Question de M. DANGLOT Jean-Claude (Pas-de-Calais - CRC) publiée le 16/05/2008

Question posée en séance publique le 15/05/2008

M. Jean-Claude Danglot. Ma question s'adresse à madame la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Elle concerne la situation de l'emploi dans notre pays.

Madame la ministre, aujourd'hui, des centaines de milliers d'agents des services publics, issus des fonctions publiques de l'État, hospitalière et territoriale, manifestent dans tout le pays pour vous exprimer leur refus de la politique que vous menez et qui vise, de fusion en restructuration, d'externalisation en privatisation et de flexibilité en précarité, à accélérer la casse méthodique des services publics.

La révision générale des politiques publiques, la RGPP, est le dernier outil que vous avez créé pour mener vos opérations de casse de la fonction publique en répondant ainsi parfaitement aux aspirations du MEDEF. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Gournac. Bien sûr, la faute au patronat !

M. Jean-Claude Danglot. Votre action repose en fait sur un postulat purement idéologique, qui considère l'action publique comme une dépense mais jamais comme une source de richesse et de développement.

M. Robert Hue. Très bien !

M. Jean-Claude Danglot. Plus personne ne peut aujourd'hui contester le fait qu'il manque des milliers d'emplois dans les écoles, les lycées, les collèges (Exclamations sur les mêmes travées.), les hôpitaux, les maisons de retraite, le secteur social, la police, la justice, les directions départementales de l'équipement, les douanes, les ANPE, les inspections du travail.

Votre feuille de route est bien définie et M. le Premier ministre l'a clairement résumée le 10 octobre 2007 :« la réforme de l'État supposera que chacun de nous accepte qu'il y ait moins de services, moins de personnel, moins d'État sur son territoire ».

L'argument qui consiste à affirmer que des dépenses publiques moindres pourraient favoriser l'emploi dans le secteur privé ne tient pas. Ma région, le Nord-Pas-de-Calais, sous-administrée, a perdu 42 000 emplois dans le secteur de l'industrie ; des filières entières, qui font sa fierté, comme le textile, l'habillement, les équipementiers automobiles, la chimie, ont été durement touchées ou ont disparu.

Madame la ministre, la direction de l'entreprise STAF, située à Hénin-Beaumont, qui délocalise au Brésil pour être plus compétitive, a même proposé un salaire de 300 euros à certains de ses salariés qui accepteraient un reclassement là-bas ! Ce n'est pas une anecdote ; c'est aussi cela, l'économie réelle, celle que vous défendez, au nom du principe de la « concurrence libre et non faussée » et du pacte de stabilité de l'Europe libérale.

M. Charles Pasqua. La question !

M. Jean-Claude Danglot. Madame la ministre, ma question sont simples et directes : quand allez-vous entendre le mécontentement des syndicats de fonctionnaires et les propositions qu'ils formulent ? Allez-vous renoncer à votre plan dit de « révision générale des politiques publiques », …

M. Alain Gournac. La question !

M. Jean-Claude Danglot. …qui prévoit la suppression de 160 000 emplois de fonctionnaire de l'État en quatre ans ?

Allez-vous enfin investir pour l'intérêt général en développant les services publics, afin de répondre aux attentes légitimes de nos concitoyens, au lieu de servir les intérêts d'une minorité de privilégiés ? (Protestations sur les travées de l'UMP.)

Ah oui, chers collègues, votre groupe porte bien son nom : UMP, Union pour une minorité de privilégiés ! (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.) Ce ne sont pas les fonctionnaires qui mettent la France en faillite, non, mais ce sont vos chers, très chers actionnaires !

M. Alain Gournac. Que c'est amusant !

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Réponse du Ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique publiée le 16/05/2008

Réponse apportée en séance publique le 15/05/2008

M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique. Monsieur le sénateur, vos questions et surtout votre manière de les poser sont bien excessives. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.) Vous parlez de « casse » du service public, de grèves massives. Rien de tout cela n'est vrai ! D'ailleurs, mon collègue Xavier Darcos a très bien répondu en ce qui concerne la grève dans l'éducation nationale. Certes, des gens sont dans la rue ; il faut les écouter, et c'est ce que fait le Gouvernement.

M. Didier Boulaud. Pas beaucoup !

M. René-Pierre Signé. Vous n'écoutez rien !

M. Éric Woerth, ministre. Cependant, la manifestation d'aujourd'hui n'est pas la marée humaine que l'on nous annonçait.

Un certain nombre de raisons simples expliquent ce fait. Il est de l'intérêt du pays d'évoluer et de ne pas considérer les services publics actuels comme ceux du XIXe siècle, ce que, probablement, vous souhaiteriez.

M. Didier Boulaud. C'est ce que l'on fait pourtant en ce moment, en matière pédagogique !

M. Éric Woerth, ministre. Il ne s'agit pas non plus de considérer que le développement économique passe d'abord par l'emploi public. Cette conception me semble appartenir à une époque révolue.

Nous voulons un service public de qualité, adapté aux besoins des usagers…

M. Alain Gournac. Bien sûr !

M. Éric Woerth, ministre. … et à la hauteur des espoirs des Français.

M. Didier Boulaud. Vous n'en prenez pas le chemin ! Il y a peu d'espoir !

M. René-Pierre Signé. Il n'y a plus d'espoir !

M. Éric Woerth, ministre. Nous voulons un service public de l'éducation nationale performant, adapté à la formation des jeunes.

Ce n'est pas non plus une raison pour considérer que ces services publics doivent être assurés dans n'importe quelle condition. Nous devons réfléchir ensemble, que notre sensibilité politique soit de droite ou de gauche, à la qualité du service public et à au nombre de ceux qui l'assurent.

Il y a aujourd'hui, en France, trop de fonctionnaires. Le Gouvernement veut réduire leurs effectifs et, pour ce faire, ne remplace pas une partie des agents publics qui partent à la retraite. Cette mesure n'est pas au demeurant extrêmement dure ; elle correspond plutôt à une vision assez douce de la réduction du volume de la fonction publique. En même temps, le Gouvernement réforme les services publics.

C'est la seule façon, me semble-t-il, d'afficher clairement un service public modernisé, des administrations mobiles, fournissant un service public de la qualité demandée mais aussi dans des conditions conformes aux capacités financières de notre pays. Les finances de l'État, comme celles de la sécurité sociale et plus largement les finances publiques, ne sont pas irréelles ou virtuelles ! Il s'agit de l'argent des Français, qui doit être justement consacré à un service public justement organisé.

Tel est l'objectif qui sous-tend l'action du Président de la République, du Premier ministre et du Gouvernement dans la mise en œuvre de la modernisation de l'État. Cette action nécessite quelque effort. Je n'ai pas l'impression que vous soyez prêts à le consentir. Vous avez une vision archaïque et passéiste des choses. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Gournac. Oh oui !

M. René-Pierre Signé. C'est injurieux !

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