Question de M. KRATTINGER Yves (Haute-Saône - SOC) publiée le 07/10/2005

Question posée en séance publique le 06/10/2005

M. Yves Krattinger. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre des transports.

Les autoroutes ont été construites par l'Etat et sont payées par les usagers.

M. Jean-Pierre Sueur. C'est vrai !

M. Yves Krattinger. Les sociétés concessionnaires sont rentables depuis 2002 seulement. En 2003, un large débat a eu lieu sur les besoins en infrastructures et sur leur financement. Le Parlement a pu s'exprimer. Et, en décembre 2003, le Gouvernement a célébré la naissance de l'Agence de financement des infrastructures de transport, qui doit apporter la part de l'Etat dans le financement de trente-cinq grands projets.

Pour conduire cette politique, le Gouvernement annonçait le même jour, à grand renfort de trompettes : « Cet établissement recevra notamment l'intégralité des dividendes des sociétés autoroutières. »

Où en sommes-nous aujourd'hui ?

La privatisation des sociétés d'autoroutes a été annoncée cet été. Amputée du produit des dividendes, juste retour de l'investissement financé par les usagers, cette agence devra, outre les trente-cinq grands projets, financer la part de l'Etat dans les contrats de plan et peut-être même la remise à niveau du réseau ferroviaire...

Malgré l'affectation à l'agence de la taxe d'aménagement du territoire et du produit des contraventions en provenance des radars, ses ressources ne lui permettront pas de financer le programme prévu. Il manquera plusieurs milliards d'euros sur la période 2005-2012, et beaucoup plus au-delà.

Un an et demi après sa création, vous tuez les capacités d'intervention de cette agence pour cacher la misère d'un budget plombé par votre politique.

M. Jacques Mahéas. Eh oui !

M. Yves Krattinger. Le Parlement n'a pas eu son mot à dire. Des critiques très sévères ont été émises, y compris au sein de la majorité. Vous avez cédé aux libéraux et préféré le très court terme aux intérêts du pays à long terme.

Quel besoin y a-t-il à privatiser les sociétés d'autoroutes ? Quelle sera la valeur ajoutée pour les usagers et pour la nation ? La maintenance du réseau sera-t-elle assurée malgré la recherche du profit immédiat qui prévaut généralement au niveau des actionnaires privés ? Y aura-t-il maintien de l'emploi dans ces entreprises ?

M. René-Pierre Signé. Non !

M. Yves Krattinger. Vous avez décidé de vendre l'avenir de notre pays sans nous consulter. Nous demandons un vrai débat suivi d'une décision du Parlement sur ce sujet qui préoccupe largement les Françaises et les Français ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie publiée le 07/10/2005

Réponse apportée en séance publique le 06/10/2005

M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le sénateur, vos voeux sont exaucés : il y aura effectivement un débat le 12 octobre au sein de la Haute Assemblée, où nous pourrons précisément apporter toutes les réponses à vos questions.

Mme Hélène Luc. Mais les décisions sont prises !

M. Jacques Mahéas. Et elles ne peuvent plus être remises en cause !

M. Thierry Breton, ministre. Ne me gâchez pas le plaisir de vous en annoncer déjà quelques-unes, sans déflorer ce que l'on dira au cours de ce débat !

Non, monsieur le sénateur, nous ne sommes pas des rentiers. Nous estimons qu'il vaut mieux que l'argent des Français soit investi pour créer de l'emploi, pour l'avenir et les infrastructures. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jacques Mahéas. Le calcul est mauvais !

M. Thierry Breton, ministre. Voilà précisément la raison pour laquelle le gouvernement de Dominique de Villepin a décidé de privatiser non pas les autoroutes, comme vous le dites, mais les concessions de services autoroutiers, les autoroutes restant la propriété des Françaises et des Français.

De plus, l'Agence de financement des infrastructures de transport recevra cette année non pas 1,5 milliard d'euros comme prévu, mais 4 milliards d'euros, ce qui portera le total de ses fonds à 12 milliards d'euros dans sept ans au lieu des quinze ans correspondant aux prévisions initiales, comme vous le constaterez au cours du débat du 12 octobre.

M. Jean-Pierre Sueur. Pourquoi organiser un débat si cela ne sert à rien ?

M. Thierry Breton, ministre. Ainsi, les fonds seront disponibles immédiatement pour améliorer la qualité de nos infrastructures.

Aux usagers du service autoroutier, je rappelle que l'Etat continuera à fixer les tarifs. Dix-huit offres nous sont parvenues sur la base du cahier des charges qui a été retenu. Nous écrirons avant la fin de la semaine à l'ensemble des soumissionnaires pour qu'ils nous proposent des offres fermes. La procédure se déroule sous la responsabilité d'une personnalité indépendante,

M. Roland Muzeau. Alors, tout va bien !

M. Thierry Breton, ministre. ...l'ancien secrétaire général de la commission bancaire.

M. Roland Muzeau. Je suis rassuré !

M. Yannick Bodin. Quelle indépendance !

M. Thierry Breton, ministre. Vous aurez donc tous les éléments de réponse, et c'est la France qui sortira gagnante. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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