Question de M. BIWER Claude (Meuse - UC-UDF) publiée le 15/11/2007

M. Claude Biwer attire l'attention de Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports sur la croissance exponentielle du coût des médicaments en France pour la sécurité sociale : ainsi, avec 20 milliards d'euros, notre pays détient le record d'Europe en matière de dépenses de médicaments pour la médecine de ville. Le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, la Cour des comptes, la CNAM et l'inspection générale des affaires sociales ont recommandé un certain nombre de solutions visant à modifier le comportement des usagers et des prescripteurs. Il lui demande de bien vouloir préciser la suite qu'elle envisage de réserver à ces suggestions et notamment quelles mesures elle compte prendre afin que les médecins généralistes puissent disposer d'une information objective et indépendante sur le service médical rendu par les médicaments anciens et nouveaux, leurs effets secondaires ou encore les interactions médicamenteuses.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé de la coopération et de la francophonie publiée le 26/03/2008

Réponse apportée en séance publique le 25/03/2008

M. le président. La parole est à M. Claude Biwer, auteur de la question n° 103, adressée à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.

M. Claude Biwer. En 2006, la sécurité sociale a remboursé 20,3 milliards d'euros de médicaments, soit le tiers des dépenses de soins pour la médecine de ville.

Les Français restent ainsi les plus grands consommateurs de médicaments en Europe avec 284 euros par habitant, soit de 40 % à 80 % de plus que leurs voisins européens. Quant à savoir quelles sont les causes de cette inflation, je ne les connais malheureusement pas.

En France, 90 % des consultations chez un médecin généraliste se concluent par la délivrance d'une ordonnance, contre 72 % en Allemagne et 43 % aux Pays-Bas.

La multiprescription est également en cause, notamment pour les personnes âgées atteintes d'une affection de longue durée. C'est ainsi que 1 500 000 personnes consommeraient sept médicaments de classes thérapeutiques différentes !

Par ailleurs, comme le révèle la Caisse nationale d'assurance maladie, la CNAM, les médicaments prescrits sont très souvent les produits les plus récents et les plus chers, au détriment des molécules plus anciennes, devenues génériques.

Il existe néanmoins quelques lueurs d'espoir.

Ainsi la consommation d'antibiotiques a-t-elle diminué de 25 % en cinq ans. En outre, le remplacement systématique du princeps par un médicament générique permet de réaliser des économies substantielles.

Toutefois, malgré ces indéniables progrès, le coût des médications demeure encore bien trop élevé. Quelles solutions pourraient-elles être mises en oeuvre afin de réduire ces dernières ?

Peut-être, à l'instar de ce qui a été réalisé avec succès pour les antibiotiques, pourrait-on lancer une campagne de presse auprès des patients afin de leur expliquer que, à la suite d'une consultation chez un médecin généraliste, « un ou plusieurs médicaments ne sont pas automatiques » ? Nombreux sont ceux, en effet, qui considèrent leur médecin comme un mauvais thérapeute s'il ne leur prescrit aucun médicament !

Au reste, on ne peut passer sous silence le rôle joué par les laboratoires et les visiteurs médicaux : 3 milliards d'euros seraient consacrés chaque année à la visite médicale, ce qui est considérable. Or un visiteur médical ne peut que vanter - c'est humain - les mérites des nouvelles molécules fabriquées par son laboratoire, même si les progrès thérapeutiques induits par ces dernières sont faibles.

Quant aux médecins, ils ne bénéficient malheureusement pas d'informations indépendantes qui leur permettraient de se forger une opinion plus objective. Cela est tellement vrai que, selon une étude de l'Inspection générale des affaires sociales, l'IGAS, de 35 % à 42 % des généralistes disent ressentir un manque d'information pour ce qui concerne les données comparatives, les niveaux d'amélioration du service médical rendu, les effets secondaires des médicaments ou les interactions médicamenteuses.

Dès lors, faut-il, comme le préconise l'IGAS, procéder à un « désarmement commercial » des laboratoires pharmaceutiques ou, comme l'a suggéré récemment une grande organisation de consommateurs, remplacer les visiteurs médicaux par 1 700 spécialistes gérés par la Haute autorité de la santé, la HAS, financés par une taxe sur le marketing des laboratoires, afin d'offrir aux médecins une information aussi objective que possible sur les bienfaits supposés des nouveaux médicaments ?

Je ne sais quelle serait la meilleure solution, mais, ce qui est sûr, c'est que nous ne pouvons laisser les choses en l'état ; je compte donc sur le Gouvernement pour faire évoluer ce dossier dans le bon sens.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Alain Joyandet, secrétaire d'État chargé de la coopération et de la francophonie. Monsieur le sénateur, je vous demande de bien vouloir excuser l'absence de Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.

Conscient du volume élevé des dépenses de médicaments en France et compte tenu, notamment, du dernier rapport de l'Inspection générale des affaires sociales sur l'information du médicament, Mme la ministre de la santé a demandé à ses services de mettre en place des mesures visant à limiter la consommation de ces produits.

En premier lieu, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 a prévu de donner une nouvelle mission à la Haute autorité de santé. Celle-ci devra émettre des recommandations et des avis médico-économiques sur les stratégies de soins, permettant ainsi de privilégier les parcours de soins les plus efficients non seulement en termes strictement médicaux mais aussi en termes de meilleure utilisation des dépenses d'assurance maladie.

Ces recommandations seront rendues publiques, notamment sur le site de la HAS, et donc accessibles à l'ensemble des professionnels et des patients. Elles devraient entraîner une modification des comportements afin de parvenir à une utilisation plus optimale des médicaments.

L'information objective et de qualité sur les médicaments constitue en effet un enjeu majeur sur le plan de la maîtrise des dépenses de santé.

Aujourd'hui, l'information publique est diffusée via trois principaux acteurs : l'HAS, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, l'AFSSAPS, et la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés, la CNAMTS.

La HAS est chargée de l'élaboration et de la diffusion de recommandations de bonnes pratiques à destination des professionnels de santé et du public.

S'agissant de l'AFSSAPS, elle diffuse également aux professionnels de santé et au public une information relative au bon usage des produits de santé. Elle s'est vu confier, de par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 et le décret du 25 avril 2007, la gestion d'une banque de données administratives et scientifiques sur le médicament. Aujourd'hui, cette dernière comprend notamment le répertoire des spécialités pharmaceutiques, le répertoire des groupes génériques ainsi que le résumé des caractéristiques des produits, le RCP. Cette banque de données se met en place progressivement, et la publication de l'ensemble des RCP est prévue pour la fin 2008.

Les prix et les conditions de prise en charge des médicaments peuvent être consultés sur le site Internet de la CNAMTS, laquelle finance également la banque de données Thesorimed® développée par le groupement d'intérêt économique « Système d'information sur les produits de santé», le GIE-SIPS.

Par ailleurs, les informations relatives au prix des médicaments, fixées par le Comité économique des produits de santé, le CEPS, et publiées au Journal officiel, seront mises en ligne par ce dernier à l'horizon 2009.

Au-delà du nécessaire travail de mise en relation de ces bases de données, Mme Roselyne Bachelot-Narquin a, en outre, d'ores et déjà annoncé la mise à disposition, d'ici à la fin 2009, d'une base de données publiques sur les médicaments, accessible gratuitement et comportant l'ensemble des données relatives aux médicaments, que celles-ci soient d'ordre pharmacologique ou économique.

Enfin, les logiciels d'aide à la prescription, ou LAP, constituent des outils particulièrement utiles pour le médecin. L'article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 prévoit qu'ils ne pourront être certifiés par la Haute autorité de santé que s'ils permettent, au moment de la prescription, l'affichage systématique des prix des produits et du montant total de l'ordonnance.

M. le président. La parole est à M. Claude Biwer.

M. Claude Biwer. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie des informations que vous venez de me communiquer. Il est urgent, me semble-t-il, de prendre ce problème en considération. Je constate que le Gouvernement souhaite prendre un certain nombre de mesures allant dans le sens que je viens d'indiquer, et je ne puis que m'en féliciter.

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