Question de M. COUDERC Raymond (Hérault - UMP) publiée le 23/09/2010

M. Raymond Couderc interroge M. le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État sur l'application du décret n° 2008-851 du 26 août 2008 relatif aux conditions d'application et de répartition de la taxe annuelle sur les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent situés dans les eaux intérieures ou la mer territoriale.

Ce décret mérite en effet d'être précisé sur au moins deux points.

D'une part, à propos du mode de calcul de la part communale de la taxe spéciale sur les éoliennes en mer. Le calcul de la répartition de la première moitié du produit de la taxe dépend de la population totale des communes littorales. Le texte précise : « Le chiffre de la population pris en compte est celui de la population totale mentionnée à l'article R. 2151-1 du code général des collectivités territoriales et majoré, le cas échéant, de la population résultant conformément aux dispositions des articles R. 2151-4 à R. 2151-7 du même code d'opérations de recensements complémentaires et d'attribution de population fictive ». Mais la fiscalité qui s'applique aux communes littorales utilise généralement la population DGF (dotation globale de fonctionnement ). Qu'en est-il dans ce cas ? En somme, quelle est la "bonne" population à prendre en compte dans le cadre de cette répartition : légale, DGF (avec ou sans double-comptes ?), touristique ?

D'autre part, sur la question d'un mode de calcul de la taxe privilégiant fortement le nombre d'habitants par rapport à la distance à la côte du projet éolien. Cela introduit une distorsion préjudiciable au développement de ces projets. En effet, les recettes fiscales peuvent être dopées au-delà du raisonnable pour certaines communes éloignées du projet et n'ayant que très peu d'impact pour peu que leur population soit suffisamment importante au regard de communes moins peuplées pourtant bien plus concernées. C'est par exemple le cas pour un projet d'éoliennes en mer actuellement en cours entre les départements de l'Hérault et de l'Aude. Dans le cadre de ce projet, il apparaît que les villes d'Agde et de Narbonne ont une population importante. Seulement, il n'y a de "visibilité" sur le projet que pour le Cap d'Agde et Narbonne Plage. Ainsi, ces deux villes vont capter l'essentiel de la taxe, car leurs stations se trouvent dans les 12 miles nautiques, au détriment de communes uniquement littorales, comme Vias, Portiragnes, Sérignan ou Valras. Concrètement, et selon des simulations utilisant la population légale des derniers recensements, Narbonne toucherait ainsi 2,5 fois plus de taxe que Sérignan ou Valras...

Il lui demande donc de bien vouloir clarifier la répartition de cette taxe sur les éoliennes en mer, afin notamment de mettre fin aux distorsions fiscales pouvant résulter du type de population prise en compte dans le projet.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé du commerce extérieur publiée le 03/11/2010

Réponse apportée en séance publique le 02/11/2010

M. Raymond Couderc. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, voilà un an et demi, j'avais posé une question écrite au ministre chargé du budget sur l'application du décret n° 2008-851 du 26 août 2008 relatif aux conditions d'application et de répartition de la taxe annuelle sur les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent situées dans les eaux intérieures ou la mer territoriale. N'ayant pas reçu de réponse, je me permets d'interroger de nouveau le Gouvernement.

En effet, ce décret mérite d'être précisé sur au moins deux points.

Le premier point concerne le mode de calcul de la part communale de la taxe spéciale sur les éoliennes en mer.

Le calcul de la répartition de la première moitié du produit de la taxe dépend de la population totale des communes littorales. Selon le code des impôts, le « chiffre de la population pris en compte est celui de la population totale mentionnée à l'article R. 2151-1 du code général des collectivités territoriales et majoré, le cas échéant, de la population résultant conformément aux dispositions des articles R. 2151-4 à R. 2151-7 du même code d'opérations de recensements complémentaires et d'attribution de population fictive ».

Mais le calcul de la fiscalité applicable aux communes littorales est généralement basé sur la dotation globale de fonctionnement. Qu'en est-il dans ce cas ? En somme, quel est le bon mode de calcul de la population à prendre en compte dans le cadre de cette répartition ? Le mode légal ? Le mode basé sur la dotation globale de fonctionnement, avec ou sans double compte ? Ou encore le mode touristique ?

Second point, un mode de calcul de la taxe privilégiant fortement le nombre d'habitants par rapport à la distance à la côte du projet éolien introduit une distorsion préjudiciable au développement de ces projets. En effet, les recettes fiscales peuvent être dopées au-delà du raisonnable pour certaines communes dont le centre-ville est éloigné du projet et n'en ressent que très peu les effets, pour peu que la population soit suffisamment importante par rapport à des communes moins peuplées mais bien plus concernées.

C'est par exemple le cas pour un projet d'éoliennes en mer qui est actuellement en cours entre les départements de l'Hérault et de l'Aude. Les centres-villes d'Agde et de Narbonne ont une population importante, mais sont éloignés de la côte ; les installations seront visibles seulement depuis le Cap d'Agde et Narbonne Plage, qui ont de la population saisonnière. Or les deux villes capteront l'essentiel de la taxe, car leurs stations se trouvent dans les douze milles nautiques, au détriment de communes uniquement littorales, comme Vias, Portiragnes, Sérignan ou Valras-Plage. Concrètement, et selon des simulations utilisant la population légale des derniers recensements, Narbonne toucherait ainsi deux fois et demie plus de taxe que Sérignan ou Valras-Plage, alors qu'elle subira plus faiblement les effets du projet !

Aussi, madame la secrétaire d'État, pourriez-vous préciser à la représentation nationale le mode de répartition de cette taxe sur les éoliennes en mer, afin notamment de mettre fin aux distorsions fiscales pouvant résulter du type de population prise en compte dans le projet ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur. Monsieur le sénateur, votre question m'offre l'occasion de faire un point d'ensemble sur la fiscalité relative aux éoliennes, c'est-à-dire aux « installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent situées dans les eaux intérieures ou la mer territoriale ».

En effet, un certain nombre de modifications législatives sont intervenues depuis que vous avez posé votre question écrite – je pense notamment à la loi du 27 juillet 2010 de modernisation de l'agriculture et de la pêche –, et je suis désolée que vous n'ayez pas reçu de réponse.

Vous le savez, la taxe que vous évoquez est due par l'exploitant des éoliennes et assise sur le nombre de mégawatts installés dans chaque unité de production au 1er janvier de l'année d'imposition.

Le produit de cette taxe est affecté au fonds national de compensation de l'énergie éolienne en mer, à l'exception des prélèvements effectués au profit de l'État au titre des frais d'assiette, de recouvrement, ainsi que de dégrèvement et non-valeurs que celui-ci prend à sa charge.

Comme je l'indiquais, la répartition des ressources du fonds en question a été modifiée par la loi du 27 juillet 2010 de modernisation de l'agriculture et de la pêche.

Avant l'adoption de cette loi, une première moitié du fonds était répartie par le préfet du département dans lequel est installé le point de raccordement au réseau public de distribution ou de transport d'électricité des éoliennes en mer entre les communes littorales d'où elles sont visibles, en tenant compte de la distance qui les sépare de l'un des points du territoire des communes concernées et de la population de ces dernières.

La répartition s'effectue désormais – c'est l'une des modifications introduites par la loi – directement au profit des communes littorales.

La seconde moitié des ressources prélevées était répartie par le conseil général du département dans lequel est installé le point de raccordement de l'éolienne au réseau public de distribution ou de transport d'électricité, dans le cadre d'un fonds départemental pour les activités maritimes de pêche et de plaisance.

Désormais, cette seconde moitié est répartie de la manière suivante : 35 % des ressources sont affectées au comité national de l'organisation professionnelle des pêches maritimes et des élevages marins pour le financement de projets concourant à l'exploitation durable des ressources halieutiques et 15 % des ressources sont affectées, à l'échelle de la façade maritime, au financement de projets concourant au développement durable des autres activités maritimes.

Je vous précise que la loi adoptée en 2010 n'a pas modifié les critères de répartition. C'est donc le décret du 26 août 2008, que vous avez évoqué, qui fixent les conditions de cette répartition. Il est prévu que les communes bénéficiaires du fonds sont les « communes littorales définies à l'article L. 321-2 du code de l'environnement et dont, dans un rayon de 12 milles marins autour d'une unité de production, celle-ci est visible d'au moins un des points de leur territoire. »

La répartition du produit entre les communes concernées résulte de l'application d'un taux moyen, calculé à partir de deux taux tenant respectivement compte de la population et de la distance à l'éolienne.

Le chiffre de la population pris en compte est bien celui de la population totale, d'après le dernier recensement effectué par l'Institut national de la statistique et des études économiques, l'INSEE. C'est d'ailleurs la population qui est habituellement retenue en matière fiscale ; il n'y a pas de spécificité en la matière.

En tout état de cause, ni la législation, modifiée par la loi du 27 juillet 2010 de modernisation de l'agriculture et de la pêche, ni le décret de 2008 ne font de distinction entre les communes depuis lesquelles les éoliennes maritimes sont visibles et les communes littorales. Les conditions sont cumulatives, le fonds ayant uniquement pour objet de compenser les gênes visuelles ou économiques subies par une collectivité.

M. le président. La parole est à M. Raymond Couderc.

M. Raymond Couderc. Il y a effectivement un problème d'acceptabilité de telles installations par les populations des communes littorales.

Si la majorité des habitants de villes comme Agde ou Narbonne, que j'ai mentionnées tout à l'heure, sont en centre-ville – seule une infime partie de la population réside sur la côte –, certaines communes sont, en revanche, entièrement littorales. Et il risque d'y avoir des difficultés si ces dernières estiment que la répartition retenue les pénalise au profit de communes plus peuplées mais dont les habitants ne vivent pas directement en bord de mer.

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