Question de M. MADEC Roger (Paris - SOC) publiée le 25/05/2006

M. Roger Madec souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur la lutte contre le trafic international de chiots. La vente de jeunes chiens s'effectuait traditionnellement auprès d'éleveurs exerçant cette activité fréquemment plus par passion pour les animaux que par intérêt économique. Depuis quelques années, et singulièrement depuis l'ouverture des pays d'Europe de l'Est au marché, le commerce des chiots a pris une tout autre dimension. Un trafic inacceptable s'est mis en place : 100 000 chiots seraient importés tous les ans, souvent dans des conditions déplorables. Beaucoup le sont en dehors de toute réglementation. Le taux de mortalité serait de 20 % dans les camions transportant, sur des milliers de kilomètres, ces animaux. De nombreux chiots sont également atteints de maladies parce que les normes et les contrôles sanitaires ne sont pas à la hauteur dans certains de ces pays. Ces filières sont organisées par des courtiers peu regardants qui achètent en Europe de l'Est de jeunes chiens à des prix défiant toute concurrence. Ce sont eux qui alimentent ce trafic au mépris des règles nationales et européennes et avec, hélas ! la complicité de certains vétérinaires peu scrupuleux, les normes sanitaires, les protocoles de vaccination, les conditions d'âge de vente n'étant pas, dans la plupart des cas, respectés. La transformation de la vente de chiots en un commerce très lucratif ouvert aux trafics internationaux pose donc le sérieux problème du respect de la vie de l'animal. Ce phénomène condamnable est aussi préjudiciable aux acheteurs de chiots. Il exerce également une concurrence déloyale sur les éleveurs français attentifs à la qualité et à la bonne santé de leurs animaux. Il considère ainsi qu'il est urgent de mettre un terme au trafic international de chiots. Il lui demande donc de bien vouloir lui indiquer les mesures qu'il entend adopter afin de mettre un terme à cette situation. Il attire également son attention sur l'importance d'intervenir au niveau européen.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de la pêche publiée le 21/06/2006

Réponse apportée en séance publique le 20/06/2006

M. le président. La parole est à M. Roger Madec, auteur de la question n° 1063, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

M. Roger Madec. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la vente de chiots était traditionnellement effectuée en France par des éleveurs exerçant cette activité plus souvent par passion pour les animaux que par intérêt économique, mis à part certains d'entre eux peu scrupuleux ou qui géraient des élevages comparables à l'élevage de veaux ou de volailles en batterie.

Depuis quelques années, singulièrement depuis l'ouverture des pays d'Europe de l'Est au marché, le commerce des chiots a pris une tout autre dimension : un trafic inacceptable s'est mis en place. En effet, 100 000 chiots seraient importés tous les ans, souvent dans des conditions déplorables : beaucoup le sont en dehors de toute réglementation, et le taux de mortalité de ces animaux transportés dans des camions sur des milliers de kilomètres serait de 20 %.

De nombreux chiots sont également atteints de maladies, car les normes et les contrôles sanitaires ne sont pas à la hauteur dans certains des pays de provenance.

Ces filières sont organisées par des courtiers peu regardants, qui achètent en Europe de l'Est de jeunes chiens à des prix défiant toute concurrence. Ce sont eux qui alimentent ce trafic au mépris des règles nationales et européennes, et parfois, hélas ! avec la complicité de certains vétérinaires peu scrupuleux. Dans la plupart des cas, les normes sanitaires, les protocoles de vaccination et les conditions d'âge de vente ne sont pas respectés.

La transformation de la vente de chiots en un commerce très lucratif ouvert aux trafics internationaux pose donc le sérieux problème du respect de la vie de l'animal. Le temps où les animaux étaient considérés comme des marchandises est révolu. Notre droit, en particulier le droit européen, reconnaît le respect du bien-être des animaux.

En outre, ce trafic est préjudiciable aux acheteurs de jeunes chiens. Ils sont souvent trompés sur la qualité et la santé du chiot qu'ils achètent. Cela n'est pas sans provoquer des situations extrêmement pénibles par la suite, notamment lorsque l'animal s'avère agressif ou devient malade.

De plus, ce commerce illégal exerce une concurrence déloyale sur les éleveurs français attachés à la qualité et à la bonne santé de leurs animaux. Ces exploitants se mobilisent au quotidien pour maintenir des élevages d'excellence répondant à toutes les réglementations. Il serait injuste de les voir disparaître au profit de courtiers peu soucieux de la vie des chiots, de leur qualité et de la satisfaction de leurs futurs maîtres.

Il est donc urgent, monsieur le ministre, de mettre un terme au trafic international de chiots. À l'évidence, la réglementation nationale et européenne n'est pas respectée malgré les lourdes contraintes déjà imposées aux éleveurs « passionnés ».

Pouvez-vous nous indiquer les engagements que vous comptez prendre pour mettre fin à cette situation ? Quelles actions envisagez-vous de mener sur le plan européen afin que cesse ce trafic inacceptable de chiots ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le sénateur, votre question est d'actualité. Hier, un débat sur le bien-être animal a eu lieu au Conseil des ministres de l'agriculture de l'Union européenne à Luxembourg. En outre, nous sommes souvent interrogés par les familles ou par les associations sur les échanges intracommunautaires de chiots destinés au commerce, qui peuvent être sources de trafics et de souffrance pour ces jeunes animaux.

Je vais donc rappeler la réglementation.

Tous les chiots destinés à être commercialisés en France doivent être identifiés au moyen d'une puce électronique ou d'un tatouage. Ils doivent également être accompagnés d'un passeport européen dans lequel un vétérinaire atteste qu'un examen clinique a été réalisé dans les vingt-quatre heures avant l'expédition et indique que les animaux sont en bonne santé, aptes à supporter le transport et vaccinés contre la rage, selon un protocole vaccinal autorisé dans l'État membre dans lequel la vaccination a été réalisée.

Les chiots provenant de pays tiers doivent également être identifiés et vaccinés contre la rage, accompagnés d'un certificat sanitaire attestant de la validité de la vaccination antirabique.

Les directions départementales des services vétérinaires effectuent des contrôles réguliers des mouvements de chiens et de chats, notamment dans les circuits commerciaux, avec une attention particulière sur les flux d'importation. Elles sont aidées dans cet objectif par la brigade nationale d'enquêtes vétérinaires et phytosanitaires, par les services du ministère de l'intérieur, du ministère de la justice et par les douanes.

De plus, le garde des sceaux et moi-même avons sensibilisé les parquets à la protection des animaux de compagnie, plus particulièrement à la question des trafics. À cet égard, vous vous souvenez certainement de cette histoire de chiots hongrois qui s'est déroulée l'année dernière, et à propos de laquelle Mme Bardot et beaucoup d'autres étaient intervenus.

La possibilité, prévue par les textes communautaires, d'autoriser sous certaines conditions les mouvements de chiots de moins de trois mois non vaccinés contre la rage n'a pas été retenue par la France, qui s'est montrée en cela plus sévère que ne l'exige la norme communautaire.

Une difficulté provient de la variété des protocoles vaccinaux en vigueur dans l'Union européenne : certains pays autorisent la vaccination de chiots de sept semaines alors qu'en France seuls des chiots de plus de trois mois peuvent être vaccinés. Ces différences peuvent en effet engendrer des distorsions de concurrence entre les éleveurs français et leurs homologues européens.

C'est la raison pour laquelle j'interviendrai auprès de la Commission européenne, et notamment du commissaire Kyprianou, afin de savoir s'il serait possible - c'est déjà le cas pour la protection des animaux destinés à l'expérimentation animale - de prendre des dispositions communautaires tendant à harmoniser les législations des États membres en s'appuyant sur la Convention européenne sur la protection des animaux de compagnie, que nombre de pays ont déjà signée.

Vous avez donc tout à fait raison, monsieur Madec, d'attirer notre attention sur ce trafic et sur ses conséquences. Je vous tiendrai personnellement informé des évolutions du dossier et de nos démarches auprès de l'Union européenne, ainsi que des mesures complémentaires qui seront adoptées.

M. le président. La parole est à M. Roger Madec.

M. Roger Madec. Je remercie M. le ministre de sa réponse.

Il y a effectivement des règles et les directions des services vétérinaires, les DSV, sont présentes dans chaque département. Toutefois, sans vouloir émettre de critique formelle, j'observe que ces dernières se montrent plus zélées envers des éleveurs amateurs, des petits éleveurs, qu'à l'égard de certains courtiers pourtant bien connus sur la place publique.

Je tenais à féliciter M. le ministre - même si j'appartiens à l'opposition (M. le ministre sourit) - de l'accord qu'il a signé le 21 avril dernier avec la Société centrale canine et le Syndicat national des vétérinaires d'exercice libéral. En effet, cet accord a mis fin à un conflit kafkaïen qui durait depuis des années et qui gênait la gestion du fichier national canin.

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