Question de M. PEYRONNET Jean-Claude (Haute-Vienne - SOC) publiée le 02/10/2003

M. Jean-Claude Peyronnet attire l'attention de M. le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche sur les restrictions budgétaires subies par le budget de l'éducation nationale et sur les conséquences qui en découlent pour le personnel enseignant affecté au centre de la Mémoire d'Oradour-sur-Glane. Dans le cadre de la création de cet établissement public administratif, et compte tenu des missions et activités qui lui sont assignées, le département de la Haute-Vienne a établi, avec le rectorat, un partenariat qui repose sur la volonté de reconnaître le centre comme lieu de connaissance historique et d'apprentissage à la citoyenneté : ce partenariat a donné naissance en décembre 1999 à un service éducatif au sein même de cet établissement public. Le service éducatif du centre de la Mémoire d'Oradour-sur-Glane était doté, jusqu'à la rentrée précédente, d'enseignants totalisant 18 heures de décharge hebdomadaire et il n'est pas trop dire qu'à ce jour, celui-ci a pleinement atteint les objectifs qui lui étaient fixés, puisqu'au titre de l'année 2002, 12 600 élèves ont bénéficié des activités pédagogiques dispensées par l'ensemble de ces professionnels. La réduction de deux tiers de la dotation d'heures de détachement de professeurs auprès de cet établissement apparaît donc inacceptable à l'heure où l'éducation à la citoyenneté se veut être une priorité énoncée par le ministère : les arguments tenant à l'effort national que chacun doit consentir ne sauraient être pertinents eu égard à la persistance de disparités entre académies. L'équité ne constitue manifestement pas le levier de cette politique académique. Dès lors, il souhaiterait que le ministre lui apporte des assurances quant à la volonté de conduire une politique qui ne soit pas attentatoire à l'une des missions essentielles du service public éducatif et qu'en conséquence le centre de la Mémoire d'Oradour-sur-Glane soit doté de moyens à la hauteur de ses missions.

- page 6159


Réponse du Ministère délégué à l'enseignement scolaire publiée le 22/10/2003

Réponse apportée en séance publique le 21/10/2003

M. Jean-Claude Peyronnet. Ma question concerne le centre de la mémoire d'Oradour-sur-Glane que j'ai, par ailleurs, l'honneur de présider.

Ce centre construit il y a quelques années et inauguré par le Président de le République, a évidemment des objectifs tout à fait louables : accueillir le public pour sauvegarder la mémoire du village martyr et de ses 642 morts, et pratiquer une sorte de militantisme de la paix.

Jusqu'à l'an passé, le ministère de l'éducation nationale était associé de façon efficace au fonctionnement du centre, par le biais d'une convention avec le rectorat. Ce centre bénéficiait alors d'un détachement d'enseignants d'histoire pour une durée totale de 18 heures.

Ce partenariat avec le rectorat a produit des effets tout à fait bénéfiques, puisque environ 13 000 enfants - qui ne sont d'ailleurs pas tous originaires de la Haute-Vienne, bien au contraire - ont bénéficié au cours de l'année des activités pédagogiques dispensées par les enseignants détachés, en association avec le personnel propre du centre.

Or, depuis cette année, les restrictions budgétaires ont entraîné une réduction drastique - de 18 heures à 6 heures - des horaires des personnes détachées, qui sont difficilement conciliables avec le souci affiché pourtant par le ministère de l'éducation nationale de pratiquer une éducation à la citoyenneté.

Dès lors, je voudrais savoir si le ministère maintiendra son attitude ou si je peux espérer que les choses évolueront pour en revenir à la situation antérieure.

Je précise qu'il s'agit moins d'un problème financier que d'une question de principe. En effet, les enseignants détachés éduquent les enfants sur la Seconde Guerre mondiale dans son ensemble. En outre, le centre de la mémoire, propriété du département, est voisin des ruines du village, qui, classées monument historique, sont la propriété de l'Etat.

La visite du centre de la mémoire constitue donc une préparation à la visite des ruines elles-mêmes. Autrement dit, les deux lieux sont intimement liés, et il n'est donc pas du tout anormal que le ministère de l'éducation nationale s'implique dans cette affaire.

Par ailleurs, la subvention d'équilibre - versée par le département que je trouve tout à fait légitime puisqu'il s'agit d'un service public - est de l'ordre de 350 000 euros. Celle de l'Etat, correspondant à un détachement d'enseignants de 18 heures, devrait s'élever, si je fais un calcul rapide, à environ 30 000 euros, soit 10 % à peu près de la participation départementale. Or l'Etat ne verse actuellement que 10 000 euros.

Monsieur le ministre, je souhaiterais connaître votre position sur le rétablissement de ces heures de détachement, qui me paraissent légitimes, utiles et qui témoignent d'un partenariat efficace entre une collectivité locale et le Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire. Monsieur le sénateur, j'imagine que vous m'interrogez non seulement en tant que sénateur, mais aussi en tant que président du conseil général de la Haute-Vienne.

Votre question porte sur les moyens mis à disposition par le ministère de l'éducation nationale pour le centre de la mémoire d'Oradour-sur-Glane.

Depuis la création du centre, en 1999, le ministère de l'éducation nationale, par le biais de l'académie de Limoges, a apporté de façon tout à fait volontaire une très forte contribution au fonctionnement du service éducatif de ce centre, en instaurant un détachement de 18 heures-poste hebdomadaires, soit 648 heures effectives. C'était bien normal, compte tenu de l'importance des objectifs assignés à cette structure et de la nécessité de lui apporter, en période de démarrage, une assise favorable à un développement harmonieux inscrit dans la durée.

Cet effort a un coût pour l'éducation nationale : l'investissement s'est élevé, jusqu'à la fin de cette année scolaire, à plus de 200 000 euros.

Les résultats obtenus à ce jour, grâce aux efforts de toutes les parties prenantes, montrent le bien-fondé de notre démarche : le service éducatif du centre a acquis un rayonnement certain, mérité, ainsi que la stabilité, gage de sa pérennité.

A la rentrée 2003, l'académie de Limoges a été conduite, comme beaucoup d'autres, à restituer 59 postes sur 5 016, afin d'apporter sa contribution à la correction des disparités entre les académies. Ce dispositif bien connu a été pratiqué par tous les gouvernements, en particulier par celui qui nous a précédés, pour accompagner la montée démographique des académies accueillant de nouveaux élèves, et à l'inverse, pour diminuer le nombre de postes dans les académies connaissant une diminution du nombre des élèves.

Ce retrait est accompagné d'un redéploiement académique portant sur 49 autres postes, afin d'offrir une assise budgétaire aux personnels affectés au remplacement qui n'en disposaient pas jusque-là. Une telle démarche d'orthodoxie budgétaire assure une meilleure maîtrise des moyens et contribue à la réduction du déficit, comme l'Etat s'y est engagé.

En conséquence, des rééquilibrages ont été opérés, avec la plus grande équité, entre les différentes composantes de la politique académique. C'est ainsi que les moyens accordés, en un premier temps, au service éducatif du centre de la mémoire s'élèvent pour l'année 2003 à 216 heures effectives, soit l'équivalent de 6 heures-poste hebdomadaires.

Je reconnais bien volontiers, comme vous l'avez dit, monsieur Peyronnet - et ce n'est pas la peine de tourner autour du pot ! -, que ce volume est en diminution par rapport aux années précédentes ; cependant, il place aujourd'hui encore le service éducatif du centre au tout premier rang, et très nettement, de tous les sites et musées de l'académie qui sont aidés, puisqu'il reçoit à lui seul 17 % de la totalité des moyens attribués à l'ensemble des services éducatifs soutenus par l'académie.

L'effort du ministère de l'éducation nationale reste donc important ; il est justifié et montre l'intérêt que nous accordons au service éducatif du centre de la mémoire.

Il est à noter aussi que les élèves qui fréquentent le centre sont accompagnés par leurs professeurs qui, grâce aux travaux pédagogiques réalisés par le service éducatif attaché au centre, sont tout à fait en mesure d'assurer l'exploitation pédagogique de leur visite.

Il faut savoir, de plus, que le « pôle Mémoire » académique, qui s'appuie sur toutes les structures ayant cet objectif, y compris sur le centre de la mémoire, bénéficie, en sus des moyens déjà mentionnés, de 216 heures effectives.

Toutefois, parce que nous conduisons une politique active d'éducation à la citoyenneté, nous avons fait étudier la possibilité de renforcer encore cette dimension au sein du service éducatif du centre de la mémoire.

D'autres pistes sont donc explorées, comme la mise à disposition partielle d'un professeur de philosophie, afin qu'il apporte son concours à l'animation de la réflexion des élèves sur les thèmes, par exemple, du devoir de mémoire ou de la barbarie. La rectrice de Limoges qui étudie cette possibilité m'a confirmé qu'il devrait en être ainsi.

Monsieur le sénateur, en dehors de toute polémique, vous pourrez donc constater que nous répondons à vos voeux et que le Gouvernement continue à porter le plus grand intérêt au centre de la mémoire d'Oradour-sur-Glane.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet.

M. Jean-Claude Peyronnet. Monsieur le ministre, votre réponse ne peut pleinement me satisfaire. Certes, le concours d'un professeur de philosophie est intéressant, mais, pour des élèves de CM 1 ou de CM 2, cela représente un intérêt plus limité que l'apport de professeurs formés à l'histoire et qui l'enseignent.

Je rappelle une fois encore que l'Etat lui-même est concerné, puisque la visite du centre est le prélude à une autre visite, celle du monument historique que constituent les ruines du village.

Monsieur le ministre, je vais vous poser une question quelque peu impertinente à laquelle vous voudrez bien me répondre par écrit.

D'après le rectorat, le musée du Président à Sarran disposerait, comme le centre de la mémoire d'Oradour-sur-Glane, d'un détachement d'enseignants pour une durée de 6 heures. Lorsque mon assistante a interrogé, sans se nommer, le musée du Président sur ce sujet, il lui a été répondu très gentiment qu'il s'agissait en réalité d'un détachement de 18 heures.

Monsieur le ministre, pouvez-vous donc me confirmer, par écrit, que le musée du Président, dont l'intérêt pédagogique est évident... (Sourires sur les travées du groupe socialiste), bénéficie d'une situation meilleure que celle du centre de la mémoire d'Oradour-sur-Glane ?

- page 6872

Page mise à jour le