Question de M. GODEFROY Jean-Pierre (Manche - SOC) publiée le 10/11/2004

M. Jean-Pierre Godefroy attire l'attention de Mme la ministre de la défense sur une disposition particulière du régime des ouvriers de l'Etat qui interdit, pour les ayants droit, le cumul d'une pension de réversion et d'une rente pour faute inexcusable de l'employeur. Depuis quelques mois, la caisse des dépôts et consignations (CDC) procède à la révision des pensions d'un certain nombre de veuves d'anciens ouvriers de l'Etat sur les fondements de l'article 31 du décret n° 65-836 du 24 septembre 1965. Dans ce cadre, un certain nombre de pensions ont ainsi été suspendues et la CDC demande, par ailleurs, le remboursement de sommes trop perçues ; ces sommes sont parfois très importantes et correspondent à des périodes parfois anciennes (au-delà même du délai de prescription de deux ans). Non seulement, ces actions fragilisent la situation de ces veuves mais il apparaîtrait également que seul le fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels de l'Etat interdirait ce cumul. En conséquence, il lui demande pourquoi le fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels de l'Etat est soumis à cette disposition particulière ; il lui demande également de bien vouloir considérer la possibilité d'un effacement ou d'un allègement de la dette dans la mesure où l'erreur ne vient pas des personnes concernées mais des services qui ont ordonné ces pensions.

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Réponse du Ministère délégué à l'industrie publiée le 22/12/2004

Réponse apportée en séance publique le 21/12/2004

M. Jean-Pierre Godefroy. Je souhaite attirer l'attention de Mme le ministre de la défense sur une disposition particulière du régime des ouvriers de l'Etat, qui interdit pour les ayants droit le cumul d'une pension de réversion et d'une rente pour faute inexcusable de l'employeur.

Après avoir été saisi du dossier d'une personne de mon département, j'ai fait quelques recherches, et il apparaît qu'un certain nombre de personnes sont dans une situation similaire à la sienne : la plupart d'entre elles sont des veuves d'anciens ouvriers de l'Etat touchés par l'amiante.

De quoi s'agit-il exactement ?

Depuis quelques mois, la Caisse des dépôts et consignations procède à la révision des pensions d'un certain nombre de veuves d'anciens ouvriers de l'Etat sur les fondements de l'article 31-1 du décret n° 65-836 du 24 septembre 1965. En effet, cette disposition interdit le cumul d'une pension de réversion et d'une rente pour faute inexcusable de l'employeur.

Au cours de mes recherches, je me suis rendu compte que ce décret a été abrogé, après avoir été codifié. Pour autant, c'est toujours ledit article 31-1, et non l'article idoine du code, que la Caisse des dépôts et consignations vise dans ses différents courriers.

Dans ce cadre, un certain nombre de pensions ont ainsi été suspendues et la Caisse des dépôts et consignations demande, par ailleurs, le remboursement de sommes trop perçues. Ces dernières sont parfois très importantes et correspondent à des périodes parfois anciennes qui vont au-delà même du délai de prescription de deux ans.

Non seulement ces actions fragilisent la situation des ces veuves, mais il apparaîtrait également que seul le fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels de l'Etat interdirait ce cumul.

Monsieur le ministre, ma question est simple : le fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels de l'Etat est-il vraiment le seul à être soumis à cette disposition particulière, et pour quelle raison ?

La rente pour faute inexcusable de l'employeur est attribuée par une décision des tribunaux de sécurité sociale, alors que la pension est un droit acquis après une carrière parfois difficile. Elles ne sont pas de même nature ! Pourquoi, dès lors, un avantage accordé par une décision de justice viendrait-il plafonner un droit acquis ?

Je vous demande également, monsieur le ministre, de bien vouloir considérer la possibilité d'un effacement ou d'un allègement de la dette des personnes concernées, dans la mesure où l'erreur ne provient pas d'elles mais des services qui ont ordonné ces pensions.

Monsieur le ministre, je vous remercie par avance de votre réponse.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie. Monsieur Godefroy, cette question concerne le cas particulier des veuves d'anciens ouvriers de l'Etat qui cumulent une pension de réversion et une rente pour faute inexcusable de l'employeur ou pour accident du travail et dont le montant total de la rente et de la pension de réversion dépasse 50 % des émoluments de base.

Les dispositions de l'article 31 du décret du 24 septembre 1965, reprises par les articles 48 et 49 du décret du 5 octobre 2004 pour les ouvriers de l'Etat, limitent en effet à 50 % des émoluments de base le montant total des sommes perçues.

Ces dispositions ne sont cependant pas spécifiques aux ouvriers de l'Etat puisqu'elles ont été définies par analogie avec celles qui sont applicables aux fonctionnaires, conformément aux dispositions des articles L. 28 et L. 38 du code des pensions civiles et militaires de retraite, modifié par la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites.

Il est effectivement arrivé que, lors de la mise en place de la rente et de la pension de réversion, les dépassements éventuels de ce seuil de 50 % ne soient pas immédiatement identifiés.

Le ministère de la défense a donc mis en place, en janvier 2003, une procédure spécifique pour éviter que de telles situations ne se produisent.

S'agissant toutefois des cas signalés, il est légitime que la Caisse des dépôts et consignations, gestionnaire du fonds spécial des pensions, réclame un trop-perçu lorsqu'elle constate un dépassement, même a posteriori. La retenue porte alors exclusivement sur la pension de réversion, puisque la rente est incessible et insaisissable.

La Caisse des dépôts et consignations étant un organisme indépendant, le ministère de la défense ne peut pas l'obliger à alléger, voire à annuler le recouvrement de la dette correspondant au trop-perçu.

Il appartient donc à chaque personne de faire une demande circonstanciée auprès de la Caisse des dépôts et consignations, qui est autorisée, par l'article 41 du décret du 5 octobre 2004, à procéder à une remise gracieuse de la dette.

Lorsque la demande lui semble fondée, le ministère de la défense appuie systématiquement ces requêtes auprès de la Caisse des dépôts et consignations.

Il faut enfin noter que, dans des cas exceptionnels récents - comme ceux des veuves des ouvriers de l'Etat tués lors de l'attentat de Karachi, par exemple -, le ministère de la défense a obtenu que cette limitation à 50 % des émoluments de base soit levée.

Il est donc possible, par le procédé que je viens de vous indiquer, avec le soutien du ministère de la défense et la remise gracieuse de la Caisse des dépôts et consignations, de pallier cet inconvénient.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.

M. Jean-Pierre Godefroy. Je remercie M. le ministre de sa réponse et je prends acte de cette possibilité qui est offerte aux victimes.

Permettez-moi cependant deux observations.

D'une part, le décret de 1965 a été pris avant que l'on connaisse les dégâts occasionnés par l'amiante.

D'autre part, en ce qui concerne les victimes de l'attentat de Karachi, que je connais bien puisque certaines d'entre elles résident dans ma commune, il y a eu un rehaussement du plafond.

Il serait souhaitable d'appliquer des mesures identiques aux victimes de l'amiante. En effet, les dégâts de l'amiante dans la construction navale sont extrêmement importants. C'est certainement l'un des secteurs les plus touchés ! Lorsque l'on réclame à une veuve, dont la pension s'élève à 16 000 euros par an, des remboursements de 20 000 euros sur deux mois, cela peut créer de véritables drames financiers...

Il faudrait donc certainement revoir les dispositions applicables aux victimes de l'amiante, et je ne manquerai pas de prendre contact avec ces personnes pour suivre l'évolution de la procédure.

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