Question de M. SIGNÉ René-Pierre (Nièvre - SOC) publiée le 27/10/2010

Question posée en séance publique le 26/10/2010

Concerne le thème : La rentrée scolaire

M. René-Pierre Signé. Monsieur le ministre, je veux vous interroger sur les zones d'éducation prioritaires, les ZEP, qui ont été créées en 1982 afin d'accorder des moyens éducatifs renforcés aux élèves des secteurs défavorisés. L'objectif était bien de « donner plus à ceux qui ont moins ».

Les ZEP se caractérisent par plus de dotations en heures et en postes d'enseignants, plus de surveillants et d'assistants, une présence adulte plus forte, davantage de crédits pédagogiques et moins d'élèves dans les classes.

Près de trente ans après leur création, elles sont plus que jamais critiquées : les résultats des élèves qui y sont scolarisés – ils sont issus pour la plupart de milieux défavorisés, ce qui n'est pas sans conséquence – ne rattrapent pas le niveau de ceux qui sont enregistrés par l'ensemble des jeunes Français.

Le ministère de l'éducation nationale a lancé à la rentrée 2010 une expérimentation des CLAIR, les programmes « collèges, lycées pour l'ambition, l'innovation et la réussite », annoncée à la fin des états généraux de la sécurité à l'école, menée dans une centaine d'établissements qui ne font pas forcément partie des réseaux ambition réussite, les RAR, mis en place en 2006.

Le ministère entend donc substituer aux dispositifs existant une nouvelle cartographie des établissements concentrant le plus de difficultés en matière de climat et de violence. Or le traitement de ces problèmes ne doit pas prendre le pas sur celui des difficultés scolaires, comme ce sera précisément le cas dans les CLAIR. Avec ces derniers, on est loin des principes présidant aux ZEP, qui, à l'origine, devaient contribuer à corriger l'inégalité sociale entre les élèves en renforçant l'action éducative.

Monsieur le ministre, les restrictions budgétaires responsables de l'arrêt de nombreux projets dans les départements, ainsi que la mise en place des CLAIR dans le second degré, nous conduisent à nous interroger sur l'avenir de l'éducation prioritaire, notamment dans le premier degré.

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Réponse du Ministère de l'éducation nationale publiée le 27/10/2010

Réponse apportée en séance publique le 26/10/2010

M. Luc Chatel, ministre. Monsieur le sénateur, l'éducation prioritaire a une trentaine d'années, puisque les ZEP datent des années quatre-vingt. Or je crois qu'il faut veiller à ne pas – passez-moi l'expression – jeter le bébé avec l'eau du bain : ce système fonctionne depuis trente ans et un milliard d'euros sont aujourd'hui investis dans l'éducation prioritaire, afin, comme vous l'avez justement souligné, de donner davantage aux élèves qui ont plus de besoins.

Aujourd'hui, les réseaux ambition réussite rassemblent environ deux cent cinquante collèges de notre pays, qui sont situés dans des zones particulièrement sensibles.

Il est d'ailleurs intéressant de constater que, aux termes de l'évaluation réalisée en 2010, le niveau d'obtention du brevet dans les réseaux ambition réussite a plutôt augmenté par rapport aux données dont nous disposions antérieurement, même si des difficultés subsistent dans ces collèges pour l'apprentissage des fondamentaux, notamment du français.

Comment pouvons-nous faire évoluer ce dispositif ?

Premièrement, il est important, me semble-t-il, que nous développions une vision globale de l'éducation prioritaire, des contrats urbains de cohésion sociale, de la politique de la ville et de la carte scolaire. Ces quatre dispositifs doivent être coordonnés, pour qu'ils puissent avancer de manière globale.

Le Premier ministre a indiqué qu'il décalait à 2011 la révision de la carte de la politique de la ville. Il me semble que l'éducation prioritaire doit être traitée dans le cadre de cette réflexion.

Deuxièmement, comme vous l'avez rappelé, monsieur le sénateur, nous avons expérimenté lors de la dernière rentrée un nouveau dispositif « collèges, lycées pour l'ambition, l'innovation et la réussite », dit CLAIR, dans cent cinq collèges et lycées. Ce dispositif est destiné aux établissements qui ont à la fois des élèves en difficulté scolaire, un recrutement d'élèves issus de populations défavorisés et, parfois, des problèmes en matière de sécurité. Il s'agit de leur accorder davantage d'autonomie en matière de pédagogie, de recrutement et de vie scolaire.

Ce programme, qui, je le répète, est une expérimentation, n'a pas a priori vocation à se substituer à toute l'éducation prioritaire. Nous en dresserons le bilan, nous l'évaluerons et nous réfléchirons à la façon de coordonner les différents dispositifs qui, à ce stade, méritent d'être clarifiés.

M. le président. La parole est à M. René-Pierre Signé, pour la réplique.

M. René-Pierre Signé. Monsieur le ministre, l'opinion selon laquelle les ZEP sont inefficaces est loin d'être partagée par tous.

Une relance véritable et ambitieuse de l'éducation prioritaire s'impose – je pense que vous partagez ce point de vue – dans l'intérêt des élèves et des personnels, tant dans les zones urbaines sensibles qu'en milieu rural.

La suppression des ZEP accélérera la fermeture des classes et des écoles, particulièrement en milieu rural. Nous avons tout à gagner à renforcer les zones d'éducation prioritaires, à diminuer le nombre d'élèves par classe, à soutenir les familles en difficulté et à assurer davantage de mixité sociale.

Monsieur le ministre, comment peut-on imposer une politique éducative régie par le dogme de la réduction des moyens, qui est inconciliable avec le maintien, pourtant hautement proclamé, d'un véritable service public de l'éducation ?

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