Question de M. BOURQUIN Martial (Doubs - SOC) publiée le 13/10/2010

Question posée en séance publique le 12/10/2010

Concerne le thème : L'accès au logement

M. Martial Bourquin. Monsieur le secrétaire d'État, après avoir entendu les différentes interventions de mes collègues, je souhaiterais faire quelques remarques.

Tout d'abord, la France des propriétaires, ça ne marche pas. (Exclamations sur les travées de l'UMP.) En 2007, 56 % des Français étaient propriétaires ; aujourd'hui, malgré la déductibilité des intérêts d'emprunt, les prêts à taux zéro, la maison à quinze euros par jour et, surtout, des taux d'intérêt historiquement bas, le pourcentage reste quasiment le même.

D'ailleurs, les aides que vous proposez aujourd'hui – je pense notamment au taux zéro refondu, qui n'est pas soumis à une condition de ressources – risquent de bénéficier uniquement à ceux qui avaient déjà un profil d'acheteur idéal.

Ensuite, je n'ai pas l'impression de voir les HLM se vider d'un seul coup et des ménages acheter en masse. Ce ne sont pas les mêmes personnes qui sont concernées. Il y a, d'un côté, celles qui sont considérées comme solvables par les banques et, de l'autre, celles qui n'obtiennent pas de prêt auprès des établissements bancaires parce qu'elles n'ont pas un emploi stable. À cet égard, il faudrait faire le point sur le nombre de CDI signés dans notre pays, car, chacun le sait, l'octroi du prêt immobilier est souvent conditionné par le fait que les aspirants propriétaires sont employés en CDI.

Par ailleurs, la France des propriétaires est une notion à manier avec prudence. Le rêve d'un pays de propriétaires a pris forme aux États-Unis et en Espagne, à marche forcée, et cet idéal s'est révélé un marchepied vers la précarité, parfois vers la ruine de certains propriétaires.

M. Guy Fischer. Voilà !

M. Martial Bourquin. Monsieur le secrétaire d'État, ne vous fondez pas sur ces exemples ! Essayons de trouver une solution qui soit conforme à la tradition de notre pays, qui comprend dix millions de locataires, mais aussi des personnes souhaitant accéder à la propriété.

Or la suppression de l'exonération de la contribution sur les revenus locatifs, qui représente un manque à gagner de 340 millions d'euros par an pour les offices HLM, revient à empêcher la construction de 20 000 logements, comme l'affirmait Didier Guillaume voilà quelques instants.

M. Claude Jeannerot. Eh oui !

M. Martial Bourquin. Et, dans le même temps, ce sont 10 millions de locataires du parc social qui paieront la moitié du bouclier fiscal. Ce n'est pas possible !

M. Guy Fischer. On marche sur la tête !

M. Martial Bourquin. Il doit y avoir dans notre pays un minimum de solidarité et d'égalité. Sur ce plan, les systèmes anglo-saxons dont vous vous réclamez sont certainement une impasse…

M. Guy Fischer. C'est mortifère !

M. Martial Bourquin. … et, surtout, ils nous empêcheraient de réunir les conditions nécessaires à la mise en place d'un vrai logement social de qualité dans notre pays. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

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Réponse du Secrétariat d'État au logement et à l'urbanisme publiée le 13/10/2010

Réponse apportée en séance publique le 12/10/2010

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, nous n'avons peut-être pas, en effet, la même philosophie en matière de politique du logement. (C'est vrai ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Mme Odette Terrade. Nous n'avons pas les mêmes valeurs !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. En effet, cette majorité souhaite que les Français soient propriétaires. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme Odette Terrade. Avec quel argent ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Il est possible que, au contraire, un certain nombre de sénateurs socialistes préfèrent que les Français soient locataires ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Marc Daunis. De logements décents !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. J'attire simplement votre attention sur un point : il me semble que les états généraux du logement, qui ont été organisés par l'USH, l'Union sociale pour l'habitat, ont lancé un appel pour une réforme globale de l'accession à la propriété.

M. Didier Guillaume. Ce n'est pas vrai !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. C'est exactement ce que nous avons fait à la demande de l'ensemble des acteurs du monde du logement au travers de ces états généraux, car il faut cesser d'opposer les politiques du logement dans notre pays.

M. Alain Gournac. Voilà !

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Certes, dans notre pays, nous avons besoin de construire des logements sociaux. Cependant, là encore, l'objectif d'une personne qui entre dans un logement HLM n'est pas d'y rester à vie, mais de progresser dans son parcours locatif pour, un jour, devenir propriétaire. (Exclamations sur les mêmes travées.)

M. Alain Gournac. Tout à fait !

M. Marc Daunis. Encore faut-il qu'elle le puisse !

M. Jean-Jacques Mirassou. C'est une image d'Épinal !

Mme Odette Terrade. Avec quels salaires ?

M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. C'est la raison pour laquelle nous ne souhaitons pas opposer les politiques les unes aux autres. (Marques de protestations sur les mêmes travées.)

Notre politique vise à produire plus de logements sociaux, plus de logements locatifs privés et à faciliter l'accession à la propriété. Telle est la politique que mène ce gouvernement ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour la réplique.

M. Claude Bérit-Débat. Je souhaite répondre à M. le secrétaire d'État au sujet des 340 millions d'euros qui sont ponctionnés aux organismes HLM, car c'est un vrai scandale. (Tout à fait ! sur les travées du groupe socialiste.)

Après avoir siphonné le dispositif du 1 % logement, le Gouvernement, sous votre autorité, monsieur le secrétaire d'État, s'attaque maintenant aux fonds propres des organismes d'HLM.

Or, comme l'ont indiqué mes collègues, et il faut y insister, 340 millions d'euros de recettes en moins, c'est 2 % d'augmentation de loyer pour les pauvres, qui vont devoir compenser la défaillance du Gouvernement, notamment concernant l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, l'ANRU.

Ensuite, quelles seront les conséquences d'une telle mesure pour les collectivités locales dont nous sommes les représentants au sein de la Haute Assemblée ? Les bailleurs sociaux se tourneront vers les collectivités locales pour remplacer leurs fonds propres, afin de faire face au surenchérissement des prix des terrains et aux surcoûts liés aux normes relatives aux performances énergétiques exigées par les collectivités.

Ce dispositif se retourne donc à la fois contre les locataires et contre les politiques des collectivités territoriales, au premier rang desquelles se trouvent les communes. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

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