Question de M. BIWER Claude (Meuse - UC-UDF) publiée le 22/09/2005

M. Claude Biwer attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur les perspectives que pourrait offrir le développement de la méthanisation agricole sur les plans économique et écologique : production d'énergie verte à partir de ressources renouvelables, limitation des gaz à effet de serre et solution alternative et locale pour le traitement des biodéchets. Alors que le biogaz est très développé dans certains pays européens grâce à des politiques volontaristes, en France, trois freins à son développement méritent d'être levés dans les meilleurs délais : faible prix de rachat de l'électricité ainsi produite par EDF, quasi-inexistence de filière et lourdeurs administratives. Alors qu'en région Lorraine huit projets pilotes sont en cours d'étude ou de réalisation, il le prie de bien vouloir préciser les initiatives que le Gouvernement compte prendre afin qu'à côté du nécessaire développement des biocarburants la filière biogaz fasse l'objet de la même sollicitude de la part des pouvoirs publics.

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Réponse du Ministère délégué aux relations avec le Parlement publiée le 18/01/2006

Réponse apportée en séance publique le 17/01/2006

M. Claude Biwer. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, comme vous le savez, la méthanisation a un triple intérêt pour la collectivité : produire de l'énergie verte à partir de ressources essentiellement renouvelables - la matière organique -, limiter les émissions de gaz à effet de serre et, enfin, proposer une solution alternative et locale pour le traitement des biodéchets.

L'agriculture française détient en réalité le plus gros potentiel de production de biogaz en Europe et il est généralement admis que le gisement d'énergie mobilisable pourrait atteindre de 3 millions à 4 millions de tonnes équivalent pétrole par an.

Mais, paradoxalement, c'est dans les autres pays européens que se développe cette énergie, comme j'ai pu le vérifier - je viens, vous le savez, d'un département frontalier - notamment en Allemagne, où 4 000 installations produisent du biogaz d'origine agricole, en Suisse ou au Danemark. Plus près de chez moi, au Luxembourg, plus précisément à Redange, la chaleur produite par une installation de méthanisation collective chauffe la piscine communale.

C'est aussi une manière de faire un peu revivre le monde agricole.

Quels sont les freins au développement de la méthanisation dans notre pays alors que l'on parle beaucoup d'économie d'énergie ? Ils tiennent essentiellement au prix de rachat de l'électricité produite par ces installations, qui est fixé à 5 centimes d'euro par kilowatt/heure alors qu'en Allemagne il est de 18 centimes d'euro.

Or il faut bien savoir que le prix de rachat français ne permet pas de rentabiliser cette filière dont les coûts d'investissement et les frais de fonctionnement sont très élevés. Dès lors, sans aller jusqu'au prix de rachat allemand, il semble qu'une revalorisation du prix français de l'ordre de 3 à 5 centimes d'euro permettrait d'assurer la rentabilité de ces installations et assurerait le développement de cette technique.

Ainsi, en Lorraine, huit projets pour la mise en place de sites pilotes de méthanisation sont prêts, mais ils ne pourront véritablement être opérationnels qu'à trois conditions : que le prix de rachat de l'électricité soit réévalué, que l'on mette en place une filière de production encore inexistante dans notre pays et que les pouvoirs publics prennent véritablement conscience de l'intérêt de cette technologie.

Au moment où cette filière pourrait figurer dans les pôles d'excellence rurale, je pense, monsieur le ministre, que votre esprit d'ouverture permettra au Gouvernement de tenir compte des considérations que je viens d'énoncer afin que, à côté du nécessaire développement des biocarburants, la filière biogaz fasse l'objet de la même sollicitude et qu'ainsi notre pays puisse combler l'immense retard qu'il a pris dans ce domaine.

Il n'y a pas, me semble-t-il, de petites économies dans cette filière. Au moment où nous parlons de plus en plus d'autonomie énergétique, c'est une chance à saisir pour notre agriculture, pour notre pays. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser M. Dominique Bussereau, retenu à Bruxelles, dont je vais m'efforcer de me faire le porte-parole sur ce dossier important.

La méthanisation agricole présente de nombreux intérêts économiques et écologiques, qui expliquent son développement dans plusieurs pays européens.

En France, le ministère de l'industrie est en train de revoir les conditions et les tarifs de rachat de l'électricité produite à partir de sources renouvelables. Les professionnels du secteur sont associés à ce travail et ont déjà eu l'occasion de souligner la situation défavorable du biogaz de méthanisation et de la méthanisation d'origine agricole.

Le ministère de l'agriculture suit avec beaucoup d'attention les travaux du ministère de l'industrie à ce sujet. Cette question a fait l'objet d'annonces de décisions communes lors de la table ronde des ministres de l'industrie et de l'agriculture, le 21 novembre dernier. Des décisions seront prises avant le 31 mars 2006, comme prévu par la loi d'orientation sur la politique énergétique du 13 juillet 2005. Une augmentation des tarifs de rachat concernant le biogaz de méthanisation et les petites installations est attendue, assortie de modifications des contrats de rachat.

En ce qui concerne la procédure d'autorisation des installations de méthanisation, le ministère de l'agriculture devrait prochainement travailler à l'adaptation de la réglementation en vue de faciliter cette démarche.

En outre, le ministère de l'agriculture envisage des mesures complémentaires pour les installations de méthanisation dans les exploitations agricoles. Ces mesures, associées aux aides locales de l'ADEME, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, et des conseils régionaux, ainsi qu'à la revalorisation des tarifs de rachat de l'électricité, devraient encourager la production de biogaz dans les exploitations agricoles françaises.

Enfin, il est à noter qu'un « Plan biocombustibles » sera présenté en avril 2006 par M. Claude Roy, coordonnateur interministériel pour la valorisation de la biomasse, placé auprès du ministre de l'agriculture et de la pêche. Ce plan visera à favoriser le développement des biocombustibles en France. A ce titre, il devrait comporter des mesures spécifiques en ce qui concerne le biogaz, et le biogaz d'origine agricole, ce qui me semble correspondre à vos préoccupations.

M. le président. La parole est à M. Claude Biwer.

M. Claude Biwer. Je remercie M. le ministre de cette réponse qui va dans le bon sens et nous redonne le moral.

C'est bien volontiers que nous accompagnerons la démarche de tous ceux qui sont en train, dans les différents ministères, de travailler à cette cause qui servira notre pays pour l'avenir.

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