Question de M. CHEVÈNEMENT Jean-Pierre (Territoire de Belfort - RDSE) publiée le 18/11/2009

Question posée en séance publique le 17/11/2009

Concerne le thème : Les collectivités territoriales

M. Jean-Pierre Chevènement. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, j'ai lu le projet de loi de réforme des collectivités territoriales : une disposition m'a particulièrement interpellé, celle qui prévoit la création de « communes nouvelles ». (Marques d'approbation sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Monsieur le secrétaire d'État, dès lors que l'intercommunalité a mis en commun les compétences stratégiques et les ressources de la taxe professionnelle des communes, il n'y a pas lieu de fusionner les compétences de proximité, qui restent l'apanage de ces communes. Pourquoi, dans ces conditions, vouloir en revenir à l'esprit de la loi Marcellin de 1971, dont on ne peut pas dire qu'elle ait rencontré un éclatant succès ?

M. Jean-Pierre Sueur. Loi funeste !

M. Jean-Pierre Chevènement. Est-ce une prédisposition génétique ?

L'intercommunalité, avec ses 2 600 établissements publics de coopération intercommunale, a largement remédié à l'émiettement communal qui caractérise la France des 36 600 communes.

Vous alléguez le volontariat des communes. Ce n'est pas vrai s'agissant des EPCI existants, qui couvrent 90 % du territoire et pour lesquels il existe des règles de majorité qualifiée : deux tiers des communes pesant plus de deux tiers de la population. Mais le tiers restant ? Quelle protection lui accordez-vous ?

La population, dites-vous, sera appelée à se prononcer en cas de désaccord des conseils municipaux. Mais il suffira de la majorité absolue des suffrages du quart des inscrits ! Par conséquent, cette règle ne protège pas les communes petites et moyennes dès lors que la ville centre et les communes de sa première couronne auront décidé d'absorber la deuxième couronne.

M. le président. Il vous reste vingt secondes, mon cher collègue.

M. Jean-Pierre Chevènement. La loi de 1999 avait prévu une solution simple et pratique. Votre réforme est donc non seulement inutile, monsieur le secrétaire d'État, mais encore dangereuse. Elle laisse penser que la démocratie communale est un luxe et que 2 600 communes nouvelles doivent, à terme, remplacer les 36 600 communes existantes.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !

M. Jean-Pierre Chevènement. Ce serait un coup très grave porté au bénévolat de 500 000 conseillers municipaux et à la disponibilité de dizaines de milliers de maires et de maires adjoints dont l'esprit de solidarité maille encore le pays.

Pourquoi donc, monsieur le secrétaire d'État, avoir voulu inciter, par des dispositions fiscales, à la transformation de ces EPCI en « communes nouvelles » ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG ainsi que sur certaines travées de l'Union centriste.)


Réponse du Secrétariat d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales publiée le 18/11/2009

Réponse apportée en séance publique le 17/11/2009

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Monsieur Chevènement, vous m'interrogez sur les communes nouvelles.

Le projet de loi vise notamment à créer un nouveau dispositif de fusion des communes, plus simple, plus souple et plus incitatif que le système issu de la loi dite Marcellin du 16 juillet 1971. Je crois que tout le monde en convient : ce dernier s'est révélé peu efficace, c'est le moins que l'on puisse dire.

Ce nouveau dispositif repose exclusivement sur le volontariat. Il s'applique à des communes contiguës – j'insiste sur ce mot – appartenant, mais pas obligatoirement, à un EPCI à fiscalité propre, qui pourront fusionner et devenir une commune nouvelle. La commune nouvelle sera une commune comme une autre, soumise aux mêmes règles de droit.

Le dispositif permettra aux communes qui ont atteint un degré d'intégration suffisamment fort dans le cadre de l'intercommunalité – cadre qui vous est si cher, monsieur le sénateur, et je tiens à vous rendre hommage à cet égard –, d'aller plus loin et de fusionner, si elles le souhaitent.

La démarche sera donc facultative et reposera, je le répète, sur le volontariat. Nous aurons l'occasion de revenir sur ce point pendant les débats sur la partie institutionnelle de la réforme. (MM. Courtois et Hyest applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement, pour la réplique.

M. Jean-Pierre Chevènement. Monsieur le secrétaire d'État, vous avez mal lu votre projet de loi ! (Sourires sur certaines travées du RDSE ainsi que sur les travées du groupe socialiste.) Il ne s'applique pas seulement aux communes contiguës puisqu'il concerne également les établissements publics de coopération intercommunale en obéissant, je le rappelle, à des règles de majorité qualifiée.

M. Jean-Pierre Sueur. Très bien !

M. Jean-Pierre Chevènement. La consultation qui sera organisée – un référendum, en quelque sorte ! – n'est absolument pas protectrice puisqu'il suffira qu'un quart des inscrits votent pour entériner la fusion, c'est-à-dire l'absorption des communes petites et moyennes par la grande. (M. Jean-Pierre Michel applaudit.)

M. Roland Courteau. Et voilà !

M. Jean-Pierre Chevènement. J'ajoute que la création de communes déléguées sera laissée à la discrétion des conseils municipaux des communes nouvelles.

Cette réforme ne sera donc absolument pas protectrice et nous laisse entendre que vous voulez aller vers une France des 2 600 communes ! (M. Jean-Pierre Michel applaudit.)

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