Question de M. FALCO Hubert (Var - UMP) publiée le 24/02/2005

M. Hubert Falco appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les dysfonctionnements possibles des modalités d'application de l'article 432-14 du code pénal. Par un jugement du 13 janvier 2005, le tribunal correctionnel de Draguignan, a condamné personnellement tous les membres du précédent conseil municipal de Ramatuelle pour avoir voté, les 24 et 30 mai 2000, deux délibérations décidant notamment de n'attribuer à personne un lot d'exploitation du domaine public de la plage de Pampelonne. Chaque élu, au titre du mandat municipal qu'il assumait en 2000, est condamné à verser une amende de 1 000 euros et 500 euros de dommages et intérêts au plaignant, pourtant visé dans l'exercice de son activité commerciale, par de nombreuses infractions à la loi et de troubles à l'ordre public. Le processus qui a abouti à cette condamnation des quinze membres du conseil municipal, majorité et opposition comprises, pour des décisions adoptées à l'unanimité dans le seul intérêt public, a révélé comment le dispositif légal institué par l'article 432-14 peut fonctionner comme un piège pour les élus comme pour toutes les personnes visées par cet article. Ainsi, toute personne faisant valoir son intérêt personnel a la possibilité de faire condamner d'honnêtes citoyens agissant dans le cadre de leur mandat électif ou de leur fonction, et dans l'intérêt de la collectivité. Il lui demande par conséquent de bien vouloir lui indiquer s'il lui semble que le dispositif pénal est bien à même de mettre un élu local à l'abri des pressions extérieures et lui permettre l'exercice de son mandat électif avec toute la sérénité requise.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 19/05/2005

Le garde des sceaux, ministre de la justice est en mesure de fournir à l'honorable parlementaire les éléments suivants : dans le cas d'espèce évoqué, le 19 octobre 1999, le conseil municipal de Ramatuelle a organisé une procédure destinée à la réattribution des lots de la plage de Pampelonne. Suite à une plainte avec constitution de partie civile, une information judiciaire du chef de favoritisme a été ouverte. Les membres du conseil municipal ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel de Draguignan et ont été condamnés à 1 000 euros d'amende pour favoritisme. Le tribunal a estimé qu'il y avait eu une méconnaissance des règles applicables en matière de marchés publics et a fait application de l'article 432-14 du code pénal. Ce jugement a été frappé d'appel par les prévenus et le ministère public, il n'est donc pas définitif. S'agissant d'une procédure en cours, il n'appartient pas au garde des sceaux d'intervenir ou de porter des appréciations sur les décisions judiciaires ou les magistrats qui les ont rendues. Tout en étant sensible à la question de la sécurisation des décisions prises par les élus, le garde des sceaux rappelle cependant que l'article 432-14 du code pénal s'inscrit tant un effort de moralisation de la vie politique et économique que dans un souci de respect de la concurrence. Il appartient donc à l'élu de respecter la procédure, quelles que puissent être les situations l'ayant poussé à écarter tel ou tel candidat, sous peine de laisser prise au soupçon et de remettre en cause la transparence nécessaire en la matière. Par ailleurs, le garde des sceaux rappelle que par décrets du 7 janvier et du 26 novembre 2004, le code des marchés publics a été modifié de manière à assouplir les règles en laissant aux décideurs une plus grande marge d'appréciation avec notamment un relèvement des seuils. Cette réforme d'importance permet ainsi aux collectivités locales de passer des marchés sans formalités préalables jusqu'à 230 000 euros. Elle assouplit également certaines exigences administratives. La chancellerie a de plus sensibilisé le ministère public à ces nouvelles règles par une circulaire en date du 22 février 2005. L'ensemble de ce dispositif devrait permettre de répondre aux attentes des élus en la matière.

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