Question de Mme BOUMEDIENE-THIERY Alima (Paris - SOC-R) publiée le 20/01/2006

Question posée en séance publique le 19/01/2006

Mme Alima Boumediene-Thiery. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

Le Président de la République a clamé son intention de faire du handicap l'un des grands chantiers de son second mandat. La loi du 11 février 2005 a suscité l'espoir de milliers de familles, mais à cet espoir succède un désespoir grandissant !

Au nom de la décentralisation, cette loi instaure une série d'obligations nouvelles à la charge des départements, dont le versement de la prestation de compensation des conséquences du handicap. Or les fonds annoncés, dont ceux de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, sont, de l'avis même des conseils généraux, très insuffisants. Les enveloppes ont été affectées, mais les crédits ne sont toujours pas versés ! Quant au délai de traitement des dossiers pour le versement des prestations de compensation, il est de six mois ! À ce jour, les financements sont dérisoires au regard du nombre de personnes concernées et des nouveaux champs d'intervention.

Ainsi, depuis le 1er janvier, des maisons départementales du handicap ont ouvert leurs portes. Si les conseils généraux ont signé des conventions de constitution de groupement d'intérêt public, ces nouvelles structures fonctionnent a minima et se limitent à un accueil et à la mise en service d'un numéro vert, faute de transferts financiers suffisants.

En outre, plusieurs décrets n'ont toujours pas été publiés, ce qui rend, en réalité, certaines dispositions de la loi inapplicables, alors que cela fait presque un an qu'elle a été votée dans l'urgence.

Au désarroi des élus locaux s'ajoute la détresse des parents d'enfants en situation de handicap. Près de six mois après la rentrée scolaire, de nombreux enfants n'ont toujours pas trouvé leur place dans l'école proche de leur domicile. Certains parents sont obligés de parcourir jusqu'à cent kilomètres chaque jour pour permettre la scolarisation de leur enfant, tandis que d'autres se résignent à le retirer du système scolaire public.

Alors que les Français attendaient une loi rétablissant l'égalité, ce que vous nous avez proposé, c'est plus une loi de charité, un texte de circonstance, que l'expression d'une véritable volonté politique.

M. Yannick Bodin. Très bien !

Mme Alima Boumediene-Thiery. Monsieur le ministre, quand seront prêts tous les décrets d'application indispensables pour rendre la loi effective ? Quand seront transférés aux départements les moyens financiers nécessaires ? Comment comptez-vous lever les légitimes réticences des personnels des commissions techniques d'orientation et de reclassement professionnel, les COTOREP, et des commissions départementales de l'éducation spéciale, les CDES, qui hésitent à rejoindre la fonction publique départementale, alors que cette réforme est inconcevable sans moyens humains, s'agissant notamment d'agents de l'État qui disposent d'expériences et de compétences utiles ?

Enfin, quel engagement prenez-vous devant le drame que continuent de vivre ces enfants exclus du système scolaire ? Quels moyens financiers et humains supplémentaires allez-vous donner aux inspections académiques pour accueillir les enfants handicapés dans la dignité et le respect de leur différence ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

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Réponse du Ministère délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille publiée le 20/01/2006

Réponse apportée en séance publique le 19/01/2006

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Madame Boumediene-Thiery, ne croyez pas que je veuille être désagréable (Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.),...

M. Roland Muzeau. Si !

M. Philippe Bas, ministre délégué. ...mais, tout de même, si l'on prétend, comme vous, dresser un réquisitoire, encore faut-il disposer d'informations exactes ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Vous avez rappelé cette grande loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, voulue par le Président de la République...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. La loi manquée du septennat !

M. Roland Muzeau. Même Xavier Bertrand est d'accord !

M. Philippe Bas, ministre délégué. ... et dont vous réclamez aujourd'hui la rapide, pleine et entière application.

Je vous remercie, madame la sénatrice, de votre ralliement à un texte que, l'année dernière, vous n'aviez pas voté, et les personnes handicapées s'en souviennent ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

Permettez-moi de vous dire que, moins d'un an après son vote, cette grande loi est appliquée ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean-Pierre Michel. C'est faux !

M. le président. Mes chers collègues, veuillez écouter M. le ministre délégué !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Un ministre ne doit pas agresser les parlementaires !

M. Roland Muzeau. Il n'a jamais été élu !

M. Philippe Bas, ministre délégué. À cet égard, je voudrais remercier d'abord l'ensemble des associations représentant les personnes handicapées (M. le ministre délégué s'exprime au milieu de protestations continues sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC) et les parents d'enfants handicapés d'avoir joué le jeu d'une concertation intensive qui a permis, en sept mois, de faire paraître pas moins de vingt-sept décrets et de recueillir l'avis du Conseil national consultatif des personnes handicapées sur vingt autres.

M. Jacques Mahéas. Cela ne coûte pas très cher à l'État !

M. Philippe Bas, ministre délégué. Ce conseil se prononcera sur les derniers décrets d'ici au 8 février prochain.

Je remercie également les conseils généraux de cette application rapide de la loi. (Ah ! sur les travées du groupe socialiste.)

M. Paul Raoult. C'est un transfert de charges !

M. Philippe Bas, ministre délégué. En effet, grâce aux aides reçues de l'État, à savoir 55 millions d'euros en 2005, 20 millions d'euros chaque année suivante plus 20 millions d'euros pour la première installation en 2006,...

M. Roland Muzeau. On attend la réponse !

M. Serge Lagauche. La réponse à la question !

M. Philippe Bas, ministre délégué. ... les maisons départementales du handicap avaient toutes été créées au 31 décembre de l'année dernière, ...

M. René-Pierre Signé. Avec l'argent des autres !

M. Paul Raoult. L'argent des départements !

M. Philippe Bas, ministre délégué. ... à l'exception de trois d'entre elles, qui seront mises en place au cours de ce mois de janvier. Je remercie donc les départements de s'être engagés dans cette politique d'aide aux personnes handicapées.

Enfin, madame la sénatrice, si vous n'avez pas de mémoire,...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Calmez-vous !

M. Philippe Bas, ministre délégué. ...moi, j'en ai un peu !

M. Claude Domeizel. Nous aussi !

M. Philippe Bas, ministre délégué. Je voudrais vous rappeler les conditions dans lesquelles l'allocation personnalisée d'autonomie a été instituée en 2001 (Rires et applaudissements sur les travées de l'UMP.), au grand désarroi de tous les présidents de conseil général !

M. Alain Gournac. Bravo !

M. Paul Raoult. Mais 900 000 personnes en bénéficient !

M. Philippe Bas, ministre délégué. Je sais que, parmi les sénatrices et les sénateurs ici présents, beaucoup ont éprouvé la difficulté de mettre en place une prestation avant que les financements nécessaires n'aient été réunis.

M. René-Pierre Signé. Ce n'est pas vrai !

M. Paul Raoult. Mais 900 000 personnes en bénéficient !

M. Yannick Bodin. Et la question sur l'école ?

M. Philippe Bas, ministre délégué. Or, depuis le 1er janvier, les personnes handicapées peuvent demander à bénéficier de la prestation de compensation des conséquences du handicap,...

M. le président. Veuillez conclure, monsieur le ministre délégué.

M. Philippe Bas, ministre délégué. ... dont le financement a été organisé avant qu'elle soit instaurée, et non pas après, puisque les départements recevront pas moins de 500 millions d'euros à ce titre (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)...

M. le président. Mes chers collègues, je vous prie de laisser parler M. le ministre, auquel je demande de bien vouloir terminer !

M. Philippe Bas, ministre délégué. ... grâce à l'institution de la journée de solidarité,...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Arrêtez-le, monsieur le président !

M. Philippe Bas, ministre délégué. ...que vous avez également, bien entendu, contestée, car chaque fois que l'on prévoit le financement d'un progrès social, vous vous y opposez ! (Vifs applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF. - Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

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