Question de M. ASSOULINE David (Paris - SOC) publiée le 17/06/2005

Question posée en séance publique le 16/06/2005

M. David Assouline. Monsieur le Premier ministre, en janvier dernier, le chef de l'Etat s'engageait à ce que le projet de loi, qui allait devenir la loi « Fillon », mobilisât « l'ensemble de la communauté éducative, mais aussi les parents et l'Etat tout entier, parce que c'est l'avenir de notre pays qui est en jeu ».

Cette loi a, en effet, mobilisé un grand nombre de nos concitoyens, mais contre elle ! Le projet de loi a été délibéré dans l'urgence, y compris parlementaire, ce dont votre gouvernement est apparemment conscient, puisque, à peine installé rue de Grenelle, M. de Robien annonçait le report de l'examen des textes d'application pour permettre « un deuxième tour de concertation ».

Mais, monsieur le Premier ministre, si second tour il doit y avoir, quand a eu lieu le premier ?

Certainement pas dans les prétoires des tribunaux correctionnels de ce pays, qui ont vu et voient encore défiler des jeunes gens comme Samuel Morville...

M. Josselin de Rohan. C'est un voyou ! Il crache à la figure des commissaires !

M. Jean-Marc Todeschini. Ecoutez l'orateur !

M. David Assouline. ...qui ont manifesté publiquement leur désapprobation à l'égard d'un texte que le Gouvernement se refusait d'amender dans le dialogue !

Vous pouvez me répondre que certains ont été trop loin, oubliant que d'autres peuvent saccager le bureau d'une ministre sans être vraiment inquiétés !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il y a d'autres voyous !

M. David Assouline. Mais, souvenez-vous ! Vous étiez ministre de l'intérieur lorsque ces lycéens ont choisi la manifestation de masse, pacifique et bon enfant, le 8 mars à Paris, et qu'ils ont été agressés avec une extrême violence par des bandes de plusieurs centaines de « cogneurs », sans que les forces de l'ordre, présentes en nombre, aient su les protéger et garantir leur droit républicain de manifester. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Jean-Marc Todeschini. On va faire du bruit, nous aussi, tout à l'heure !

M. David Assouline. Qu'avez-vous fait pour arrêter et punir ces « cogneurs » ? Votre majorité n'est-elle pas prête à étouffer la vérité et à empêcher la transparence en bloquant notre demande de commission d'enquête parlementaire, invoquant, quatre mois après, des informations judiciaires inexistantes ? (M. Josselin de Rohan proteste.)

Ces jeunes lycéens ont été poussés à choisir d'autres moyens d'action, pour rester visibles...

M. Jean-Marc Todeschini. Et voilà !

M. David Assouline. ...et pour amener le Gouvernement à la négociation que vous reconnaissez utile aujourd'hui. Ils ne doivent donc pas faire les frais d'une situation dans laquelle vous admettez avoir une part de responsabilité.

Etes-vous prêt, et ce serait à votre honneur, à vous déclarer solennellement, sans interférer sur le cours indépendant de la justice, contre la « criminalisation » de ces jeunes ?

M. Josselin de Rohan. Ce sont des voyous, des casseurs !

M. David Assouline. C'est un message fort que je vous demande d'adresser à un jeune lycéen de ce pays...

M. le président. Concluez, monsieur Assouline !

M. David Assouline. ...qui, pour la première fois s'est occupé des affaires de la cité en participant à un mouvement collectif, ... (Vives protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Josselin de Rohan. C'est un voyou !

M. David Assouline. ...animé de générosité mais aussi d'angoisse pour son avenir, quand d'autres ne s'occupent trop souvent que de leurs petits « business ».

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Retirez les plaintes !

M. David Assouline. Il a été cogné par des voyous alors qu'il manifestait pacifiquement, ... (Brouhaha sur les travées de l'UMP.)

M. le président. C'est terminé, monsieur Assouline !

M. Josselin de Rohan. Assis !

M. David Assouline. ...devant des forces de l'ordre inertes !

M. le président. C'est terminé, monsieur Assouline ! M. Gilles de Robien va vous répondre.

M. David Assouline. J'ai été interrompu ; il me reste dix secondes !

M. le président. Vous vous êtes exprimé pendant trois minutes, monsieur Assouline, alors que vous ne disposiez que de deux minutes trente !

M. Jean-Marc Todeschini. Laissez-le formuler sa question !

M. David Assouline. Il me reste une phrase !

M. le président. Une phrase !

M. David Assouline. Dites-lui que l'Etat et la société ne lui claquent pas la porte au nez ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

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Réponse du Ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche publiée le 17/06/2005

Réponse apportée en séance publique le 16/06/2005

M. Gilles de Robien, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le sénateur, depuis que l'on m'a confié la charge du ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de l'enseignement supérieur, je me suis efforcé d'organiser la concertation la meilleure, le dialogue et l'échange avec les représentants de la communauté éducative, ainsi que l'a demandé le Premier ministre lors de son discours de politique générale.

Je me suis déjà entretenu avec les fédérations de parents d'élèves et je recevrai les représentants et les syndicats de lycéens dès la semaine prochaine.

Cette concertation est, à mes yeux, la seule méthode pour permettre à l'école d'évoluer au profit de la société tout entière et, en premier lieu, des jeunes, qui sont les meilleurs investissements de la nation.

Des manifestations ont eu lieu, au cours desquelles des messages très importants ont été envoyés, des revendications ont été exprimées, des propositions même ont été faites.

Mme Hélène Luc. Absolument !

M. Gilles de Robien, ministre. Certaines d'entre elles sont à l'étude et d'autres pourront être mises en oeuvre dès la rentrée prochaine.

Mais il s'est également produit, hélas ! des voies de fait sur des personnes et des dégradations de biens publics.

M. Ladislas Poniatowski. Bien sûr !

M. Gilles de Robien, ministre. Des plaintes ont été déposées.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et M. Guy Fischer. Et les paysans ?

Mme Hélène Luc. En d'autres occasions, les agriculteurs ont fait beaucoup plus !

M. Josselin de Rohan. Taisez-vous !

M. le président. On écoute le ministre !

M. Gilles de Robien, ministre. Des poursuites ont été engagées et des décisions judiciaires sont intervenues, qu'il n'appartient pas au ministre de l'éducation nationale de commenter.

En revanche, je peux vous dire que je me suis montré très attentif au fait que les lycéens poursuivis...

M. Guy Fischer. Il faut retirer les plaintes !

M. Gilles de Robien, ministre. ... qui avaient à passer les épreuves du baccalauréat puissent le faire dans des conditions normales, comme les autres candidats.

Maintenant, le temps du dialogue se poursuit. Croyez-le bien, monsieur le sénateur, je suis déterminé à le faire fructifier. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

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