Question de M. RICHERT Philippe (Bas-Rhin - UMP) publiée le 30/04/2004

Question posée en séance publique le 29/04/2004

M. Philippe Richert. Je voudrais interroger le Gouvernement sur une question grave pour nos entreprises, pour l'économie de notre pays et dangereuse pour la croissance : il s'agit de la crise de l'acier.

Depuis quatre ans, le prix du métal n'a cessé d'augmenter et le problème s'est encore amplifié depuis le début de l'année : entre janvier et avril, la hausse a été de 20 à 30 %. Cette crise touche le secteur de la métallurgie, mais également celui de la mécanique, du bâtiment et des travaux publics. La raison principale en est connue : avec une croissance annuelle de l'ordre de 10%, la Chine procède à des importations massives de matières premières, ce qui déséquilibre le marché mondial et engendre une flambée des prix.

En outre, il faut ajouter les tensions générées au niveau du transport maritime par l'envolée des tarifs, qui ont pour certains augmenté de plus de 600 %.

Depuis peu émerge la crainte d'une pénurie de matières premières, ayant comme conséquence logique la paralysie de l'outil de production. Pour mieux illustrer mon propos, je prendrai l'exemple de la société Bruder-Keller, qui emploie 130 personnes dans mon département dans la sous-traitance de la tôlerie fine. Elle est l'une des cinq grandes tôleries de France et exporte la moitié de sa production, essentiellement vers l'Allemagne, mais aussi hors de l'Union européenne, notamment dans le nucléaire.

Le prix de la tonne d'acier, matière première principale de l'entreprise, est passé de 460 euros au début de l'année à plus de 600 euros actuellement. Les conséquences sont évidemment dramatiques pour cette société qui ne peut pas répercuter ces hausses sur ses clients. En effet, les commandes de matières premières passées fin 2003 et début 2004 ne sont plus honorées intégralement, les fournisseurs ayant réduit les quotas de livraison. Si l'entreprise n'arrive pas à se réapprovisionner, elle ne sera plus en situation de produire à partir du mois de mai.

L'ensemble des pays occidentaux est concerné par ce lourd problème et nous devons nous organiser, tant au niveau de notre pays qu'au sein de l'Europe, pour soutenir nos entreprises et ne pas fragiliser la croissance.

Monsieur le ministre, nos sociétés attendent des mesures. Pouvez-vous nous dire ce qui a déjà été entrepris et quelles perspectives pouvez-vous nous donner pour ce secteur d'activité en plein désarroi ?

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Réponse du Ministère délégué à l'industrie publiée le 30/04/2004

Réponse apportée en séance publique le 29/04/2004

M. Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie. Monsieur le sénateur, le problème que vous posez est dû en effet à l'augmentation très forte de la consommation chinoise, qui a conduit à un renchérissement des prix de l'ordre de 25 à 30 % depuis le début de l'année, voire, pour certains produits, en particulier dans le bâtiment, de 50 % ! Il s'agit d'un problème de prix, mais aussi d'un problème d'approvisionnement.

Pour ce qui est du prix, les entreprises doivent prendre l'habitude de passer des contrats de longue durée qui les prémunissent contre les évolutions erratiques des prix.

J'en viens à la question, plus compliquée, de l'approvisionnement. Que faisons-nous ? Tout d'abord, Nicolas Sarkozy a écrit au commissaire européen Pascal Lamy (Exclamations sur les travées du groupe socialiste)...

M. Didier Boulaud. Nous sommes sauvés ! C'est David Copperfield, on ne peut plus vivre sans lui !

M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Il est de la vocation du ministère des finances et de la responsabilité du Gouvernement de faire face à une situation de crise. (Mouvements d'approbation sur les travées de l'UMP.) Ces problèmes concernent l'ensemble de la nation et sont suffisamment préoccupants pour ne pas devenir un sujet de plaisanterie, car ils fabriquent des chômeurs ! Il est scandaleux de se moquer de cette situation à laquelle nous devons faire face.

Nous avons écrit à Pascal Lamy parce que, en cas de pénurie, nous pouvons demander la levée provisoire d'un certain nombre de contingentements et de quotas à l'égard de pays de l'Est. J'ai reçu par exemple le ministre de l'industrie du Kazakhstan ; ce pays est disposé à nous livrer de l'acier. Si la Commission européenne veut bien se saisir de ce problème, nous pourrons agir.

Nous pouvons également baisser les droits antidumping dont les producteurs d'acier étrangers font l'objet puisqu'il s'agit de rétablir l'équilibre du marché.

M. Didier Boulaud. On ferme les usines les unes après les autres ! On peut arrêter le carnage !

M. Patrick Devedjian, ministre délégué. En outre, des actions contentieuses au niveau de l'Union Européenne doivent être conduites devant l'Organisation mondiale du commerce, car des actions de cartel et des actions spéculatives ont probablement été menées.

Au plan national, nous avons mobilisé les DRIRE afin qu'elles apportent une assistance individuelle à chacune de nos entreprises en difficulté...

M. René-Pierre Signé. Cela, c'est efficace !

M. Patrick Devedjian, ministre délégué. ... et qu'elles essaient, dans la mesure du possible, de leur trouver un approvisionnement, y compris par des recours au plan international.

M. Didier Boulaud. Dans le même temps, on ferme des aciéries, cela aide !

M. Patrick Devedjian, ministre délégué. J'ai par ailleurs mobilisé la DGCCRF pour enquêter sur le point de savoir si des ententes conduisant à une spéculation se sont produites, ce qui constitue une infraction.

S'agissant de la société Bruder-Keller que vous avez citée, monsieur le sénateur, elle est d'ores et déjà en contact avec la DRIRE, qui s'occupe notamment des questions d'approvisionnement. Quant aux prix, la situation est plus difficile et il est sans doute possible de progresser en matière de couverture à terme.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur le ministre !

M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je pense que les problèmes d'approvisionnement peuvent être résolus au plan international.

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