Question de M. BOUTANT Michel (Charente - SOC) publiée le 05/11/2009

M. Michel Boutant attire l'attention de M. le Premier ministre sur la décision d'Eutelsat de confier à une fusée chinoise le lancement, en 2010, de son satellite de télécommunications W3B. Il attire aussi son attention sur l'attitude à cette occasion de l'État français qui participe au capital d'Eutelsat à travers la Caisse des dépôts et consignations.

En mars dernier, l'opérateur européen de satellites Eutelsat a confirmé le choix d'une fusée chinoise Long March pour le lancement de son satellite de télécommunications W3B. Cette décision pose des problèmes d'ordre commercial - favoriser l'essor d'un concurrent du lanceur européen Arianespace -, d'ordre stratégique puisque le spatial est un domaine de souveraineté qu'il s'agit de conforter tout en développant et en protégeant les acquis technologiques et, finalement, d'ordre social puisque Arianespace fait vivre la filière spatiale française, source de milliers d'emplois.

Dans ce contexte, il souhaite connaître, d'une part, quelle a été la position de l'État actionnaire lors de la prise de la décision d'Eutelsat ici évoquée, et, d'autre part, quelles sont les mesures envisagées pour soutenir, développer et protéger l'industrie spatiale française et européenne, en particulier dans le domaine des lanceurs.







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Transmise au Ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche


Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat publiée le 20/01/2010

Réponse apportée en séance publique le 19/01/2010

M. Michel Boutant. Madame la secrétaire d'État, en mars dernier, l'opérateur européen de satellites EUTELSAT a confirmé le choix d'une fusée chinoise Long March pour le lancement de son satellite de télécommunications W3B.

Cette décision pose des problèmes d'ordre commercial, puisqu'elle favorise l'essor d'un concurrent du lanceur européen Arianespace ; d'ordre stratégique, puisque le spatial est un domaine de souveraineté qu'il s'agit de conforter tout en développant et en protégeant les acquis technologiques ; et, finalement, d'ordre social, puisque Arianespace fait vivre la filiale spatiale française, source de milliers d'emplois.

Dans ce contexte, je souhaiterais connaître, d'une part, quelle a été la position de l'État actionnaire lors de la prise de décision d'EUTELSAT que je viens d'évoquer, d'autre part, quelles sont les mesures envisagées pour soutenir, développer et protéger l'industrie spatiale française et européenne, en particulier dans le domaine des lanceurs.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat. Monsieur le sénateur, EUTELSAT a en effet annoncé en mars 2009 le choix de la fusée chinoise Long March pour le lancement du satellite W3B. Auparavant, EUTELSAT avait confié vingt-quatre de ses quarante lancements à Arianespace.

EUTELSAT est depuis 2001 une société anonyme, désormais cotée à la Bourse de Paris. Avant de choisir un fournisseur, elle s'appuie sur un certain nombre de critères. Il est ainsi tout à fait compréhensible qu'elle diversifie ses fournisseurs de services de lancement, ne serait-ce que par crainte de voir ses satellites durablement cloués au sol en cas d'accident et d'interruption prolongée conséquente d'un lanceur.

Il semble aussi que l'entreprise ait décidé de confier le lancement du satellite W3B à une fusée Long March parce que ce lanceur serait, selon les informations disponibles, moins cher qu'Ariane.

Il convient de préciser que la décision d'EUTELSAT ne met nullement en péril l'équilibre économique d'Arianespace, dont le succès commercial est réel. En témoignent un carnet de commandes particulièrement fourni et le fait que la société a pu doubler le prix des lancements en trois ans. Sept lancements d'Ariane ont eu lieu en 2009, et autant sont programmés en 2010.

La décision d'EUTELSAT témoigne également de la vitalité de l'industrie spatiale européenne, vitalité rendue possible par la politique européenne d'autonomie technologique en matière spatiale.

Cette politique a amené les États européens et l'Agence spatiale européenne à lancer des programmes de développement de technologies européennes indépendantes des technologies réglementées américaines, ce qui a permis d'augmenter la compétitivité et la maturité de l'industrie européenne, garantes de la souveraineté européenne dans ce domaine stratégique. À titre d'exemple, EUTELSAT a fait fabriquer trente-neuf de ses quarante satellites par les industriels européens Astrium et Thales Alenia Space.

La politique spatiale européenne d'autonomie technologique permet ainsi aux constructeurs européens d'accéder à un marché plus large. À l'instar d'autres industriels européens, Thales Alenia Space, constructeur du satellite W3B, a la maîtrise de ses technologies et propose des satellites « ITAR-free », qui peuvent être utilisés par l'ensemble des opérateurs et mis en orbite par tous les lanceurs.

Je vous confirme par ailleurs, monsieur le sénateur, que l'État est particulièrement attentif au développement de l'industrie spatiale française et européenne. Ce soutien plein et entier s'est ainsi manifesté tout au long de la présidence française de l'Union européenne, au second semestre 2008, et a pris corps à l'occasion du conseil ministériel de La Haye, en novembre dernier, où plus de 10 milliards d'euros ont été investis dans la filière spatiale européenne, dont 2,3 milliards d'euros pour la France.

Enfin, dans le cadre de l'emprunt national, l'espace constitue, avec l'aéronautique, une action qui devrait être financée à hauteur de 2 milliards d'euros. Dans son discours du 14 décembre 2009, le Président de la République a rappelé l'importance de l'engagement des travaux préparatoires pour la génération de lanceur à venir Ariane 6.

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