Question de Mme GONTHIER-MAURIN Brigitte (Hauts-de-Seine - CRC-SPG) publiée le 06/02/2009

Question posée en séance publique le 05/02/2009

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Ma question s'adressait à Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.

« Une mesure dangereuse, hypocrite et contre-productive » :… (Vives exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Josselin de Rohan. C'est lamentable !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. … voilà le commentaire qu'inspirent à quatre scientifiques de renom, dont Albert Fert, prix Nobel de physique 2007, les modalités de mise en œuvre du décret sur le statut des enseignants-chercheurs.

Depuis lundi, un mouvement de grève illimité a été lancé dans les universités,…

M. Josselin de Rohan. Et certains enseignants refusent de communiquer les notes des étudiants, ce qui est tout de même un comble !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. … mouvement qui s'élargit aux étudiants, avec des manifestations prévues aujourd'hui et la semaine prochaine.

Non, les enseignants-chercheurs ne sont pas les défenseurs de « l'immobilisme, de la frilosité et du repli sur soi », comme les a caractérisés le Président de la République le 22 janvier ! Leur action est d'ailleurs loin d'être isolée.

Le 29 janvier, plus de deux millions de personnes ont manifesté leur refus de la politique gouvernementale, de son caractère autoritaire, répressif, méprisant ! (Protestations renouvelées sur les mêmes travées.)

M. Guy Fischer. C'est la vérité !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. La Guadeloupe est en grève générale.

Près de 65 000 personnes, professionnels de la santé, de l'éducation, de la justice, de la culture,…

M. Josselin de Rohan. Des nantis !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. … ont déjà signé l'« Appel des appels » pour donner l'alerte sur « les conséquences sociales désastreuses des réformes hâtivement mises en place » et accélérées au motif de la crise. Or cette crise découle des choix libéraux précédemment effectués par Nicolas Sarkozy.

Tous convergent, non pas pour refuser l'idée de réforme, mais pour rejeter les contenus et les méthodes de vos décisions, qui mettent à mal les fondements démocratiques de notre pays.

S'agissant de l'Université et de la recherche, votre réforme a ignoré les propositions des représentants de la communauté éducative et scientifique. Ses orientations sont dangereuses : 900 suppressions de postes, précarisation des personnels des universités, politique de financement qui récompense les réductions d'emplois et subordonne l'octroi des moyens futurs à l'acceptation des réformes. Tout cela confine au chantage !

M. Josselin de Rohan. La question !

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. C'est aussi la mise à mal du principe, fondamental, d'indépendance des chercheurs vis-à-vis du pouvoir. Quelle hypothèque sur la créativité, la qualité de la recherche publique et sa dynamique par rapport au privé ! Et que dire du démantèlement du CNRS, transformé en agence de moyens, où se développent justement des laboratoires mixtes !

Autant d'aberrations, déjà dénoncées lors de la discussion de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités, et qui éclatent aujourd'hui ! Une charte de bonne utilisation de ce décret ne changera rien ; je vous demande donc de le retirer, d'ouvrir une réelle et large concertation sur la politique de recherche, d'innovation et de formation dont ce pays a besoin ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. Guy Fischer. Retrait du décret !


Réponse du Ministère de l'éducation nationale publiée le 06/02/2009

Réponse apportée en séance publique le 05/02/2009

La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale.

M. Xavier Darcos, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prierai tout d'abord d'excuser l'absence de Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, retenue à Strasbourg. Je vous répondrai donc à sa place, madame Gonthier-Maurin.

Dans cette affaire, essayons de raison garder ! De quoi s'agit-il ? De faire en sorte que les enseignants-chercheurs de ce pays voient l'ensemble de leurs activités reconnues, en particulier leurs activités de recherche. Tel est bien l'enjeu de la modernisation des universités que Valérie Pécresse conduit depuis près de vingt mois à la tête de son ministère.

Le décret dont vous parlez garantira aux enseignants la prise en compte, non seulement de leur temps de présence devant les étudiants, dans les amphithéâtres ou dans les salles de travaux dirigés, mais aussi de l'ensemble de leurs autres activités : tutorat, enseignement à distance, encadrement pédagogique, insertion professionnelle, etc. Ces activités feront l'objet, comme il est naturel, d'une évaluation transparente et indépendante, réalisée non pas par des observateurs étrangers, mais par une instance nationale, le Conseil national des universités.

Valérie Pécresse a entendu une partie des attentes de la communauté universitaire…

M. Roland Courteau. On n'en a pas l'impression !

M. Xavier Darcos, ministre. … puisqu'elle a fait en sorte qu'un enseignant-chercheur bien évalué ne puisse pas voir son temps de service d'enseignement augmenter sans son accord ; elle a fait en sorte que le conseil d'administration de l'université puisse choisir au moins la majorité des promotions parmi les enseignants-chercheurs classés par le Conseil national des universités ; elle a fait en sorte que l'ensemble de la procédure soit plus juste et plus transparent puisque les décisions des universités devront être motivées et pourront faire l'objet d'un appel devant une instance nationale de réexamen.

Ces avancées sont le fruit d'une longue concertation, que Valérie Pécresse mène depuis plusieurs mois.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Elle n'a pas convaincu !

M. Xavier Darcos, ministre. Elle a d'ailleurs proposé à la communauté universitaire, vous l'avez rappelé, de rédiger une charte nationale de bonne application de ce décret, ce qui devrait être de nature à lever les dernières inquiétudes.

Enfin, madame Gonthier-Maurin, quittons une seconde la seule question du décret relatif aux enseignants-chercheurs. Comment ne pas prendre acte de tout ce que le gouvernement de François Fillon a fait pour le monde de l'enseignement supérieur depuis qu'il est aux affaires ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ça crève les yeux !

M. Xavier Darcos, ministre. Une augmentation du budget de chaque université de 10 % en 2009 ! Cinq milliards d'euros pour l'opération campus et 730 millions d'euros au titre du plan de relance !

M. Jean-Pierre Sueur. Dont un rattrapage de 460 millions !

M. Xavier Darcos, ministre. Un plan de revalorisation des carrières !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Et 45 000 chômeurs supplémentaires !

M. Xavier Darcos, ministre. Rappelons tout simplement que l'Université et la recherche, en particulier, ont figuré parmi les priorités du Président de la République. Ces objectifs sont aujourd'hui en voie de concrétisation.

M. Guy Fischer. On en reparlera !

M. Xavier Darcos, ministre. Le décret relatif aux enseignants-chercheurs est la clé de voûte de cette réforme. Par conséquent, il est dans l'intérêt de l'Université qu'il puisse s'appliquer dans la plus grande sérénité ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Guy Fischer. Retirez le décret !

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