Question de M. BIWER Claude (Meuse - UC) publiée le 23/07/2009

M. Claude Biwer attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur la radiation de la liste électorale de la commune de Douaumont prise à l'encontre de Mme le maire de cette commune, sur requête du sous-préfet de Verdun.

Il rappelle que Douaumont fait partie des neuf villages détruits par la guerre de 1914-1918 et que ce n'est que grâce à la volonté de quelques familles, dont celle de l'actuelle maire, que cette commune a pu revivre et permettre ainsi la reconstitution d'une équipe municipale.

Cette radiation, ainsi que d'autres qui pourraient intervenir, conduirait à la suppression pure et simple d'une commune et de son conseil municipal, régulièrement élu par la population, et à le remplacer par une délégation spéciale désignée par le préfet.

Il lui demande de préciser les initiatives qu'il compte prendre visant à faire en sorte que le mandat de Mme le maire de Douaumont puisse être prolongé jusqu'à son terme, afin qu'elle puisse poursuivre la mission qui lui a été confiée par les électeurs de sa commune.

- page 1819


Réponse du Ministère de l'outre-mer publiée le 18/11/2009

Réponse apportée en séance publique le 17/11/2009

M. le président. La parole est à M. Claude Biwer, auteur de la question n° 604, adressée à M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

M. Claude Biwer. Comme je l'évoquais à l'instant, cette question très particulière peut concerner tous les ministres. Elle porte sur une des communes de mon département, au nom prestigieux de Douaumont, que l'on semble vouloir rayer de la carte, ce qui perturbe quelque peu les élus de ce département, en particulier le président de l'association locale des maires que je suis.

Faisant suite à une requête de M. le sous-préfet de Verdun, le tribunal d'instance de cette commune a décidé, par jugement en date du 25 juin 2009, de radier de la liste électorale de la commune de Douaumont huit personnes, dont la maire, Mme Minmeister, ainsi que cinq autres élus de cette même commune.

Je rappellerai que la commune de Douaumont a peu d'habitants, ce qui se comprend aisément quand on connaît son histoire. Au moment où nous venons de célébrer le 11 novembre, cela prend une signification particulière.

Je rappelle également que Mme le maire de Douaumont figure sur la liste électorale de la commune depuis 1969. Elle y résidait et exerçait la profession de commerçante, la seule activité du site d'ailleurs, jusqu'en 2003. Maire de cette commune depuis 1989, elle a été constamment réélue depuis lors et se dévoue sans compter au service de sa commune. J'ajoute que son père fut également maire de Douaumont pendant de longues années.

Ès qualités, Mme Minmeister a accueilli de très nombreuses personnalités dans cette commune si emblématique de la tragédie qui s'est nouée au cours de la Première Guerre mondiale. Parmi les visiteurs figurent les Présidents de la République. L'actuel Président de la République, Nicolas Sarkozy nous a honorés de sa présence le 11 novembre 2008, à l'occasion du 90ème anniversaire de la victoire de 1918.

Douaumont fait partie des neuf villages détruits par faits de guerre entre 1914 et 1918 et c'est grâce à la volonté de quelques familles, dont celles de Mme le maire de Douaumont, que cette commune a pu revivre, moyennant quelques reconstructions, et reconstituer une équipe municipale. Dans le même temps, sept autres villages, également détruits, n'ont pas eu cette chance et sont désormais gérés par une commission municipale et un président, extérieurs à ces communes et nommés par le préfet.

Ce sont toutes les raisons pour lesquelles j'avais demandé à M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de bien vouloir faire en sorte que les mandats de Mme Minmeister, l'actuelle maire de Douaumont, comme ceux des autres conseillers municipaux radiés de la liste électorale, puissent se poursuivre jusqu'à leur terme, c'est-à-dire jusqu'aux prochaines élections municipales.

M. le ministre m'avait répondu favorablement, et je l'en remercie, car c'est un point qui méritait l'attention de tous. Mais, si je me réjouis de cette réponse, permettez-moi néanmoins de vous dire qu'elle ne règle rien pour l'avenir.

Que se passera-t-il lors des prochaines élections municipales? Douaumont restera-t-elle une commune de plein exercice dotée d'un conseil municipal élu par la population ou sera-t-elle désormais gérée, elle aussi, par une commission municipale de trois membres nommés par le préfet ? Cela ne constituerait pas, de mon point de vue, une grande avancée pour l'exercice de la démocratie.

À tout prendre et pour l'avenir, ne vaut-il mieux pas que Douaumont soit gérée par des élus, même si certains habitent une commune voisine ou proche, plutôt que de voir des personnalités qui ne disposent d'aucune attache, même antérieure, au petit village de Douaumont, nommées par l'autorité préfectorale ?

Pour ma part, j'estime qu'il est nettement préférable que les communes soient gérées par des élus...

Douaumont, qui a été détruite voilà plus de quatre-vingt-dix ans, risque de disparaître cette fois administrativement, ce qui ne me semble pas souhaitable.

Les élus de la Meuse m'ont donc demandé d'être leur interprète pour essayer de trouver avec vous une solution acceptable. Eu égard au statut emblématique de Douaumont, il me serait agréable de donner une issue heureuse à cette démarche en privilégiant l'élection plutôt que la nomination.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer. Monsieur le sénateur, vous avez interrogé M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, sur la radiation des listes électorales du maire de Douaumont, car vous craignez qu'à terme cette commune ne soit gérée par une délégation municipale, au même titre que les autres villages détruits pendant la bataille de Verdun.

La commune de Douaumont revêt une dimension symbolique forte aux yeux de nos compatriotes. C'est, en effet, la seule commune de la zone de combats de la bataille de Verdun qui dispose d'un conseil municipal élu. Aussi M. le ministre de l'intérieur a-t-il été particulièrement sensible à l'émoi suscité par cette affaire. Il m'a chargée de vous confirmer ici les éléments de réponse qu'il vous a communiqués par courrier et de vous de préciser qu'une issue favorable peut être trouvée à cette situation.

Comme vous l'indiquez, le tribunal d'instance de Verdun a prononcé la radiation des listes électorales de Douaumont de huit électeurs qui n'étaient ni domiciliés dans la commune ni inscrits au rôle des contributions directes. Parmi eux figurent six conseillers municipaux, dont le maire de Douaumont et deux membres de sa famille.

Dans l'immédiat, le maire de Douaumont pourra continuer à exercer son mandat jusqu'à son terme, puisque le code électoral ne prévoit pas la démission d'office d'un conseiller municipal qui cesse de remplir, après son élection, la condition d'éligibilité tenant à l'inscription sur les listes électorales de la commune au 1er janvier de l'année de l'élection. Le Conseil d'État considère que cette condition s'apprécie au jour de l'élection, et non en cours de mandat.

Ainsi, sauf démission volontaire de sa part, un conseiller municipal conserve son mandat dans l'hypothèse où il aurait été radié des listes électorales de la commune par une décision de justice postérieure à son élection.

Actuellement, sur un effectif de neuf membres, le conseil municipal de Douaumont compte trois élus résidents et six élus qui ne sont ni domiciliés dans la commune ni inscrits au rôle des contributions directes.

Pour l'avenir, des solutions existent.

Dans la perspective du prochain renouvellement du conseil municipal, les conseillers municipaux radiés, dont le maire et les deux membres de sa famille, peuvent mettre leur situation en conformité avec les dispositions de l'article L. 11 du code électoral, qui prévoit que sont inscrits sur la liste électorale, sur leur demande, tous les électeurs qui ont leur domicile réel ou une résidence depuis six mois au moins dans la commune ; ceux qui figurent pour la cinquième année consécutive au rôle d'une des contributions directes communales ou encore ceux qui sont assujettis à une résidence obligatoire en qualité de fonctionnaires publics. Ces conditions ne sont pas cumulatives.

Par ailleurs, l'article L. 228 du code électoral prévoit qu'un certain nombre de conseillers peuvent ne pas résider dans la commune. Le nombre de ces conseillers « forains » ne peut excéder quatre pour les conseils municipaux comportant neuf membres, ce qui est le cas ici.

En l'état actuel, la situation de Douaumont ne paraît donc pas nécessiter la mise en place d'une commission spéciale.

Comme vous pouvez le constater, monsieur le sénateur, si les élus et les électeurs de Douaumont souhaitent conserver leur conseil municipal, ils disposent de tous les moyens pour le faire.

M. le président. La parole est à M. Claude Biwer.

M. Claude Biwer. Je vous remercie, madame la ministre, de la réponse que vous m'avez apportée. Je constate que nous sommes sur la bonne voie, et j'espère que les choses se décanteront petit à petit.

Je voudrais néanmoins rappeler que tous les terrains de la commune de Douaumont ont été intégrés au domaine de l'État ; ils sont à ce titre gérés par l'ONF, l'Office national des forêts, et exonérés d'impôts. La condition qui tient à l'inscription sur le rôle des contributions directes n'est donc pas facile à remplir ; une modification des textes est sans doute nécessaire. Je continuerai donc à travailler sur ce thème pour trouver avec vous des solutions adéquates.

Voilà quatre ou cinq ans, alors que je comparais la dotation globale de fonctionnement de la ville de Paris, qui s'élève à quelque 600 euros, à celle de la moyenne des villes de mon département, à savoir 60 euros, le ministre de l'intérieur de l'époque, Nicolas Sarkozy, m'avait fait remarquer que je ne devais pas me plaindre, car l'une des communes de mon département bénéficiait aussi d'une DGF de 600 euros. Il parlait de Douaumont !

Veillons donc à ne pas la perdre, car cela risquerait de fausser de nouveau les termes du débat !

- page 10598

Page mise à jour le