Question de M. LAGAUCHE Serge (Val-de-Marne - SOC) publiée le 22/12/2005

M. Serge Lagauche souhaite attirer l'attention M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les restrictions apportées par la loi relative au traitement de la récidive des infractions pénales à la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades. Alors que cette dernière permettait aux personnes condamnées, quelle que soit la nature de la peine ou la durée de la peine restant à subir, de bénéficier d'une suspension de peine lorsqu'elles étaient atteintes d'une pathologie engageant le pronostic vital, la loi sur le traitement de la récidive a très fortement réduit la portée de cette mesure en en limitant l'application aux personnes incarcérées à l'encontre desquelles les magistrats estimeront qu'il n'y a pas de risque grave de renouvellement de l'infraction. Etant donné l'état déplorable des prisons françaises, dénoncé unanimement par l'Observatoire international des prisons dans son rapport du 20 octobre 2005 et par le commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, il se permet de lui rappeler que la loi du 4 mars 2002 a été votée à la quasi-unanimité par le Parlement au nom de la dignité humaine et du respect de l'individu. Loin d'avoir vidé les prisons de ses détenus, un nombre trop faible de personnes atteintes de pathologies lourdes ont au contraire pu bénéficier de ce texte et, alors qu'il était déjà intolérable de libérer les détenus malades dans les derniers jours de leur vie, il lui semble d'autant plus insupportable d'adresser à ces personnes un message de durcissement des conditions de suspension de leur peine. Aussi, il lui serait reconnaissant de bien vouloir lui indiquer quelles mesures il compte prendre pour éviter que cette restriction des conditions légales de suspension de peine pour cause thérapeutique n'entraîne une augmentation proportionnelle des décès en milieu carcéral.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 27/07/2006

Le garde des sceaux, ministre de la justice, a l'honneur de faire connaître à l'honorable parlementaire qu'il partage sa préoccupation en matière de suspension de peine pour raison médicale en faveur des personnes détenues lorsqu'elles sont atteintes d'une pathologie engageant leur pronostic vital. Il tient à rappeler, comme il l'a fait lors des débats parlementaires qui ont présidé au vote de la loi du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales, qu'il considère que la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades, instaurant la suspension de peine pour raison médicale, est une loi qui répond au principe du respect de la dignité humaine et qui a démontré son efficacité. La loi du 12 décembre 2005 a complété l'article 720-1-1 du code de procédure pénale par deux dispositions qui n'ont pas vocation à durcir ou limiter le champ d'application des possibilités d'octroi d'une suspension de peine pour raison médicale mais à élargir la liberté d'appréciation du juge en la matière. En effet, l'article 10 de la loi limite l'octroi du bénéfice de la mesure s'il existe un risque grave de renouvellement de l'infraction, prenant ainsi en compte la nécessité de protéger la société contre les grands criminels récidivistes qui, bien qu'en fin de vie, pourraient poursuivre en étant libres leurs activités criminelles. L'article 11 de la loi instaure une expertise médicale semestrielle car depuis la mise en application des dispositions de la loi du 4 mars 2002, il a été constaté plusieurs cas d'évolution favorable du pronostic vital et dès lors, il est légitime de s'interroger sur l'opportunité du maintien de la mesure. Ces modifications n'auront qu'un impact réduit sur le nombre de suspensions de peine accordées, les cas où subsisterait un risque de récidive devraient, en effet, rester exceptionnels. A cet égard, le bilan des suspensions de peine pour raison médicale fait état d'un taux de mesures accordées par rapport aux demandes présentées qui n'a cessé d'augmenter depuis l'entrée en vigueur de la loi du 4 mars 2002. Ainsi si ce pourcentage était inférieur à 45 % en 2002 et 2003, en 2005 le taux de demandes ayant obtenu satisfaction était de 69 % et l'entrée en vigueur des dispositions de la loi du 12 décembre 2005 n'a pas ralenti cette évolution favorable puisqu'au 1er trimestre 2006, le taux de demandes satisfaites s'est élevé à 77 %.

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