Question de Mme BEAUFILS Marie-France (Indre-et-Loire - CRC) publiée le 01/05/2008

Mme Marie-France Beaufils attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur les conditions de la rentrée scolaire 2008 dans l'enseignement agricole public. Elle lui rappelle que malgré le rétablissement de 130 postes d'enseignants au niveau national, annoncé aux syndicats le 15 février dernier, certains engagements ne seront pas tenus.
En région Centre, cela se traduit notamment :
- par la fermeture d'un BTS ACSE (analyse et conduite des systèmes d' exploitation) à Bourges, en contradiction avec les positionnements du ministère sur le soutien aux filières de production ;
- par l'annulation, le 22 avril, de la création d'un BTS GEMEAU (gestion et maîtrise de l'eau) à Fondettes, ouvert à l'inscription des étudiants sur le site du ministère depuis fin février, à la suite des avis favorables des collectivités territoriales comme de l'État ;
- par le non-financement de la deuxième année de classe préparatoire TB (technologie et biologie) de Montargis en dépit des engagements ministériels pris en 2007.
Elle lui demande comment il entend garantir le maintien et le développement de l'offre de formation publique dans l'enseignement agricole, et en particulier en région Centre, en abondant la dotation globale horaire.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé de l'aménagement du territoire publiée le 07/05/2008

Réponse apportée en séance publique le 06/05/2008

M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, auteur de la question n° 234, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la suppression de postes dans les lycées soulève une forte incompréhension de la part des lycéens, des parents d'élèves, des enseignants et des professionnels du monde agricole. Élèves et enseignants de Tours viennent de manifester plusieurs fois contre la suppression de postes d'enseignants.

Le 15 mai prochain, les écoles, collèges et lycées seront en grève. Cinq fédérations de l'éducation ont appelé à cette journée pour protester contre la politique budgétaire et éducative du Gouvernement.

Monsieur le secrétaire d'État, la situation de l'enseignement agricole public se dégrade également de façon continue depuis près de six ans. Elle risque malheureusement de subir une chute brutale si vous ne prenez pas les mesures indispensables. Elle est tellement critique que votre collègue, le ministre de l'agriculture et de la pêche, a lui-même renoncé à l'aggraver davantage, en annonçant à l'intersyndicale le rétablissement de 130 postes sur les 319 initialement supprimés. Je souhaite que vous m'apportiez confirmation de ce rétablissement et que vous m'indiquiez à partir de quelles dotations le financement de ces postes est-il envisagé.

Quoi qu'il en soit, un certain nombre de points noirs subsistent un peu partout en France, et la région Centre n'est pas épargnée. Je voudrais m'y attarder quelques instants. Les trois exemples que je vais développer témoignent d'engagements pris par le ministère qui n'ont été accompagnés d'aucun moyen pour y faire face.

Pourquoi le lycée agricole de Bourges, qui dispense une formation d'analyse et de conduite des systèmes d'exploitation, au succès indéniable, et qui refuse chaque année des candidats, se verrait-il aujourd'hui contraint de supprimer cette classe ? Comment interpréter votre engagement en faveur des filières de production si, d'un autre côté, vous engagez la disparition d'une telle formation ? La profession a besoin de cadres formés pour gérer les exploitations et vous ne pouvez ignorer les contraintes de plus en plus complexes rencontrées par le monde agricole. Le rétablissement d'une telle formation me semble aujourd'hui impératif, pour l'agriculture berrichonne notamment.

La direction régionale de l'agriculture et de la forêt, la DRAF, a annulé, le 22 avril dernier, la création d'un BTS « gestion et maîtrise de l'eau » à Fondettes, alors que les inscriptions à ce brevet sont ouvertes sur le site du ministère depuis la fin du mois de février, que les collectivités territoriales, comme l'État, ont émis un avis favorable et que les financements nécessaires sont prévus.

Vous comprendrez, monsieur le secrétaire d'État, mon étonnement face à ce brusque revirement, qui intervient sans aucune explication. J'attends que les inscriptions soient maintenues et que la classe soit bien ouverte, d'autant que le Grenelle de l'environnement a mis l'accent sur cette question déterminante.

Les agriculteurs sont souvent montrés du doigt sur les questions de pollution des eaux. On ne peut à la fois stigmatiser la profession et ne pas lui donner les moyens de mieux répondre à ce besoin de préservation de notre environnement.

Pour ce qui concerne Montargis, en 2007, M. Bussereau, alors en charge de ce secteur, avait promis, à grand renfort de publicité dans les médias, qu'une classe préparatoire « technologie et biologie » serait créée. Ce fut chose faite, sur décision ministérielle. Il s'avère, à ce jour, que cette classe, unique dans l'enseignement agricole, aura certes une suite, mais sans financement complémentaire de l'État. Son financement sera donc pris sur la dotation de la région Centre, ce qui aura une implication sur d'autres projets.

Ces situations relevées dans la région Centre se répètent malheureusement dans de nombreux lycées agricoles publics de notre pays, et ce de façon plus grave parfois, comme c'est le cas dans la région Midi-Pyrénées, où douze classes vont être supprimées, comme je viens de l'apprendre.

Monsieur le secrétaire d'État, que comptez-vous faire pour permettre à notre enseignement agricole public de répondre aux besoins de l'agriculture et de l'environnement dans nos différentes régions, mais aussi à l'avenir de nos jeunes qui souhaitent se former à ces métiers ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Hubert Falco, secrétaire d'État chargé de l'aménagement du territoire. Tout d'abord, monsieur le président, je souhaite présenter au Sénat les excuses de M. Barnier, qui se trouve actuellement au salon de l'agriculture de l'Aquitaine.

Madame le sénateur, vous interrogez le Gouvernement sur la situation de certains établissements d'enseignement agricole public de la région Centre à la rentrée scolaire 2008-2009.

Le Gouvernement est très sensible à l'intérêt que vous portez à l'enseignement agricole, qui est reconnu tant pour l'efficacité de sa pédagogie, pour la réussite de ses élèves aux examens de tous niveaux et pour ses résultats en matière d'insertion professionnelle que pour sa capacité à innover et à s'adapter aux mutations de l'agriculture, du monde rural et aux attentes de notre société. Comme nous avons déjà pu le constater à l'occasion de la question posée par M. Domeizel, aujourd'hui, ces mutations sont importantes ; le monde rural doit donc évoluer, tout en maintenant un équilibre entre le développement et la préservation des ressources.

L'enseignement agricole est un élément essentiel pour la conduite des politiques qui sont placées sous la responsabilité du ministre de l'agriculture et de la pêche. Le Gouvernement entend le faire évoluer en réaffirmant ses missions et ses priorités.

Il souhaite vous apporter des précisions en ce qui concerne les questions que vous avez posées, madame le sénateur, sur les lycées de Bourges, Tours et Montargis et certaines de leurs formations.

L'information qui vous a été communiquée sur la fermeture du brevet de technicien supérieur agricole « analyse et conduite des systèmes d'exploitation », le BTSA ACSE, à Bourges est partiellement erronée. Cette formation est actuellement dispensée en un an et en deux ans. Désireuse de former des professionnels de l'agriculture de la meilleure manière, la direction régionale de l'agriculture et de la forêt a proposé au Gouvernement de fermer la formation en un an et d'orienter les étudiants sur la seule formation en deux ans. Dans la mesure où cette filière de production est maintenue dans l'enseignement public dans le Cher dans de meilleures conditions, le Gouvernement a validé cette proposition.

S'agissant du BTSA « gestion et maîtrise de l'eau » de Tours-Fondettes, le Gouvernement a effectivement donné un avis favorable à son ouverture à la rentrée 2008. Pour autant, cette ouverture suppose la mise en place d'installations techniques, comme des laboratoires, qui n'existent pas sur le site et ne seront pas construits à la prochaine rentrée scolaire. Le conseil régional, dont c'est la responsabilité, n'aura, semble-t-il, pas le temps d'achever les travaux d'ici au mois de septembre.

Dans ces conditions, est-il raisonnable d'accueillir des étudiants à la prochaine rentrée ? Je ne le pense pas ; c'est pourquoi le report d'ouverture de cette formation à la rentrée 2009 me semble la solution la plus sage. Il va s'en dire que l'ouverture en 2009 est d'ores et déjà acquise.

Enfin, je ne peux vous laisser affirmer que la deuxième année de classe préparatoire « technologie biologie » du lycée agricole de Montargis n'est pas financée, ne serait-ce que par respect pour les étudiants actuellement scolarisés en première année et qui comptent poursuivre leur formation. Ce sont ces jeunes que le Gouvernement veut rassurer, afin qu'ils étudient dans des conditions sereines. Je peux leur dire que l'autorité académique dispose des moyens nécessaires pour faire fonctionner cette deuxième année à la prochaine rentrée scolaire.

Attiser des craintes ne me semble pas la meilleure manière de convaincre les familles de scolariser leurs enfants dans l'enseignement agricole public. J'ai, pour ma part, une grande ambition pour cet enseignement d'avenir et de grande qualité et, au nom du ministre de l'agriculture et de la forêt, je veux assurer ses personnels, les élèves, les étudiants et les apprentis de l'engagement du Gouvernement et de son soutien.

Madame le sénateur, il est des sujets qui doivent être abordés de manière consensuelle, positive et sereine, dans l'intérêt de notre pays. L'enseignement agricole en est un. En notre qualité d'élus locaux, nous savons ce qu'il apporte au maintien de l'identité de tous les territoires, à leur préservation et à leur développement. Je sais pouvoir compter sur votre intérêt et sur votre appui afin de préserver la spécificité de l'enseignement agricole au sein du système éducatif, sa qualité et, surtout, son ancrage dans les territoires ruraux.

M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils.

Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le secrétaire d'État, mon attachement à l'enseignement agricole ne s'est jamais démenti, même lorsque je n'étais pas encore élue sénatrice.

En revanche, je peux vous dire que les réponses que vous avez apportées ne correspondent pas à la réalité. Avant de poser ma question, j'ai pris le temps de regarder quelle était la situation sur le terrain.

Actuellement, à Montargis, 2 200 heures de cours seraient nécessaires pour assurer la poursuite de la formation en question. Malheureusement, pour le moment, les moyens adéquats ne sont pas disponibles.

Pour ce qui concerne Fondettes, la région Centre a inscrit dans son budget la somme de 250 000 euros, afin que les moyens financiers nécessaires pour réaliser les équipements que requiert l'ouverture du BTS « gestion et maîtrise de l'eau » soient mis à disposition. Aujourd'hui, rien n'impose de supprimer cette formation. Des étudiants s'y sont déjà inscrits. Si le ministère maintient sa position, il devra leur proposer des solutions pertinentes, faute de quoi ces jeunes risquent de se retrouver dans l'impossibilité d'exercer le métier qu'ils ont choisi, métier passionnant et plus que jamais d'actualité depuis le Grenelle de l'environnement. Par ailleurs, monsieur le ministre, au moment où se déroule le débat sur le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux, le SDAGE, de ma région, il serait dommage de ne pas donner un signe.

Il en va de même en ce qui concerne Bourges : je n'ai malheureusement pas d'information selon laquelle, s'il y a fermeture de la formation au BTS ACSE en un an, il y aura maintien de la formation en deux ans.

Cela signifie bien que des problèmes se posent sur le terrain et que les choses ne sont pas aussi claires que les services du ministère le croient. Je me réserve le droit de vous interroger à nouveau si la façon dont elles se déroulent sur place ne correspond pas à ce que votre réponse laisse espérer.

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