Question de M. DÉSIRÉ Rodolphe (Martinique - RDSE-R) publiée le 23/10/2003

M. Rodolphe Désiré attire l'attention de M. le Premier ministre sur la question de l'évolution institutionnelle en cours aux Antilles. Concernant tout d'abord la décision n° 2003-474 DC rendue le 17 juillet dernier par le Conseil constitutionnel, saisi par les députés socialistes de la loi de programme pour l'outre-mer, il souhaiterait connaître la position du Gouvernement sur le respect du principe d'égalité entre la Corse et l'outre-mer en matière de continuité territoriale. En effet, pour expliquer qu'il n'y a pas violation de ce principe, le " considérant " 24 de cette décision énonce que " par sa situation géographique et son régime statutaire, la collectivité de Corse ne se trouve pas, eu égard à l'objet de la loi déférée, dans la même situation que les collectivités régies par les articles 72-3 et suivants de la Constitution ". Outre l'invocation énigmatique de la géographie pour justifier l'attribution d'une dotation supérieure à un territoire situé à 160 kilomètres de l'Hexagone, l'expression ici utilisée semble établir de façon claire que les départements d'outre-mer, énumérés dans l'article 72-3 de la Constitution, ne sont plus dans le droit commun. L'on peut comprendre les considérations économiques sous-jacentes à la décision du Conseil constitutionnel, mais l'utilisation de l'argument statutaire est extrêmement préoccupante. Cela signifie-t-il que, contrairement à ce qui a été dit par le Gouvernement lors des débats entourant la révision constitutionnelle du 28 mars dernier, les nouveaux articles 72-3, 72-4 et 73 de la Constitution ne garantissent pas aux départements d'outre-mer l'égalité législative avec la métropole ? Si par ailleurs les électeurs de la Guadeloupe et de la Martinique optaient, lors de la consultation prévue le 7 décembre prochain, pour un changement de statut, c'est-à-dire pour la création d'une collectivité nouvelle se substituant au département et à la région comme le préconisent les " Congrès des élus départementaux et régionaux ", n'irions-nous pas vers une plus grande différenciation, qui rendrait définitivement caduque la notion de droit commun ? Il a été dit par certains responsables politiques que répondre " non " à la proposition du " Congrès " effacerait toute possibilité d'évolution. Cela ne correspond-il pas à une tentative de manipuler l'opinion publique, et ne consulter les électeurs antillais que sur la proposition du " Congrès " ne serait-il pas tronquer le débat ? Il me semble que la question de l'évolution institutionnelle ne sera véritablement posée que si elle porte sur les quatre voies que permet désormais la Constitution rénovée du 28 mars 2003 ; le statu quo intégral ; le maintien du département et de la région avec fusion des deux conseils en une assemblée unique ; la suppression du département et de la région remplacées par une nouvelle collectivité sui generis ; le passage au régime de la spécialité législative de l'article 74. D'autre part, la création d'une nouvelle collectivité, entraînant la suppression du département, n'impliquerait-t-elle pas la révision de l'article 299-2 du traité d'Amsterdam, qui vise actuellement " les départements français d'outre-mer " ? Une telle réécriture présente de toute évidence un risque dans le contexte de l'élargissement de l'Europe que nous connaissons. Plus généralement, la tendance qui prévaut actuellement aux Antilles, consistant à " faire une croix sur la collectivité départementale, n'est-elle pas en contradiction avec le discours prononcé par le Président de la République à Rodez le 18 octobre 2001 ? Il y affirmait en effet qu'" à l'heure où les Français sont en attente de plus de démocratie et de plus de proximité, la France ne saurait rayer d'un trait de plume deux siècles de progrès des libertés locales accomplis dans le cadre départemental. (...) Le département est devenu le plus fidèle soutien des maires dans la poursuite du développement local. (...) Ma conviction est faite depuis longtemps. Facteur irremplaçable d'enracinement de la démocratie dans le territoire, le département reste incontournable. Il lui demande s'il peut l'éclairer sur ces différents points, si possible avant le 7 décembre, afin que les enjeux de la consultation soient clairs et que les électeurs antillais se prononcent en connaissance de cause, à partir des quatre options possibles.

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Transmise au Ministère de l'outre-mer


La question a été retirée pour cause de fin de mandat.

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