Question de M. MARC François (Finistère - SOC) publiée le 21/01/2005

Question posée en séance publique le 20/01/2005

M. François Marc. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Le 17 octobre 2004, à l'occasion de la Journée mondiale du refus de la misère, le Sénat a tenu à exprimer sa préoccupation en accueillant dans l'hémicycle une délégation de 310 jeunes de l'association ATD Quart Monde.

L'inquiétude ne peut manquer de s'accentuer lorsque l'on prend connaissance des derniers résultats du BIP 40, le baromètre des inégalités et de la pauvreté, publiés en décembre dernier. Cet indicateur synthétique que le Réseau d'alerte sur les inégalités calcule chaque année depuis 1970 fait en effet apparaître qu'un record historique des inégalités et de la pauvreté a été atteint dans notre pays.

A vrai dire, le constat ne peut surprendre si l'on regarde du côté du réseau associatif, des Restos du Coeur à Médecins du Monde, où l'activité augmente d'au moins 10 % par an

Contestant les chiffres aseptisés de l'INSEE, les économistes les plus avertis estiment que le nombre de pauvres en France est aujourd'hui non pas de 3,5 millions mais de 6 millions de personnes, et le président d'Emmaüs France ajoute que « bon nombre des ceux qui sont au-dessus du seuil de pauvreté ne s'en sortent plus ».

Monsieur le Premier ministre, face à ce constat alarmant, les déclarations compassionnelles du Gouvernement ne peuvent nous satisfaire. La responsabilité de ce dernier est en effet manifeste dans la situation constatée.

M. Jean Bizet. Et Jospin ? (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Didier Boulaud. Cela fait trois ans que l'on vous subit !

M. le président. Laissez l'orateur s'exprimer !

M. François Marc. Depuis 2002, tous les indicateurs de mesure de la précarité sont en effet en hausse : le RMI compte ainsi 250 000 allocataires supplémentaires tandis que le nombre d'enfants vivant dans la misère a doublé.

Selon le BIP 40, l'année 2003 a connu une véritable explosion de la pauvreté. Cette aggravation sans précédent ne s'explique pas seulement par une conjoncture médiocre ; elle est aussi le fruit d'une politique économique et sociale - la vôtre - défavorable à l'emploi et source d'inégalités accrues.

M. René-Pierre Signé. Eh oui !

M. André Rouvière. Et encore, on ne parle pas du commerce extérieur !

M. François Marc. Monsieur le Premier ministre, en mai prochain, cela fera dix ans que Jacques Chirac, élu Président de la République, se promettait de « réduire la fracture sociale ».

M. Didier Boulaud. Parlons-en !

M. François Marc. Le résultat est aujourd'hui accablant avec ce triste record de l'indice des inégalités et de la pauvreté.

M. le président. Monsieur Marc, posez votre question !

M. François Marc. Si on me laisse la poser ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. André Rouvière. Il est sans cesse interrompu !

M. François Marc. Monsieur le Premier ministre, malgré la situation financière et budgétaire très alarmante dans laquelle votre action a conduit notre pays, votre gouvernement envisage aujourd'hui de répondre à la demande de M. Chirac en baissant de 13 milliards d'euros les recettes provenant des contribuables les plus aisés grâce à une baisse de 20 % de l'impôt sur le revenu d'ici à 2007.

M. Didier Boulaud. Eh oui !

Plusieurs sénateurs de l'UMP. La question !

M. François Marc. La question est simple, monsieur le Premier ministre (Ah ! sur les travées de l'UMP) : alors qu'il y a tant à faire pour soulager la misère, n'estimez-vous pas qu'une telle décision est en totale contradiction avec l'objectif sans cesse réaffirmé de réduction de la fracture sociale en France ?

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Réponse du Ministère déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion publiée le 21/01/2005

Réponse apportée en séance publique le 20/01/2005

Mme Nelly Olin, ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion. Mesdames, messieurs les sénateurs, la pauvreté nous concerne tous et doit tous nous mobiliser. Je pense que nul sur les travées de votre assemblée ne se réjouit de la constater, mais je me permets de vous rappeler qu'elle ne date pas d'aujourd'hui.

M. Alain Gournac. Non, en effet !

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. Sans vouloir faire référence à l'« héritage » (Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC),...

M. Jacques Mahéas. La nostalgie !

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. ... je vais simplement vous dire, parce que cela semble vous avoir échappé, quelles sont les actions menées par le Gouvernement : ce ne sont ni des promesses ni des paroles, ce sont des actions concrètes et largement financées.

M. Didier Boulaud. On connaît la Chiraquie !

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. Il n'aurait cependant pas dû vous échapper que le SMIC a été revalorisé de 11 %...

M. Alain Gournac. Eh oui !

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. ... alors que, du temps du gouvernement Jospin, l'augmentation s'était établie à 0,29 %, ce qui n'est pas une gloire !

M. Didier Boulaud. Ce sont des mensonges !

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. En 1999, vous avez « réussi » à construire 39 000 logements sociaux alors qu'il en fallait de 80 000 à 100 000. Dans le cadre du plan de cohésion sociale, nous allons construire 80 000 logements en 2005 pour atteindre le chiffre de 500 000 en 2009.

M. Bernard Piras. Payés par qui ?

Mme Nicole Bricq. Et l'argent ?

M. Didier Boulaud. Vous ne savez plus quoi dire : vous êtes en train de faire les poubelles !

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. Si ma réponse ne vous intéresse pas, ne l'écoutez pas, mais laissez-moi au moins répondre à la personne qui m'a questionnée ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

S'agissant de l'accès à l'emploi dont vous faites des gorges chaudes,...

M. Didier Boulaud. C'est du baratin !

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. ... nous ne nous sommes pas contentés de faire des « stages parking » pour les jeunes : nous leur offrons un avenir et des emplois durables.

M. Didier Boulaud. Donnez-nous des chiffres !

M. René-Pierre Signé. Ils ne sont pas bons !

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. Vous n'en avez pas fait autant ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Ces actions s'accompagnent d'un volet financier de 425 millions d'euros sur cinq ans, notamment pour les structures d'insertion par l'économie que vous avez laissées complètement exsangues.

M. Didier Boulaud. Nous sommes sur le terrain, nous ! Nous savons de quoi nous parlons !

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. Vous avez beaucoup parlé de social, mais vous avez peu agi. Gardez donc vos leçons, nous n'en avons vraiment pas besoin ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Didier Boulaud. Allez-le dire aux associations !

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. Le tarif social de EDF concernera 1,5 million de ménages. Si cela ne vous intéresse pas, cela intéresse en tout cas les ménages que nous allons faire bénéficier d'une réduction, ce que vous n'aviez pas fait ! (M. Didier Boulaud s'exclame.)

Le soutien aux associations de lutte pour l'insertion a représenté 185 millions d'euros en 2004, et la déductibilité des dons en leur faveur est passée de 66 % à 75 %.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. On sait ce que cela veut dire !

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. Quant à l'aide alimentaire, et ceci va vous toucher...

M. Didier Boulaud. A l'estomac !

M. Bernard Piras. Vous fabriquez la pauvreté !

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. ... elle s'est élevée en 2004 à 18 millions d'euros. Voulez-vous le chiffre pour 2001 ?

M. Alain Gournac. Oui !

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. Il est lamentable : 8 millions d'euros ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Alain Gournac. Eh oui !

M. Jacques Mahéas. Bien sûr : il y avait moins de RMIstes !

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. A ces 18 millions d'euros se sont ajoutés 10 millions d'euros pour les produits carnés.

Pour l'hébergement d'urgence, dont vous avez tant parlé,...

M. le président. Veuillez conclure, madame la ministre !

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. ... vous n'avez rien fait, alors que nous allons créer 10 000 places d'ici à 2007 et y consacrer 525 millions d'euros. (M. Bernard Piras s'exclame.)

M. Didier Boulaud. Des promesses !

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. Quant à la CMU, la couverture maladie universelle, elle permet depuis le 1er janvier aux personnes les plus défavorisées l'accès aux soins.

M. Yannick Bodin. Promesse, promesse...

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. Aussi, mesdames et messieurs les sénateurs de l'opposition, vous qui avez gouverné la France pendant des années...

M. Didier Boulaud. Pour vous, cela ne va plus durer longtemps !

M. Jacques Mahéas. Profitez-en !

M. Alain Vasselle. Du calme !

Mme Nelly Olin, ministre déléguée. ...et qui l'avez laissée dans une situation catastrophique, vous ne devriez pas être aussi indécents dans vos propos !

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