Question de M. RICHERT Philippe (Bas-Rhin - UMP) publiée le 02/10/2003

M. Philippe Richert attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales sur le récent décret n° 2003-285 du 24 mars 2003, relatif à la production de sapins de Noël. Ce décret organise la production de sapins de Noël, qui doit désormais répondre à un certain nombre de conditions : densité de plants à l'hectare, hauteur maximale, durée maximale d'occupation des sols, distances de plantation... Dans la mesure où les terrains plantés en sapins de Noël sont considérés comme étant de nature agricole, ils échappent à la réglementation des boisements, mise en place par certaines communes depuis de nombreuses années maintenant, afin de garantir l'ouverture des paysages et des points de vue. Aussi il l'interpelle sur la nécessité de compléter ledit décret afin de prendre en compte la réglementation des boisements mise en place par les communes et de permettre que certaines zones soient totalement interdites à la production de sapins de Noël, afin de respecter le cadre paysager de ces dernières et de ne pas fermer certaines perspectives.

- page 6159


Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales publiée le 22/10/2003

Réponse apportée en séance publique le 21/10/2003

M. Philippe Richert. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question se rapporte au décret n° 2003-285 du 24 mars 2003 relatif à la production de sapins de Noël.

Ce décret dispose que la plantation d'essences forestières est considérée comme de la production de sapins de Noël, donc comme une production agricole, lorsqu'elle répond à un certain nombre de conditions : densité de plantations - entre 6 000 et 10 000 plants à l'hectare -, hauteur maximale de trois mètres, durée maximale d'occupation des sols de dix ans.

A partir du moment où cette production de sapins de Noël est considérée comme production agricole, elle échappe à la réglementation des boisements qui a été mise en place dans un certain nombre de communes.

Or la mise en place de cette réglementation obéit à des considérations très précises. En particulier, dans certains secteurs ruraux, elle a pour objet d'éviter le développement anarchique des forêts et la fermeture des espaces. Dans le parc naturel des Vosges du Nord, par exemple, nous devons lutter de façon très intense pour éviter que les vallées ne se ferment, que la qualité des cours d'eau ne se dégrade, en raison, précisément, de l'envahissement lié aux plantations de sapins de Noël.

Le travail considérable et difficile qu'a représenté la mise en place de cette réglementation des boisements est anéanti par le décret déjà cité. Je souhaite donc que ce décret puisse être complété de manière à prendre en compte les endroits où s'applique actuellement une réglementation des boisements, car il est nécessaire que certaines zones restent interdites aux plantations. Sinon, demain, une grande partie des secteurs qui restent ouverts sera gagnée par des plantations sauvages au titre de la production agricole.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Monsieur le sénateur, comme vous l'avez dit, le décret du 12 mars 2003 relatif aux plantations d'essences forestières et le décret du 24 mars 2003 relatif à la production de sapins de Noël mettent notamment en oeuvre le paragraphe II de l'article 30 de la loi d'orientation sur la forêt du 9 juillet 2001, qui a instauré un régime de déclaration annuelle de plantations pour les productions de sapins de Noël.

Ce régime spécifique de la réglementation des boisements et reboisements applicable aux sapins de Noël est justifié par le fait qu'il s'agit d'une production à court terme et non d'une plantation constitutive d'une occupation du sol de longue durée.

Ainsi, si ces productions ne relèvent pas des interdictions ou réglementations des boisements et reboisements, elles sont toutefois encadrées par les règles techniques fixées par le décret du 24 mars 2003 : la hauteur des sapins ne peut excéder trois mètres et la durée d'occupation du sol ne peut dépasser dix ans, terme auquel le producteur doit couper les sapins et remettre les terres en état de culture.

Ces règles visent notamment à éviter la pérennisation de boisements inopportuns qui compromettraient, comme vous l'avez dit, monsieur le sénateur, l'ouverture des vallées et la protection des perspectives paysagères.

Pour garantir le respect de ces règles, il a été prévu que les producteurs procédant à des cultures d'arbres de Noël en infraction avec une ou plusieurs des conditions techniques prescrites pourront voir leurs plantations détruites d'office par le préfet, après mise en demeure, en application de l'article R. 126-10 du code rural.

Les représentants des producteurs de sapins de Noël, qui sont à l'origine de cet amendement parlementaire à la loi d'orientation sur la forêt dont est issu ce nouveau régime, se sont engagés à faire une application raisonnée de la liberté de planter que leur ménagent ces nouvelles règles et à éviter de procéder à des plantations ou replantations qui susciteraient des inconvénients graves sur le plan écologique ou paysager.

Il sera donc procédé, monsieur le sénateur, à une évaluation permanente de ce dispositif dans chaque département concerné ainsi qu'à une évaluation globale à l'issue d'une première période de mise en oeuvre de trois ans, afin d'en apprécier les impacts et d'examiner s'il doit ou non être remis en cause.

Pour avoir participé, les uns et les autres, au débat sur la loi d'orientation sur la forêt de 2001, nous savons l'origine de ce régime et la nécessité d'en suivre l'application avec une particulière attention et une grande vigilance.

M. le président. La parole est à M. Philippe Richert.

M. Philippe Richert. Je vous remercie, monsieur le ministre, pour ces précisions et pour l'attention que vous portez à ce sujet qui, contrairement à ce que l'on pourrait croire, n'est pas secondaire.

Dans les secteurs fragiles, dans les secteurs aujourd'hui en proie à l'envahissement des surfaces par la forêt, la préservation de l'ouverture des paysages constitue une lutte de tous les jours. Or, malheureusement, nous constatons tous les ans que, malgré les engagements pris, un nombre considérable d'espaces plantés ne sont pas remis en état.

Le suivi que vous évoquez, monsieur le ministre, doit donc être particulièrement attentif et assorti des moyens adéquats, afin, d'une part, de ne pas laisser aux communes la charge de relever l'ensemble des distorsions observées et, d'autre part, de permettre aux services de l'Etat de faire preuve d'une sévérité exemplaire en cas d'infraction. (M. Raymond Courrière s'exclame.)

En effet, à défaut d'une telle sévérité, toutes les promesses faites seraient vaines. Or, il serait dommage que, dans les parcs naturels notamment, les politiques définies en commun par l'Etat et les collectivités locales soient mises à mal par des autorisations contrevenant à l'actuelle réglementation des boisements.

Je vous remercie, monsieur le ministre, de rester attentif à ce dossier qui fait l'objet de nombreuses discussions au sein des associations départementales des maires.

- page 6868

Page mise à jour le