Question de M. MERCIER Michel (Rhône - UC) publiée le 29/05/2009

Question posée en séance publique le 28/05/2009

M. Michel Mercier. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Mme Nicole Bricq. Et le Premier ministre ?

M. Michel Mercier. Elle porte, elle aussi, sur le prix du lait. Le fait que la même question soit posée sur toutes les travées de cet hémicycle signale la gravité de la situation que connaissent aujourd'hui les producteurs de lait.

Tous les mois, la « paie du lait » – j'emploie à dessein cette expression, qui est utilisée par les intéressés eux-mêmes – apporte aux agriculteurs des ressources régulières qui leur permettent de vivre.

Donc, depuis la dernière « paie du lait », l'inquiétude et la colère s'emparent des producteurs laitiers, tant la baisse du prix du lait a été forte.

Comme vous l'avez justement souligné, monsieur le ministre, les producteurs laitiers sont tout de même les seuls qui livrent leur production en ne connaissant son prix que le quinze du mois suivant !

C'est les mettre dans une situation de dépendance qui est aujourd'hui particulièrement grave, même s'il est vrai que, depuis l'injonction de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, la politique interprofessionnelle de détermination du prix du lait a cessé d'être. Par ailleurs, l'amendement que nous avons voté en décembre 2008 n'a pas permis d'organiser de nouvelles négociations interprofessionnelles pour fixer le prix du lait.

Cette absence de régulation pouvait probablement se justifier dans une période où le prix du lait et la consommation augmentaient. Mais, on le voit bien, pour le lait comme pour le reste, la crise économique tue la déréglementation.

On a donc besoin de retrouver un minimum de réglementation. On ne peut pas livrer l'agriculture à la déréglementation, parce qu'il s'agit de secteur d'activité particulier.

Vous venez d'annoncer des mesures, monsieur le ministre, mais nous attendons encore…

M. René-Pierre Signé. Encore un pas en avant !

M. Michel Mercier. … que vous nous disiez jusqu'où le Gouvernement est prêt à aller pour redonner confiance aux producteurs laitiers de ce pays. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Alain Vasselle. C'est le même problème pour les céréaliers !


Réponse du Ministère de l'agriculture et de la pêche publiée le 29/05/2009

Réponse apportée en séance publique le 28/05/2009

M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur Mercier, vous m'avez souvent entendu exprimer dans cet hémicycle une conviction profonde et que j'emporterai…

Mme Nicole Bricq. Dans la tombe ?

M. Michel Barnier, ministre. … toujours avec moi : on ne peut livrer ni l'alimentation, ni l'agriculture en général – la filière laitière en particulier – à la seule loi du marché.

M. Jean-Pierre Sueur. Très bien !

M. René-Pierre Signé. C'est pourtant ça, le libéralisme !

M. Guy Fischer. Et même l'ultralibéralisme…

M. Michel Barnier, ministre. Je ne me résoudrai pas, que ce soit au niveau européen ou au niveau national, à ce que la loi du marché, qui est souvent celle du moins-disant en matière économique, sociale et environnementale, soit la règle.

Voilà pourquoi je me bats, et continuerai à le faire, en faveur d'une régulation européenne.

Voilà pourquoi, en accord avec le Premier ministre, nous avons pris la décision d'encourager, par la proposition que j'évoquais précédemment, l'émergence d'un nouveau cadre de régulation au niveau national.

Je rappelle, mesdames, messieurs les sénateurs, qu'auparavant, dans le cadre d'une interprofession, il y avait un risque juridique. Nous avons évalué ce risque au regard de la loi européenne sur la concurrence comme au regard de la loi nationale.

Le cadre que vous avez voté à l'unanimité – aussi bien au Sénat qu'à l'Assemblée nationale – donne davantage de garanties juridiques. Nous travaillons à l'intérieur de ce cadre et nous impulsons la négociation, comme nous l'avons fait avec la désignation des médiateurs et la proposition de régulation formulée ce matin. Celle-ci vise à fixer un cap pour que les prix annuels soient plus justes. À partir de ce cap, que doit déterminer le Centre national interprofessionnel de l'économie laitière, les discussions pourraient s'engager.

Il me semble que la proposition que j'ai adressée ce matin à M. Brichart, le président du CNIEL, donne à l'interprofession les moyens de construire, si du moins elle en a la volonté, une relation contractuelle durable, sur la base d'indices de prix qu'elle peut désormais élaborer.

Il reviendra aux producteurs et aux industriels de décliner, dans le cadre de contrats, les modalités de calcul du prix du lait. Naturellement, celles-ci seront propres à chaque entreprise.

Pour sécuriser les relations entre les producteurs et les industriels, il faut des engagements sur les volumes, sur les calendriers de livraison, sur les conditions de règlement – vous les avez vous-même évoquées, comme je l'avais fait tout à l'heure – et sur les modalités de renégociation ou de résiliation des contrats.

Je pense pouvoir dire, lucidement et tout en restant prudent, car cette discussion est extrêmement difficile, que notre proposition va donner de la visibilité et de la sécurité à une filière qui en a absolument besoin. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

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