Question de M. SOUVET Louis (Doubs - UMP) publiée le 09/12/2004

M. Louis Souvet attire l'attention de M. le ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie sur la coopération en matière juridique, d'enseignement et de développement du droit français et relaye les préoccupations dans ce domaine de M. le Président de l'Union internationale des avocats quant à la mise au point des règles juridiques à l'échelle européenne : " la commission von Bar ne travaille qu'en anglais alors qu'ils s'agirait de poser les bases d'un code civil à l'échelle européenne ". Les pouvoirs publics comme les citoyens doivent bien intégrer qu'il s'agit d'un enjeu beaucoup plus large que la sphère linguistique, à savoir les bases juridiques qui ne sont absolument pas identiques entre Common Law et droit romain-germanique. La langue française permet, comme l'illustre la Déclaration des droits de l'homme de partir de principes généraux pour en déduire des règles d'application. Ce qui sur un plan juridique permet via l'unité de ces principes généraux, de sécuriser les rapports entre les agents économiques, de sorte que les notions juridiques sur lesquelles sont fondées les contrats s'appréhendent mieux autour de notions communes comprises par tous. Il demande si, d'une part, va bientôt être créée la fondation pour l'expansion du droit français et si, d'autre part, les pouvoirs publics entendent défendre la langue française comme langue de référence lors de la mise en place de la Constitution européenne. Ici les difficultés d'interprétation ne manqueront pas (23 langues). Le ou les versions de références seront primordiales quant à ces interprétations.

- page 2797


Réponse du Ministère de la coopération, du développement et de la francophonie publiée le 03/02/2005

L'honorable parlementaire appelle, à juste titre, l'attention du ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie sur l'intérêt que présentent pour notre pays la coopération en matière juridique, l'enseignement et la diffusion du droit français et, plus largement, du droit romano-germanique, tant en Europe que dans le reste du monde. Il importe, en effet, de perfectionner le cadre juridique dans lequel les pays francophones se développent car les entreprises ont, de ce fait, l'assurance qu'elles peuvent s'appuyer sur un code d'investissement adéquat et une protection suffisante. C'est ainsi qu'avec un soutien important du gouvernement français, l'Organisation pour l'harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA) s'emploie à favoriser, dans l'esprit du droit romano-germanique l'émergence de textes de loi, d'une jurisprudence et d'un arbitrage permettant de faire reconnaître des sentences exécutoires sur le territoire des seize pays membres. Par ailleurs le français, langue juridique et langue des droits de l'homme, a servi, dans de nombreux pays, l'expression des principes de l'Etat de droit. Pour favoriser l'enracinement de la démocratie, la France a soutenu la création de réseaux regroupant des instances juridictionnelles au sein de l'espace francophone : ACCPUF (association des cours constitutionnelles ayant en partage l'usage du français) ; AHJUCAF (association des hautes juridictions de cassation francophones) ; AFCNDH (association francophone des commissions nationales de promotion et de protection des droits de l'homme) ; AISCUF (association des institutions supérieures de contrôle ayant en commun l'usage du français) ; AOAHJF (association ouest-africaine des hautes juridictions francophones) ; AOMF (association des ombudsmans et médiateurs francophones) ; CIB (conférence internationale des barreaux de tradition juridique commune) ; UFIRC (union francophone des instances de régulation de la communication). La conférence de Brazzaville a décidé de réunir ces réseaux afin de renforcer les structures gouvernementales chargées des droits de l'homme dans l'espace francophone. Comme le souligne l'honorable parlementaire, l'enjeu de la diffusion du droit français ou romano-germanique est un enjeu plus large que le domaine de la langue. Aussi bien la France, qui l'a créé, soutient financièrement et pratiquement, par la mise à disposition de locaux et de moyens de fonctionnement, l'Institut international de droit d'expression et d'inspiration française (IDEF). Le gouvernement français, aux côtés de l'Agence de la francophonie, appuie toutes les missions de cet institut qui a regroupé dès 1964 les juristes africains, puis les juristes issus d'autres Etats des cinq continents où le français est langue de communication ou communément utilisée dans le domaine juridique et enfin, plus récemment, des pays européens où l'influence du droit français est ancienne tels que la Bulgarie, la Hongrie, la Moldavie, la Pologne, la Roumanie ou la République tchèque. Dans le souci de bâtir, au-delà même de l'espace francophone, un cadre plus sûr pour la bonne gouvernance, la circulation des personnes, le commerce, les transports et toutes transactions humaines, le Gouvernement finance la traduction d'ouvrages de droit français, en particulier le code civil dont une très large diffusion, par la mise en ligne et des actions de formation, a été assurée à l'étranger à l'occasion de son bicentenaire. Lors de cette célébration, et afin d'accompagner la réforme des institutions judiciaires, le ministère des affaires étrangères, en coordination avec le ministère de la justice, Acojuris et l'Ecole nationale de la magistrature, a organisé à Doha, les 12 et 13 octobre 2004, une conférence régionale sur la justice dans le monde arabe, où le français et l'arabe étaient langues de travail, et diffusé un fascicule bilingue franco-arabe sur l'expertise juridique française. D'autre part, le Gouvernement, aux côtés de l'Agence de la francophonie, met en place des projets de formation continue en faveur de professionnels du droit exerçant en Afrique, en Asie du Sud-Est et en Europe centrale et orientale. S'agissant spécifiquement des structures européennes, où la France préserve la place singulière du français en défendant en toutes circonstances un plurilinguisme maîtrisé, des sessions de formation linguistique à l'intention de groupes de juristes-linguistes des institutions européennes sont organisées dans le cadre du plan pluriannuel pour le français dans l'Union européenne.

- page 296

Page mise à jour le