Question de Mme TASCA Catherine (Yvelines - SOC) publiée le 14/12/2004

Mme Catherine Tasca souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur les conséquences de la mise en oeuvre du plan de prévention des risques d'inondation pour les collectivités locales. A la suite des inondations qui ont frappé la France ces dernières années, notamment dans le Midi et dans la Somme, le gouvernement a adopté un dispositif, le plan de prévention des risques d'inondation. Ce PPRI, mis en oeuvre par les services de la préfecture dans chaque département, consiste, dans les faits, à délimiter dans les communes concernées des zones à risques qui sont frappées d'interdit de construire ou sont constructibles sous certaines conditions. Si ce principe de précaution est tout à fait légitime, la mise en oeuvre opérationnelle des PPRI peut poser des problèmes d'aménagement du territoire et de développement économique très lourds pour beaucoup de communes. Ainsi, dans le département des Yvelines, sur les rives de la Seine, cinquante-sept communes sont dans l'obligation d'intégrer ce plan. Or, certaines voient par là leurs projets de développement fortement remis en cause. Ainsi, si le PPRI était appliqué en l'état, la commune d'Achères devrait renoncer à la construction d'un collège et d'une école maternelle. En outre, la mise en oeuvre du plan global d'aménagement des zones situées en bord de Seine induit un surcoût financier que la ville ne peut prendre intégralement à sa charge. Autre exemple, la commune de Meulan, pour laquelle la taxe professionnelle ne représente que 10 % de ses ressources, verrait le coût de son projet de construction d'un centre commercial augmenter de 50 %. Une grande partie de la commune serait classée en zone rouge, donc totalement inconstructible. Face à ce problème qui touche de nombreuses collectivités territoriales en France et dans son département, elle demande au gouvernement quelles dispositions rapides il entend prendre pour atteindre un meilleur équilibre entre le nécessaire principe de précaution et le développement économique des communes, et quelles compensations financières il est en mesure de leur apporter.

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Transmise au Ministère de l'écologie et du développement durable


Réponse du Ministère de l'écologie et du développement durable publiée le 02/02/2005

Réponse apportée en séance publique le 01/02/2005

Mme Catherine Tasca. Monsieur le ministre, je souhaite appeler votre attention sur les conséquences de la mise en oeuvre du plan de prévention des risques d'inondation pour les collectivités locales.

A la suite des inondations dramatiques qui ont frappé la France ces dernières années, notamment dans le Midi et dans la Somme, le Gouvernement a adopté un dispositif : le plan de prévention des risques d'inondation. Ce PPRI, mis en oeuvre par les services de la préfecture dans chaque département, consiste, dans les faits, à délimiter dans les communes concernées des zones à risques, qui sont frappées d'interdit de construire ou qui sont constructibles sous certaines conditions.

Si ce principe de précaution est tout à fait légitime, la mise en oeuvre opérationnelle des PPRI pose souvent des problèmes d'aménagement du territoire et de développement économique : celui-ci devient très coûteux pour beaucoup de communes.

Dans le département des Yvelines, sur les rives de la Seine, 57 communes sont dans l'obligation d'intégrer ce plan. Or certaines voient ainsi leurs projets de développement fortement remis en cause.

Si le PPRI était appliqué en l'état, la commune d'Achères, pare exemple, devrait renoncer à la construction d'un collège et d'une école maternelle, équipements qui lui sont indispensables. En outre, la mise en oeuvre du plan global d'aménagement des zones situées en bord de Seine induit un surcoût financier que la ville ne peut prendre intégralement à sa charge.

Je citerai dans le même ordre d'idées la commune de Meulan dont le produit de la taxe professionnelle ne représente encore que 10 % des ressources. Avec le PPRI, elle verrait augmenter de 50 % le coût de son projet de construction d'un centre commercial dont elle attend un nécessaire accroissement de ressources. Devra-t-elle y renoncer ? Une grande partie de la commune serait en effet classée en zone rouge, donc totalement inconstructible. Il n'est pas contestable que la prise en compte, tout à fait nécessaire, des risques d'inondation est intervenue bien tardivement. La responsabilité en incombe au moins autant, sinon plus, à l'Etat.

On ne peut accepter que les charges qui en découlent et, bien souvent, le bouleversement de projets d'aménagement conçus parfois depuis de nombreuses années, viennent handicaper trop lourdement ces collectivités.

Face à ce problème qui touche de nombreuses collectivités territoriales en France, notamment dans mon département, quelles dispositions rapides entendez-vous prendre pour atteindre un meilleur équilibre entre le nécessaire principe de précaution et les exigences du développement économique des communes ? Que proposez-vous pour une meilleure concertation avec elles ? Quelles compensations financières êtes-vous en mesure de leur apporter ?

L'Etat ne peut se soustraire à ses obligations de solidarité territoriale !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Serge Lepeltier, ministre de l'écologie et du développement durable. Madame la sénatrice, vous m'avez interrogé sur les conséquences de la mise en place des plans de prévention des risques sur le développement économique des collectivités territoriales.

Permettez-moi de rappeler que les plans de prévention des risques, les fameux PPR, ne font pour l'essentiel que tirer les conséquences réglementaires obligatoires d'une situation de risque. Or la situation de risque, comme le devoir pour l'Etat et les collectivités de protéger les biens et les personnes, existe indépendamment du PPR.

Sur le plan strictement juridique, un PPR est une servitude d'utilité publique. Compte tenu de ses objectifs d'intérêt général liés à la sécurité des personnes et des biens, il n'ouvre pas droit à indemnisation.

Au-delà de ces éléments de contexte, l'Etat, conscient des difficultés rencontrées localement, a fait procéder à un certain nombre d'évolutions législatives qui vont dans le sens d'un meilleur accompagnement des PPR auprès des collectivités.

Le Gouvernement vient de publier le décret permettant la mise en place d'un financement spécifique, notamment pour les études et les travaux de prévention sur les communes dotées d'un PPR. De même, ce décret permet, s'agissant des biens existants, de subventionner les mesures de réduction de la vulnérabilité prescrites par un plan de prévention des risques. Le Gouvernement a ainsi déjà apporté des réponses concrètes aux questions financières que vous soulevez.

Par ailleurs, une concertation renforcée et une plus grande association des collectivités devraient permettre à ces dernières de participer plus activement à l'élaboration des PPR, donc de mieux faire valoir leurs contraintes d'aménagement, indéniables et souvent importantes.

En ce qui concerne votre département, le PPR « inondation » de la Seine et de l'Oise est actuellement en cours d'élaboration ; il n'a pas encore été soumis à la consultation officielle des cinquante-sept conseils municipaux concernés.

Le projet vise à prendre en compte dans l'aménagement de ces communes le risque d'inondations lié à une crue de la Seine analogue à celle de 1910, tout en préservant les possibilités de développement économique locales.

Il reprend les principes retenus pour l'élaboration des autres PPR d'Ile-de-France. Ces principes visent, je le rappelle, à préserver les champs d'expansion des crues sur les rares secteurs encore disponibles, à maintenir le lit majeur partout où c'est encore possible afin de faciliter l'écoulement d'une crue éventuelle, et à éviter d'augmenter la population dans les zones d'aléa fort et très fort.

La crue de la Seine est, certes, lente, mais le nombre de personnes qui pourraient être touchées, environ 880 000, est tel que les secours ne pourraient se consacrer qu'aux situations les plus critiques.

Cependant, de tels principes visent également à autoriser la construction dans les centres urbains, quel que soit l'aléa, afin de maintenir les capacités de développement de l'Ile-de-France.

La poursuite du projet de PPR « inondation » dans le département des Yvelines sera effectuée par les services de l'Etat sous la responsabilité du préfet, en étroite concertation, comme vous le souhaitez, avec les communes concernées, afin de concilier la nécessaire prise en compte du risque d'inondation et leurs contraintes de développement. C'est d'ailleurs dans cet esprit que je me rendrai tout prochainement dans le département des Yvelines, à l'invitation de votre collègue Jacques Myard.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Tasca.

Mme Catherine Tasca. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse.

Non seulement vous soulignez l'inéluctabilité des mesures de précaution - il n'est évidemment pas dans l'esprit des élus des Yvelines de se soustraire à cette nécessaire prévention de risques majeurs -, mais vous rappelez également la lourdeur des charges financières qui peuvent découler de la mise en oeuvre des plans de prévention et les conséquences qu'elles ne manqueront pas d'avoir.

Je retiens donc, monsieur le ministre, que vous veillerez vous-même, tout particulièrement, à ce qu'une concertation réelle et approfondie ait lieu entre la préfecture des Yvelines et les élus des cinquante-sept communes concernées.

Par ailleurs, je relève que, bien que il ne s'agisse pas juridiquement d'indemnisations, il est possible de travailler sur des financements spécifiques pour épauler les collectivités locales, qui auront évidemment à tirer les conséquences de l'adoption du plan. Mais, je le répète, le plus important pour nous reste que ce plan soit réellement élaboré en profonde concertation avec les élus locaux.

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