de crochet, sans oublier naturellement la reproduction de pièces originales de dossiers de justice secrets ou de procès verbaux d'interrogatoire non publiables, et s'il envisage de proposer au Parlement une modification de la loi afin qu'aucune juridiction n'ait désormais le droit de se mettre en travers de la liberté du commerce qui doit pouvoir bénéficier aux magistrats comme à tous les citoyens.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 04/09/2003

Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire qu'il a lu avec intérêt le texte de la question écrite qui, sous l'apparence de l'humour, porte sur le délicat problème de l'éthique des magistrats. Avant d'en venir à cette question qui est au coeur des préoccupations du garde des sceaux, il convient de relever que la suggestion de l'honorable sénateur de créer une galerie commerciale dans l'enceinte des palais de justice renouerait avec l'histoire. C'est en effet sous Philippe Le Bel que le Palais de justice de Paris s'est vu doté d'un poste de " concierge " autorisé à louer des emplacements du Palais à des commerçants dans ce qui deviendra la " galerie mercière ", puis la galerie marchande, encore identifiée sous cette appellation aujourd'hui. Les marchands ont cependant cessé d'être autorisés à exercer leur activité dans l'enceinte du palais de justice depuis le xixe siècle et l'honorable parlementaire ne souhaite probablement pas rétablir un usage ancestral qui constituerait une régression peu compatible avec l'exercice serein de la justice. Ce propos, qui a pour seule ambition de situer la question parlementaire dans un contexte historique, ne saurait faire oublier combien le garde des sceaux a la volonté de respecter l'institution judiciaire ainsi que les magistrats et fonctionnaires qui participent au service public de la justice et qu'il ne prendra aucune initiative qui serait de nature à porter atteinte au crédit de l'institution judiciaire. Très attentif aux comportements qui pourraient se révéler fautifs, il assure l'honorable parlementaire de sa détermination à faire diligenter des procédures à caractère disciplinaire, en application du statut de la magistrature, le cas échéant. Par ailleurs, le garde des sceaux tient à rappeler que, pour mieux répondre aux besoins de l'institution, il a annoncé le 16 mai 2003, à la suite de la mise en examen d'un haut magistrat, la création d'une commission d'éthique de la magistrature, qui a été créée dès le 28 mai. Cette instance est présidée par Jean Cabannes, premier avocat général honoraire de la Cour de cassation, ancien membre du Conseil constitutionnel. Elle comprend quatre personnalités qualifiées et sept magistrats. Lors de son installation le 5 juin 2003, le garde des sceaux a indiqué qu'elle devrait " faire des propositions très concrètes en termes d'organisation du travail, de préparation des carrières des magistrats, d'organisation du pouvoir disciplinaire, de relations entre la Chancellerie et le Conseil supérieur de la magistrature et en termes de principe du fonctionnement du secret de l'instruction ". Cette commission doit rendre ses conclusions le 15 novembre 2003.

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