Question de M. BOYER Jean (Haute-Loire - UC-UDF) publiée le 26/10/2006

M. Jean Boyer attire l'attention de M. le ministre délégué aux collectivités territoriales sur la répartition du produit des amendes de police ainsi que l'affectation de la taxe intérieure sur les produits pétroliers. La multiplicité des contrôles ainsi que la mise en place de radars fixes, disséminés sur l'ensemble du territoire, mais aussi la volonté publique d'une sécurité routière accrue ont pour effet l'augmentation des contraventions permettant des recettes supplémentaires dans le budget de l'État. Les collectivités locales perçoivent une partie des recettes provenant des amendes de police afin de réaliser un certain nombre d'opérations d'aménagement de sécurité directement liées à la voierie ou au stationnement. Il souhaite connaître précisément comment le produit des amendes de police a évolué au cours de ces dernières années mais aussi et surtout son affectation. Au moment où les subventions se font rares, il est vrai, cet accompagnement prend, c'est un paradoxe, des proportions fort appréciables, permettant de concrétiser ainsi pour des petites communes rurales des projets essentiels. D'autre part, l'évolution sensible de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, liée directement à la hausse du coût des matières premières, peut surprendre quant à l'architecture de sa répartition. Si le consommateur, à la fois électeur, connaissait véritablement la destination de ces fonds, il serait peut-être moins enclin à laisser gronder sa colère. Il souhaite connaître la répartition précise de cet impôt indirect et la manière dont est utilisé le produit fiscal, souvent considéré comme injuste. Même si l'intercommunalité a pris une place déterminante dans l'attribution de certains financements, il veut bien entendu parler de la dotation de développement rural, il n'en demeure pas moins que nos petites collectivités, les communes en particulier sont celles qui fixent le plus la population, leur permettent de conserver une identité ou de marquer plus simplement l'appartenance avec un territoire. Ce lien, non seulement avec des structures « pour le moins artificielles », est essentiel si l'on veut maintenir l'expression d'une vie démocratique locale. L'amende de police, la taxe intérieure sur les produits pétroliers sont « deux mamelles » du financement local indispensable à la bonne concrétisation des projets et des initiatives municipales.

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Réponse du Ministère délégué à l'aménagement du territoire publiée le 17/01/2007

Réponse apportée en séance publique le 16/01/2007

M. le président. La parole est à M. Jean Boyer, auteur de la question n° 1153, adressée à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales.

M. Jean Boyer. Monsieur le ministre, il faut reconnaître que la multiplicité des contrôles ainsi que la mise en place des radars fixes, répartis sur l'ensemble du territoire, ont permis une vraie amélioration en matière de sécurité routière.

L'augmentation des contraventions assure des recettes supplémentaires dans le budget de l'État. La majeure partie de ce produit semble affectée à des aménagements allant dans le sens de l'objectif recherché.

Dans ce cadre précis, monsieur le ministre, pourriez-vous m'indiquer la part revenant aux collectivités locales ainsi que les conditions de son affectation ?

Les collectivités apprécient ces retombées sans lesquelles certains aménagements sécuritaires bien localisés ne pourraient être réalisés.

Par ailleurs, l'évolution sensible de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, liée directement à la hausse du prix du baril de pétrole, peut surprendre si l'on regarde le coût de la matière première et le coût pratiqué à la pompe.

Nous le savons tous, cette taxe est pour l'État une recette qui lui permet d'accorder des dotations aux collectivités. Afin d'appréhender avec plus de netteté les affectations fiscales, il me paraît nécessaire de donner à nos concitoyens une transparence plus grande en la matière.

Cela est d'autant plus important que les régions semblent pouvoir bénéficier dorénavant d'un pouvoir de décision déterminant sur le coût final. Qu'en est-il réellement ? Mieux connaître son utilisation permettrait aussi à nos compatriotes de bénéficier d'une plus grande compréhension face à ces écarts de prix.

L'amende de police et la taxe intérieure sur les produits pétroliers sont « deux mamelles » du financement local indispensable à la bonne concrétisation des projets et des initiatives municipales, monsieur le ministre.

Dans notre société actuelle, la transparence par la communication est une démarche nécessaire. Les deux éléments que j'évoque ce matin me semblent complémentaires et nécessaires à une information objective pour tous.

Monsieur le ministre, je vous remercie de votre attachement à donner à nos concitoyens des réponses à leurs préoccupations quotidiennes.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire. Monsieur le sénateur, je décèle dans votre intervention une préoccupation relative au financement des initiatives locales, mais aussi une réflexion plus profonde sur la recherche du niveau territorial le plus pertinent pour porter ces initiatives. Dans ce cadre, vous interrogez le ministre délégué aux collectivités territoriales sur les modes de répartition du produit des amendes de police et de la TIPP.

Vous relevez avec pertinence le poids croissant que le produit des amendes forfaitaires de police relatives à la circulation routière a pris depuis plusieurs années. Les collectivités bénéficiaires en sont les communes et les groupements de plus de 10 000 habitants, les communes et les groupements de moins de 10 000 habitants, la région Île-de-France et le Syndicat des transports d'Île-de-France.

En réponse à votre question, je vous indique que les masses mises en répartition au profit de ces collectivités locales ont quasiment doublé en quatre ans, puisqu'elles ont augmenté de 99,82 % entre 2002 et 2005. Sur la même période, le nombre d'amendes dressées sur le territoire a augmenté de 21,91 %. Pour 2006, le montant total à répartir atteint plus de 565 millions d'euros. Le Comité des finances locales les répartira en février prochain.

S'agissant des modalités de répartition, la moitié des sommes à répartir est principalement attribuée aux communes et groupements de plus de 10 000 habitants, ce qui représentait 54,69 % de l'enveloppe en 2002 et 57,16 % en 2005. Le Syndicat des transports d'Île-de-France recevait en moyenne 22 % de l'enveloppe à distribuer en 2005, les 23 % restants étant attribués pour moitié respectivement aux communes de moins de 10 000 habitants et à la région Île-de-France.

Le produit des amendes de police des communes de moins de 10 000 habitants est lui mutualisé au niveau départemental afin de permettre des taux de subvention significatifs. Les conseils généraux établissent la liste des projets bénéficiaires selon l'urgence et le coût des travaux à réaliser. Les préfets procèdent ensuite à l'élaboration des arrêtés attributifs correspondants. Cette mutualisation permet de disposer d'enveloppes financières suffisantes pour financer des opérations de transports en commun et d'amélioration de la sécurité routière.

À titre exceptionnel, dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2006, le Parlement a adopté une disposition visant à affecter 100 millions d'euros ouverts en loi de finances initiale pour 2006 et en loi de finances rectificative pour 2005 à d'autres politiques de développement local.

La péréquation en faveur des communes et des EPCI défavorisés sera tout d'abord confortée par l'affectation de 50 millions d'euros à la dotation d'aménagement des communes et de leurs groupements ; 50 millions d'euros reviendront également à l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances afin de permettre la réalisation d'actions de prévention de la délinquance.

Je vous indique également que, comme Brice Hortefeux s'y était engagé devant votre assemblée le 28 novembre dernier lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2007, un groupe de travail sera prochainement créé afin d'examiner la possibilité de mettre en place une nouvelle clef de répartition du produit des amendes dressées par voie de radars automatiques.

Je vous rappelle que le Gouvernement avait accepté en 2005 qu'une partie des amendes perçues par ce biais soit affectée aux communes. Plusieurs voix se sont élevées depuis en faveur d'une répartition au bénéfice des départements. Dans la mesure où certaines routes nationales sont désormais de la compétence des départements, je comprends que les conseils généraux revendiquent la perception de ce produit. Nous devons en discuter, et ce sera l'objet du groupe de travail.

Vous vous interrogez également sur la répartition et l'utilisation de la TIPP.

Cette taxe est aujourd'hui partagée entre trois niveaux de collectivité : l'État, les départements et les régions.

La loi de finances pour 2004 a d'abord attribué aux départements une part du tarif de la TIPP en contrepartie de la décentralisation du revenu minimum d'insertion, le RMI, et du revenu minimum d'activité, le RMA, pour un montant annuel de 4,942 milliards d'euros.

La loi de finances pour 2005 a ensuite attribué, cette fois-ci aux régions, une autre quote-part du tarif de la TIPP en contrepartie des compétences décentralisées par la loi du 13 août 2004. Le montant des compétences transférées est évolutif, puisque le processus de transfert s'échelonnera jusqu'en 2008. Pour votre information, sachez que 1,4 milliard d'euros sont inscrits dans la loi de finances pour 2007.

Comme vous le savez certainement, l'assiette de la TIPP a été régionalisée à compter de 2006 afin de préparer le terrain à la modulation que les régions sont actuellement en train de décider. Dès 2007, les tarifs de TIPP seront donc différents d'une région à l'autre en fonction des décisions propres des conseils régionaux.

Conformément aux engagements du Gouvernement depuis le début du nouveau processus de décentralisation, il s'agit de donner aux régions des marges de manoeuvre supplémentaires en matière fiscale. Contrairement à ce qu'affirment les régions, il s'agit réellement de marges supplémentaires, car l'État remplit intégralement ses obligations constitutionnelles. Il est même allé au-delà des objectifs en termes de couverture des dépenses transférées, puisque, en acceptant de modifier la méthode d'évaluation du droit à compensation pour certains transferts, le Gouvernement a consenti au profit des régions un effort supplémentaire de 135,4 millions d'euros.

La modulation de la TIPP constitue donc bien un accroissement des marges des régions. On peut d'ailleurs l'estimer à environ 515 millions d'euros, soit environ 20 % de l'ensemble des charges transférées de 2005 à 2007. Ces marges supplémentaires s'ajoutent à l'autofinancement actuel des régions. Celui de 2006 n'est pas encore connu, mais je rappelle que celui de 2005 s'élevait déjà à 5,2 milliards d'euros.

J'ajoute qu'un récent rapport d'information de la commission des finances de l'Assemblée nationale rédigé par les députés Marc Laffineur et Augustin Bonrepaux, qui n'appartiennent pourtant pas au même groupe de pensée politique, indique que les transferts de compétences de l'État aux collectivités locales dans le cadre de l'acte II de la décentralisation, conformément à la loi constitutionnelle, se sont opérés à l'euro près, voire plus. Cela démontre bien que la marge de manoeuvre accordée avec la TIPP par le Gouvernement aux régions a été utilisée à d'autres fins que la compensation des nouvelles compétences transférées.

M. le président. La parole est à M. Jean Boyer.

M. Jean Boyer. Monsieur le ministre, j'ai apprécié votre réponse claire, précise et concrète. Il y a tant d'interprétations erronées de la réalité qu'elle était nécessaire.

Même si je connais votre trempe et votre compétence, je ne pensais pas que vous auriez répondu avec autant de netteté à mes questions. Je vous en remercie sincèrement.

Je me permets également de féliciter le Gouvernement pour son action dans le domaine de la sécurité routière. Même si la répression est parfois choquante, de nombreuses vies humaines sont ainsi sauvegardées.

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