Question de M. MASSON Jean Louis (Moselle - NI) publiée le 27/04/2006

M. Jean Louis Masson demande à M. le garde des sceaux, ministre de la justice, si le juge des référés saisi d'un contentieux sur un marché public peut, à la demande d'un requérant, ordonner la communication de documents s'y rapportant ou si l'appréciation d'une telle communication ressort de la seule compétence de la CADA.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 15/06/2006

Le garde des sceaux, ministre de la justice fait savoir à l'honorable parlementaire que le juge administratif, et en particulier le juge du référé précontractuel institué par les articles L. 551-1 et L. 551-2 du code de justice administrative, dispose en vertu de ses pouvoirs inquisitoriaux de la faculté d'ordonner aux parties de lui fournir, dans un délai déterminé, des explications ou encore des documents. Ce pouvoir d'injonction, qui peut s'exercer aussi bien à l'égard de l'administration qu'à celui d'une personne privée, procède d'une jurisprudence ancienne et constante (CE, 1er mai 1936, Couespel du Mesnil et CE Ass., 28 mai 1954, Barel et autres). Ainsi, il appartient au juge d'exiger notamment de l'administration compétente « la production de tous documents susceptibles d'établir sa conviction et de permettre la vérification des allégations du requérant ». Par exemple, la jurisprudence ouvre au juge le droit de s'assurer auprès de l'administration, par la voie administrative ou par jugement avant dire droit, du caractère communicable d'un document administratif (CE, 23 décembre 1988, Banque de France). Si toute partie à l'instance peut demander au juge la communication d'un document se rapportant au contentieux, le juge détient, du fait du caractère inquisitorial de la procédure, un pouvoir indépendant pour décider d'y donner une suite favorable. A l'égard de l'administration, le juge peut requérir la production de tous documents « à la seule exception de ceux qui sont couverts par un secret garanti par la loi ». (CE Ass., 11 mars 1955, Coulon et CE, 23 décembre 1988, Banque de France). A l'égard des parties à l'instance, le juge administratif, et notamment le juge des référés, est tenu « de [leur] communiquer avant la clôture de l'instruction, par tous moyens, notamment en les mettant à même d'en prendre connaissance à l'audience publique, les pièces et mémoires soumis au débat contradictoire qui servent de fondement à sa décision et qui comportent des éléments de fait ou de droit dont il n'a pas été antérieurement fait état au cours de la procédure. » (CE, 28 mai 2001, Société Codiam, req. n° 230692). Toutefois, si l'objet même du litige porte sur la communication d'un document, tel qu'une pièce se rapportant à un marché public, le recours au juge administratif n'est tout d'abord possible que si la commission d'accès aux documents administratifs a été saisie préalablement à ce recours du refus de l'administration de communiquer le document litigieux conformément au dernier alinéa de l'article 20 de la loi du 17 juillet 1978 modifiée. Si tel est le cas, le Conseil d'Etat a ensuite jugé qu'à l'occasion d'un tel contentieux, lorsque « l'état de l'instruction ne (permet) pas au juge administratif d'être éclairé sur le caractère administratif du document dont la communication est demandée (sur le fondement de la loi du 17 juillet 1978, il ordonne avant dire droit) la production de ce document à la (formation) chargée de l'instruction de l'affaire, sans que, compte tenu de l'objet même du litige, communication de cette pièce soit donnée (au requérant). » (CE, 14 mars 2003, X., req. n° 231661).

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