Question de M. MUZEAU Roland (Hauts-de-Seine - CRC) publiée le 31/03/2006

Question posée en séance publique le 30/03/2006

M. Roland Muzeau. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Mais je tiens en préalable, monsieur le Premier ministre, à protester contre l'arrestation, il y a quelques instants, du président de l'UNL, l'Union nationale lycéenne, Karl Stoeckel.

M. Josselin de Rohan. Un communiste ! (Rires sur les travées de l'UMP.)

Mme Michelle Demessine. Taisez-vous !

M. Roland Muzeau. Monsieur le président, faites respecter un peu l'ordre dans cet hémicycle !

Nous vous l'avions annoncé, le soulèvement du peuple français contre le contrat de première embauche est là : trois millions de personnes étaient dans la rue mardi...

M. Alain Gournac. Dix millions ! Cent millions !

M. Roland Muzeau. ... et 83 % de nos compatriotes rejettent le CPE.

Face à cette déferlante citoyenne, que pèse le vote à la hussarde d'un Parlement aux ordres, issu d'un mode de scrutin contestable et contesté, d'un Parlement rabaissé et décalé ? (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Gournac. Et c'est dans la bouche d'un communiste !

M. Roland Muzeau. Ne l'oubliez jamais, monsieur le Premier ministre, le pacte républicain est fondé notamment sur l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, selon lequel : « La Loi est l'expression de la volonté générale. »

Pouvez-vous maintenir, en regardant le peuple en face,...

M. Alain Gournac. Il est dans la rue !

M. Roland Muzeau. ... que la volonté générale est aujourd'hui respectée ? (Nombreuses marques d'approbation sur les travées de l'UMP.)

M. Dominique Braye. Ah oui !

M. Alain Gournac. Oui !

M. Alain Gournac. La loi ne se fait pas dans la rue !

M. Roland Muzeau. Monsieur le Premier ministre, le CPE est mort ! (Vives exclamations sur les travées de l'UMP. - Marques d'approbation aussi vives sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

M. Dominique Braye. Le parti communiste est mort depuis longtemps !

M. Roland Muzeau. Dès la décision du Conseil Constitutionnel, dépourvu de légitimité démocratique, d'ailleurs, ...

Mme Christiane Hummel. Mais que faites-vous de la démocratie, justement ?

M. Roland Muzeau. ... le Président de la République doit refuser la promulgation de ce texte, comme nous l'avons demandé par courrier le 9 mars dernier. Le CNE, grand frère du CPE doit, lui aussi, être abrogé. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Gournac. Mais pas du tout !

M. Dominique Braye. Et le PC dissous !

M. Robert Hue. Comme sous Pétain ?

M. Roland Muzeau. Nous déposons une proposition de loi en ce sens aujourd'hui.

M. Alain Gournac. Et le Parlement, dans tout cela ?

M. Roland Muzeau. Le projet de contrat unique précarisé, si cher à M. Sarkozy, doit être abandonné. Le principe du contrat à durée indéterminée doit être renforcé.

Comme il l'a fait le 29 mai dernier, le peuple dit « Non ! » à une conception libérale de l'avenir, dans laquelle l'homme ne serait qu'une marchandise.

Mme Christiane Hummel. Et la femme ?

M. Roland Muzeau. Monsieur le Premier ministre, au-delà du jeu de rôles détestable auquel on assiste entre vous et le ministre de l'intérieur, président de l'UMP, ...

M. Guy Fischer. Absent !

M. Roland Muzeau. ... au-delà de cette prise en otages du code du travail, des salariés, des chômeurs, des jeunes, de tout un peuple pour satisfaire une soif du pouvoir qui ne concerne que deux hommes, allez-vous, oui ou non, renoncer au CPE ? (Non ! sur les travées de l'UMP.) Allez-vous, oui ou non, entendre la France qui, ultra majoritairement, refuse ce capitalisme sauvage ? (Exclamations prolongées sur les mêmes travées.)

Tout passage en force serait lourd de conséquences et constituerait une menace pour la démocratie. (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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Réponse du Ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement publiée le 31/03/2006

Réponse apportée en séance publique le 30/03/2006

M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Monsieur le sénateur, combien d'heures avez-vous personnellement consacrées à l'examen de ce texte dans cet hémicycle ?

M. Guy Fischer. Quatre-vingt-quinze heures !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela ne change rien au problème !

Mme Michelle Demessine. Rien n'a bougé !

M. René-Pierre Signé. Il n'y croit pas, au CPE !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Probablement quatre-vingt-dix ou quatre-vingts heures sur les cent deux heures de débat ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme Bernadette Dupont. Quatre-vingt-quinze heures !

M. Philippe Dallier. Très bien !

M. Dominique Braye. Bravo !

M. René-Pierre Signé. Et combien à l'Assemblée nationale ?

Mme Hélène Luc. Si au moins vous nous écoutiez ?

M. Roland Muzeau. Vous n'y étiez pas, on ne vous a même jamais vu, pendant le débat !

M. René-Pierre Signé. Vous n'avez pas défendu le texte !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Dois-je rappeler, monsieur Muzeau, que la Haute Assemblée a adopté près de cent trente-cinq amendements provenant de tous les groupes, notamment de ceux de l'opposition ?

Alors, monsieur Muzeau, vous ne pouvez pas dire qu'un texte qui a fait l'objet de plus de cent heures de débat a été « passé en force » (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.), ...

M. René-Pierre Signé. Vous n'y croyez pas !

M. Paul Raoult. Et la rue ?

M. Jean-Louis Borloo, ministre. ... pas plus que vous ne pouvez demander que l'on revienne rétroactivement sur un texte pour abroger un contrat, le contrat nouvelles embauches, dont plus de 400 000 ont d'ores et déjà été signés,...

M. Roger Romani. Très bien !

M. Alain Gournac. Cela ne les intéresse pas !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. ... près d'un tiers ayant permis des embauches qui n'auraient pas eu lieu si le CNE n'avait pas été adopté ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Pas de conclusions hâtives !

M. Bernard Piras. Et les manifestants ?

M. Jean-Louis Borloo, ministre. Enfin, monsieur Muzeau, devrais-je vous rappeler que nous sommes dans une démocratie ? (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

M. Alain Gournac. Eh oui !

M. Dominique Braye. Et pas à Moscou !

M. Bernard Piras. Provocateur !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. En l'état actuel de notre Constitution, le retrait n'existe pas et la suspension n'est dans le pouvoir de personne, ni du Premier ministre, ni du Président de la République. Il reste deux hypothèses constitutionnelles, dont l'une est la promulgation de la loi,...

M. Paul Raoult. Le Président de la République peut très bien ne pas la promulguer !

M. Jean-Louis Borloo, ministre. ... mais l'autre n'est certainement ni un retrait, ni une suspension ! (Bravo ! et applaudissements rythmés sur les travées de l'UMP.- Quelques sénateurs sur les travées de l'UC-UDF applaudissent également.)

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